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Les chrétiens poussés à quitter Israël par des groupes radicaux ?

Le gardien des lieux saints chrétiens a déploré des attaques "non-sanctionnées" ; des archevêques mettent notamment en cause les groupes pro-implantations

Stuart Winer est journaliste au Times of Israël

Photo d'illustration : Un prêtre inspecte les dégâts après qu'un homme a aspergé le sol de l'église de toutes les nations, dans le jardin de Gethsemane, de liquide inflammable, à Jérusalem-Est, le 4 décembre 2020. (Crédit : Ahmad Gharabli/AFP)
Photo d'illustration : Un prêtre inspecte les dégâts après qu'un homme a aspergé le sol de l'église de toutes les nations, dans le jardin de Gethsemane, de liquide inflammable, à Jérusalem-Est, le 4 décembre 2020. (Crédit : Ahmad Gharabli/AFP)

Des responsables chrétiens en Terre sainte ont averti que leurs communautés risquaient d’être chassées de la région par des groupes extrémistes israéliens et ils ont appelé au dialogue pour apaiser les choses et pour leur permettre de rester.

Le frère Francesco Patton, sacristain de Terre sainte et gardien des lieux saints chrétiens, a écrit une lettre ouverte qui a été publiée samedi par le Daily Telegraph britannique, estimant que « notre présence est précaire et notre avenir est en péril ».

La semaine dernière, les patriarches et les responsables d’église de Jérusalem ont émis un communiqué conjoint mettant en garde de la même façon contre le danger représenté par des groupes radicaux qui, selon eux, veulent « réduire la présence chrétienne » en Terre sainte.

Patton a écrit que ces dernières années, les vies de nombreux chrétiens ont été rendues « insupportables » par la présence de « groupes radicaux aux idéologies extrémistes ».

« Il semble que leur objectif est de libérer la Vieille Ville de Jérusalem de la présence des chrétiens, même dans le quartier chrétien », a-t-il ajouté.

Des lieux saints, notamment des églises, ont été profanés et vandalisés et des prêtres, des moines et des fidèles ont été pris pour cible par ces extrémistes, a accusé Patton.

« Ces groupes radicaux ne représentent ni le gouvernement, ni la population d’Israël. Mais comme c’est le cas avec toutes les factions extrémistes, une minorité radicale peut trop facilement peser sur la vie de la majorité – en particulier si les activités de ces groupes minoritaires peuvent se dérouler sans entrave et que leurs crimes ne sont pas sanctionnés ».

Le frère Francesco Patton, sacristain de la Terre sainte et gardien des lieux saints chrétiens au nom de l’église catholique. (Autorisation)

Patton a écrit qu’alors que les chrétiens représentaient dans le passé 20 % de la population de Jérusalem, ils sont moins de 2 % aujourd’hui. Ils ont lancé un appel au monde en appelant à être soutenus « de manière à pouvoir continuer à préserver la riche diversité de la Terre sainte ».

Un autre avertissement a été émis par Justin Welby, archevêque de Canterbury, en Grande-Bretagne, dans un article conjoint qui a été rédigé avec l’archevêque anglican de Jérusalem, Hosam Naoum, et qui a été publié par le Sunday Times. Ils ont expliqué que l’article avait été écrit suite à un communiqué des églises de Jérusalem, la semaine dernière, qui est paru sur Twitter et qui était intitulé « déclaration sans précédent des patriarches et des chefs d’église en Israël concernant l’avenir des chrétiens en Terre sainte ».

Dans leur article, Welby et Naoum ont dénoncé « une tentative concertée visant à intimider et à écarter » les chrétiens.

Ils ont noté que l’augmentation du nombre de communautés israéliennes pro-implantations, en plus des restrictions sur les déplacements entraînées par la barrière de sécurité construite par l’État juif pour contrecarrer les attentats terroristes commis par des Palestiniens de Cisjordanie, ont « approfondi l’isolement des villages chrétiens ».

En résultat, ont-ils ajouté dans leur article, « il y a un flux régulier de Palestiniens chrétiens qui quittent la Terre sainte pour refaire leur vie ailleurs ».

Marie van der Zyl, présidente du Conseil des représentants des Juifs britanniques. (Autorisation)

L’article des archevêques a entraîné les protestations de l’organisation Board of Deputies des Juifs britanniques, qui a examiné certaines accusations lancées sur les causes qui, selon les responsables chrétiens, entraîneraient la disparition des chrétiens en Israël.

La présidente du groupe, Marie van der Zyl, a écrit une lettre dans laquelle elle a fait part de son « profond regret » suite à l’article et appelant à rencontrer les deux hommes d’église pour évoquer les aspects « très troublants » de leur lettre ouverte, a fait savoir le Jewish Chronicle.

Tout en notant que les attaques commises à l’encontre de la communauté chrétienne étaient « inacceptables », Van der Zyl a mis en doute les causes de la diminution de la présence de cette dernière en Israël, soulignant qu’il y avait « des raisons plus complexes que celles soulevées » par les deux archevêques qui « semblent attribuer ce déclin aux habitants d’implantation juifs et à la barrière de sécurité construite pour mettre un terme aux attentats terroristes pendant la Seconde Intifada ».

Le communiqué de la semaine dernière, émis par le diocèse de Jérusalem au nom des patriarches et des chefs d’église de Jérusalem, mettait en garde contre « les menaces actuelles qui planent sur la présence chrétienne en Terre sainte ».

Tout en reconnaissant « avec gratitude l’engagement déclaré du gouvernement israélien à la nécessité de préserver un foyer sûr pour les chrétiens en Terre sainte », le communiqué déplorait néanmoins que « des groupes radicaux » achetaient des biens immobiliers dans le quartier chrétien « avec pour objectif de réduire la présence chrétienne ».

De tels groupes, continuait le communiqué, « utilisent souvent des accords conclus sous la main et des tactiques d’intimidation pour faire quitter leurs maisons aux résidents », diminuant ainsi le nombre de chrétiens installés et perturbant les itinéraires de pèlerinage situés entre Bethléem et Jérusalem.

Le communiqué notait les bénéfices apportés par les pèlerins chrétiens à l’État juif, citant un rapport établi par l’université de Birmingham estimant que ces derniers apportent environ trois milliards de dollars à l’économie.

Les responsables d’église demandaient à ouvrir « un dialogue urgent » avec les autorités « d’Israël, de Palestine et de Jordanie » qui « ont toutes fait savoir qu’elles étaient attachées à la protection de la liberté religieuse ».

Ils ont précisé que ces discussions devraient se concentrer sur « les défis présentés par les groupes radicaux » à Jérusalem et sur la création « d’un secteur culturel et de patrimoine chrétien qui permettra de sauvegarder l’intégrité du quartier chrétien dans la Vieille Ville de Jérusalem ».

Welby a publié sur Twitter ce « communiqué sans précédent » et il a vivement recommandé à ses abonnés de lire « ce cri du cœur ».

Des croix en bois brûlé et un extincteur après un incendie dans une église catholique dans un secteur contesté de Jérusalem, au cours d’une visite du pape François, le 26 mai 2014. (Crédit : AFP / Thomas Coe)

Vatican News a fait savoir, mercredi, que les organisations chrétiennes du monde entier avaient répondu au communiqué en transmettant des messages de soutien.

Le Conseil mondial des églises, qui représente 349 églises, a fait part de son appui, et son secrétaire-général, le révérend Ioan Sauca, a indiqué dans une déclaration que la Terre sainte « doit être respectée et considérée comme partie intégrante de notre patrimoine et de notre avenir dans la région ».

Le groupe américain Churches for Middle East Peace a également émis un communiqué soulignant l’importance des communautés chrétiennes en Terre sainte, selon Vatican News.

Même si Patton et les chefs d’église n’ont pas mentionné son nom explicitement, Ateret Cohanim est une organisation sioniste-religieuse qui œuvre à peupler la Vieille Ville et les autres quartiers de Jérusalem de résidents juifs en achetant des biens immobiliers à des propriétaires non-juifs.

De plus, des extrémistes juifs commettent depuis des années des actes de vandalisme à l’encontre de sites chrétiens à Jérusalem et sur le territoire israélien plus généralement, avec des graffitis ou des incendies volontaires. Ces extrémistes prennent aussi pour cible les Palestiniens.

L’équipe du Times of Israël et l’AFP ont contribué à cet article.

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