Opposés au licenciement du rédacteur en chef suite à une lettre anti-Israël, des employés d’Artforum démissionnent
Plusieurs employés du célèbre magazine d'art ont démissionné suite au licenciement de David Velasco, favorable à la « libération de la Palestine » dans une lettre ouverte sans un mot pour les massacres du Hamas
JTA — Plusieurs collaborateurs d’un magazine d’art de tout premier plan ont démissionné en signe de protestation, le week-end dernier, suite au licenciement de leur rédacteur en chef, auteur d’une lettre très critique à l’égard d’Israël.
Des personnalités pro-israéliennes du monde de l’art avaient fustigé Artforum et son rédacteur en chef, David Velasco, depuis la publication par le magazine d’une lettre en soutien à la « libération de la Palestine », sans un mot pour les 1 400 personnes massacrées lors de l’attaque d’Israël par le Hamas, le 7 octobre dernier.
Le cas n’est pas unique parmi les institutions artistiques ou culturelles, suite à l’attaque du Hamas et à la réponse militaire d’Israël à Gaza. Au 92NY à New York, par exemple, des membres du personnel ont démissionné et une série de livres-débats a été annulée après que la vénérable institution culturelle juive a annulé une conférence avec l’auteur d’une autre lettre ouverte condamnant Israël.
David Velasco, qui travaillait à Artforum depuis 2005, a été congédié jeudi, une semaine après avoir supervisé la publication d’une lettre ouverte « de la communauté artistique aux organismes culturels ».
Cette lettre ouverte disait notamment : « Nous soutenons la libération de la Palestine », condamnant ce qu’elle qualifie de « silence institutionnel » du monde de l’art face aux « crimes contre l’humanité dont est victime le peuple palestinien » et militant pour un cessez-le-feu à Gaza. Signée par des sommités juives du monde de l’art, comme Nan Goldin ou Barbara Kruger, cette lettre a été signée par Velasco.
Le libellé initial de cette lettre ouverte ne faisait aucune mention de l’attaque du 7 octobre par le groupe terroriste palestinien Hamas. Une clause additionnelle, ajoutée le 23 octobre, plusieurs jours après sa publication, signale que les instigateurs de la lettre, dont le nom n’a pas été révélé, « sont révulsés par le massacre de 1 400 personnes en Israël, perpétré par le Hamas le 7 octobre » et « espèrent le retour rapide de tous les otages » ainsi qu’un cessez-le-feu. Cette clause précise que le nouveau texte ne pouvait pas être distribué aux quelque 8 000 signataires de la version originale de la lettre.
Quelques jours plus tard, Velasco aurait été convoqué par Jay Penske, PDG du conglomérat de médias propriétaire d’Artforum. Lors de la réunion, a fait savoir The Intercept, Velasco aurait été licencié. Le même jour, les éditeurs du magazine ont publié un article notant que la lettre « n’était pas conforme au processus éditorial d’Artforum » et qu’elle avait été « mal interprétée », comme le reflet de la position du magazine.
« Je n’ai aucun regret », a déclaré Velasco par e-mail au New York Times. « Je suis déçu qu’un magazine qui a toujours défendu la liberté d’expression et la voix des artistes plie face aux pressions extérieures. »
Selon ARTNews, suite au licenciement de Velasco, quatre rédacteurs en chef au moins ont démissionné d’Artforum en signe de protestation et des dizaines d’autres employés et contributeurs ont signé leur propre lettre ouverte exigeant sa réintégration. Ils ont fait valoir que son licenciement à cause de la lettre était contraire aux valeurs de « débat culturel » sur lequel le magazine a bâti sa réputation. En outre, plusieurs artistes ont d’ores et déjà annoncé qu’ils ne travailleraient plus avec Artforum, comme l’ont fait Goldin et la peintre juive Nicole Eisenman.
Certains artistes qui ont retiré leur nom de la lettre après sa publication initiale ont expliqué l’avoir fait suite à ce qu’ils qualifient de pressions de la part de collectionneurs d’art pro-israéliens. The Intercept a indiqué que l’héritier de Bed Bath & Beyond, Martin Eisenberg, avait contacté quatre artistes signataires de la lettre – dont il possède des oeuvres – pour leur dire sa déception.
Selon le New York Times, Sarah Lehat Blumenstein, collectrice de fonds pour un musée juif, se serait dite – dans un groupe WhatsApp – prête à lancer un « programme de vente » pour « faire baisser la cote de ses artistes ». Blumenstein a déclaré au Times qu’un tel programme n’était pas d’actualité.