Israël en guerre - Jour 594

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Pour sa première visite officielle aux États-Unis, Ben Gvir s’exprimera lors d’une collecte en faveur du Habad d’Hébron

Aucune réunion n'est prévue avec les autorités américaines ou avec des organisarions juives importantes ; le chef du groupe juif de Yale à l'origine de l'invitation dit admirer le ministre d'extrême droite. Des groupes ont dit leur intention de manifester

Le ministre israélien de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, lors d'une audience au tribunal de Lod, le 15 avril 2025. (Crédit : Jonathan Shaul/Flash90)
Le ministre israélien de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, lors d'une audience au tribunal de Lod, le 15 avril 2025. (Crédit : Jonathan Shaul/Flash90)

Deux organisations juives au moins ont annoncé des événements, la semaine prochaine, avec l’Israélien Itamar Ben Gvir, à l’occasion du premier déplacement officiel aux États-Unis du politicien d’extrême droite en sa qualité de ministre de la Sécurité intérieure d’Israël.

Lorsque Ben Gvir avait rejoint le gouvernement israélien en 2022, l’administration Biden avait envisagé de l’interdire de séjour aux États-Unis et les organisations juives américaines lui avaient emboîté le pas en condamnant ses opinions extrémistes tout autant que son bilan. À plusieurs reprises, son parti Otzma Yehudit et lui-même ont appelé à l’expulsion des Palestiniens « déloyaux », à l’annexion de la Cisjordanie et à l’intensification de la guerre à Gaza.

Les principales organisations juives ont déclaré cette semaine ne rien savoir du déplacement de Ben Gvir ou ne pas avoir l’intention de le rencontrer ; les organisations pro-israéliennes d’extrême droite sont, pour leur part, revenues sur leurs déclarations initiales, à savoir qu’elles étaient elles-mêmes à l’origine dé ce déplacement.

Seule l’organisation juive Shabtai, dont le siège se trouve à l’Université de Yale et dont les fondateurs comptent dans leurs rangs le sénateur démocrate Cory Booker, du New Jersey, accueillera Ben Gvir à deux reprises : une fois sur le campus de Yale à New Haven, dans le Connecticut, le 23 avril au soir, et une autre fois l’après-midi suivant, cette fois dans l’Upper East Side de New York. (Ces événements tombent en même temps que Yom Hashoah, la journée de commémoration de la Shoah en Israël.)

Selon Shabtai, la première conférence réunira des étudiants et des professeurs de Yale et, selon les termes de l’annonce, le second événement évoquera « la sécurisation d’Israël après le 7 octobre » avec un panel composé « de juges fédéraux, de banquiers, de professeurs de Columbia/NYU et de notables de New York attachés à Israël », a expliqué le directeur de Shabtai.

Plus tard dans la soirée, une branche du mouvement Habad-Loubavitch accueillera Ben Gvir pour une collecte de fonds à Brooklyn en faveur du Habad d’Hébron, en Cisjordanie. A Crown Heights, Bais Shmuel Habad a annoncé, pour un tarif de 36 dollars par personne, une « table ronde » avec Ben Gvir pour « avoir un aperçu des coulisses de la lutte pour la souveraineté juive sur toute la Terre d’Israël et des initiatives prises en faveur de la victoire par la force, et ce au plus haut niveau du gouvernement ».

Avant l’annonce de l’événement, un porte-parole de Habad avait déclaré à la Jewish Telegraphic Agency que le mouvement orthodoxe, dont les synagogues fonctionnent de manière autonome, n’était pas informé de la tenue de réunions avec Ben Gvir.

Le rabbin Shmully Hecht, cofondateur de Shabtai et actuel conseiller rabbinique, a déclaré à la JTA qu’il était fier d’accueillir Ben Gvir.

« Shabtai prône la liberté d’expression et accueille des conférenciers de points de vue très variés sur la politique, les affaires, l’éthique, la religion, la littérature, les arts et plus encore. Nous promouvons le judaïsme et la liberté d’expression. C’est dans le Talmud », a-t-il écrit dans un courriel.

Hecht, qui a également fondé le centre Habad de Yale, n’a pas hésité à affirmer son soutien au ministre. « J’admire Ben Gvir », a-t-il écrit en le comparant à Booker et à un autre sénateur démocrate, Richard Blumenthal, du Connecticut, qui est juif. « Itamar promeut ce qu’il croit être le mieux pour son peuple, qui l’a élu démocratiquement. »

L’avocat israélien Itamar ben Gvir s’exprime lors d’une cérémonie marquant le 27ème anniversaire de la mort du rabbin Meir Kahane après qu’il a été assassiné par un homme armé arabe dans un hôtel de Manhattan à Jérusalem, le 7 novembre 2017. (Photo par Yonatan Sindel/Flash90 *** Local Caption)

Il a également dit du bien du rabbin Meir Kahane, le défunt extrémiste juif que Ben Gvir admire depuis longtemps : « Ben Gvir, comme Meir Kahane, avait mis en garde les Israéliens, le peuple juif et l’Occident contre les dangers de l’islam radical et des djihadistes », a-t-il poursuivi.

« Malheureusement, ils n’ont pas été écoutés par les libéraux naïfs qui présument à tort que les Occidentaux peuvent faire la paix avec des gens comme l’EI, Al-Qaïda, le Hamas, le Hezbollah ou encore les mollahs iraniens. Il faut que le 7 octobre soit la dernière guerre d’Israël. Seuls des dirigeants audacieux et résolus comme Ben Gvir peuvent le garantir. «

L’administration Biden avait refusé tout contact avec Ben Gvir et sanctionné les organisations de résidents d’implantations violents, porteuses de son idéal de massification des implantations juives en Cisjordanie, mais Trump a levé les sanctions et ajouté sa voix aux appels du ministre à vider Gaza de sa population – sans doute pour lui garantir un meilleur accueil aux Etats-Unis. Selon Haaretz, Ben Gvir fera le déplacement en compagnie d’Akiva Hacohen, un résident d’implantation né aux États-Unis et condamné en 2013 pour espionnage de l’armée israélienne afin de protéger les implantations illégales.

Pour les nombreux détracteurs de Ben Gvir, la tenue de ces événements et les autres engagements évoqués par son cabinet devant les médias israéliens, sont le signe de la normalisation des opinions du politicien.

« Se mobiliser contre Ben Gvir, c’est se mobiliser contre l’extrémisme », affirme Offir Gutelzon, dirigeant d’UnXeptable, mouvement de protestation des Israéliens aux États-Unis. Le groupe organisera une manifestation anti-Ben Gvir dans l’Upper East Side jeudi prochain, à peu près au même moment que l’événement de Shabtai.

Dans une lettre de l’organisation, on peut lire : « En tant qu’Israéliens vivant en Amérique et aussi en tant que Juifs américains, nous pensons que cette visite mérite un message clair : Itamar Ben Gvir n’est pas le bienvenu au sein de notre communauté. Il n’est pas le bienvenu dans notre pays. Il ne nous représente pas en tant que Juifs ou en tant qu’Israéliens. Nous nous opposons fermement à sa vision sombre du judaïsme, d’Israël et du Moyen-Orient. »

La lettre est cosignée par des Juifs progressistes non affiliés et par des organisations telles que Union for Reform Judaism, le New York Jewish Agenda, We Are All Hostages – qui défend les familles d’otages israéliens -, J Street et plusieurs proches d’otages.

Le cabinet de Ben Gvir a déclaré aux médias israéliens que le déplacement du ministre aux États-Unis le ferait passer à Miami, New York et Washington. Il s’est dit un temps qu’il pourrait rencontrer son homologue de l’administration Trump, la Secrétaire à la Sécurité intérieure Kristi Noem, mais cette réunion ne serait plus à l’ordre du jour, selon une information de Haaretz. Le porte-parole de la Sécurité intérieure n’a pas souhaité donner suite à la demande de commentaire de la JTA.

Il n’y a pas davantage de détails sur ce déplacement et la plupart des grandes organisations juives américaines contactées par la Jewish Telegraphic Agency ont déclaré ne pas avoir l’intention de le rencontrer. Certaines ne savaient rien de ce déplacement.

Les représentants de l’Anti-Defamation League, de l’American Jewish Committee, des Jewish Federations of North America et du groupe de coordination de la Conference of Presidents ont dit à la JTA qu’ils ne rencontreraient pas Ben Gvir, les trois derniers soulignant qu’aucune demande ne leur avait été adressée.

Des Juifs américains et des expatriés israéliens manifestent contre le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, devant l’hôtel Grand Hyatt à Washington, le 12 mars 2023. (Crédit : Jacob Magid/Times of Israel)

Il y a de cela deux ans, les dirigeants de certains de ces groupes avaient rencontré en secret un autre allié de Ben Gvir, Bezalel Smotrich, lors de son déplacement aux États-Unis. Leur rencontre, rendue publique plusieurs mois plus tard, avait suscité de vives réactions de la part d’organisations juives libérales et centristes. (Smotrich lui-même a fait un rapide déplacement, le mois dernier, pour s’entretenir avec le Secrétaire au Trésor de Trump.)

Les événements ayant fait l’objet d’une confirmation concernent des organisations habituées à traiter avec des personnes ayant des opinions extrêmes.

Fondé dans les années 1990 par plusieurs personnalités, dont Booker, alors étudiant en droit à Yale, Shabtai (qui à plusieurs reprises a été nommée Chai Society et Eliezer) se présente comme un club intellectuel qui accueille des conférenciers juifs pour des événements sur le campus ou en-dehors.

En 2022 ont participé à des événements de Shabtai Simcha Rothman, provocateur politicien israélien de droite, des juges de la Cour suprême israélienne, l’ancien responsable de l’administration Trump Anthony Scaramucci, le blogueur juif antisioniste Philip Weiss et Booker lui-même. Le groupe a fait la une des journaux au moment des primaires républicaines en vue de la présidentielle 2024, lorsque l’ancien membre Vivek Ramaswamy, qui n’est pas juif, s’est présenté à la présidence avec dans l’idée de limiter l’aide à Israël.

Hecht, le directeur de Shabtai, a travaillé à ses débuts avec Booker, lequel n’a pas donné suite à la demande de commentaire à propos de l’événement avec Ben Gvir. Le sénateur a eu des mots durs à l’égard du Premier ministre Benjamin Netanyahu et de sa coalition, dont Ben Gvir fait partie, qu’il a qualifiée d’« ultra-droite ».

Participeront également à l’événement du Habad avec Ben Gvir le podcasteur israélien et défenseur de l’émigration juive Yishai Fleisher et le rabbin Danny Cohen, chef du Habad d’Hébron.

Le porte-parole d’Hébron, Yishai Fleisher, à droite, et Marc Zell, le chef des Républicains d’outre-mer en Israël, soufflent dans des shofars pour montrer leur soutien à Trump, le 2 novembre 2020. (Avec l’aimable autorisation de Har Hevron, porte-parole du conseil régional)

Le mouvement Habad est proche de la droite aux États-Unis comme en Israël. Le responsable des frontières de Trump, Tom Homan, a même assisté à un dîner dans une yeshiva, le mois dernier, et la semaine dernière, Trump a annoncé qu’un homme d’affaires de Habad, Yehuda Kaploun, allait devenir son envoyé spécial sur les questions d’antisémitisme. Linda McMahon, la Secrétaire à l’Éducation, s’est rendue dans une école du mouvement Habad lors de l’une de ses premières visites scolaires, et Trump lui-même a visité l’Ohel, la tombe de Menachem Mendel Schneerson, le dernier leader du mouvement, plus connu sous le nom de Rabbi.

Pour certains membres du mouvement Habad, la venue de Ben Gvir à Crown Heights va trop loin.

« Je suis très déçue par cette communauté », confie à la JTA Tzofiah Frieden, artiste Habad libérale et influenceuse sur les réseaux sociaux qui vit à Crown Heights, au sujet de l’événement avec Ben Gvir. Évoquant l’opposition de Schneerson à prendre des positions politiques, Frieden explique que la venue de Ben Gvir est « contraire aux valeurs qui devraient être les nôtres en qualité de mouvement Habad ».

Elle admet toutefois que la communauté de Crown Heights penche vers la droite depuis quelques années, mais estime que la plupart des gens de Crown Heights, plutôt favorables à une solution à un État privilégiant une majorité juive, ne comprennent pas le vrai sens politique de la venue de Ben Gvir.

« Nombre de personnes qui vivent à Crown Heights ne sont pas très conscients, politiquement parlant », ajoute-t-elle. « Tout ce qu’ils savent de lui, c’est qu’il veut un Israël uni et une solution à un État. Je ne sais même pas s’ils sont au courant de son passé kahaniste. »

Souvent opposé aux pro-Palestiniens voire à des Juifs dans la rue comme en ligne, Betar US a écrit sur X – avant de supprimer le message – qu’il « accueiller[ait] chaleureusement un dirigeant du gouvernement israélien, Itamar Ben Gvir, pour son tout premier déplacement aux États-Unis la semaine prochaine », et qu’il « organiserait avec plaisir des événements à Washington, New York et Miami ».

Auteur de récents appels à un « exode juif massif » vers Israël, tout en faisant pression sur la Knesset israélienne pour interdire l’entrée de certains Juifs progressistes, Betar US s’est rapidement attiré les foudres du Représentant démocrate pro-Israël Ritchie Torres, qui a annoncé il y a peu sa candidature au poste de gouverneur de New York. Torres a refusé la proposition de Betar US de rencontrer Ben Gvir.

« Jamais je n’accorderai d’audience à un extrémiste comme Ben Gvir ou à une organisation comme la vôtre, favorable à ses visées extrémistes », a tweeté Torres, qui avait précédemment traité le ministre de « démagogue méprisable, répugnant et dangereux ». « Si vous aviez fait des recherches, vous auriez su que je n’ai que du mépris pour [Ben] Gvir. »

Le ministre de la Sécurité intérieure Itamar Ben Gvir (2e à gauche) sur le mont du Temple à Jérusalem, le 2 avril 2025 (Otzma Yehudit)

Betar US a un temps laissé entendre que cette visite s’effectuait en co-parrainage avec l’Organisation sioniste d’Amérique, avec laquelle le groupe s’est allié au Congrès sioniste mondial. Mais le chef de l’Organisation sioniste d’Amérique, Mort Klein, a déclaré à la JTA qu’il « n’avait jamais donné l’autorisation d’accueillir Ben Gvir », sans pour autant donner son point de vue sur le ministre.

Betar a ensuite supprimé ce tweet et est revenu sur sa proposition d’accueil à la suite d’une question de la JTA. Une nouvelle fois contacté ce jeudi, l’organisation n’a pas précisé si elle organiserait son propre événement avec Ben Gvir.

« Betar US soutient tous les ministres du gouvernement israélien lors de leurs déplacements », a déclaré le porte-parole. « Nous sommes heureux que la communauté sioniste et juive accueille le ministre en Amérique à l’occasion de cette visite. »

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