Israël en guerre - Jour 561

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Rassemblant les images filmées par les soldats à Gaza, les militants anti-Israël maintiennent la pression

Des bases de données consacrées aux militaires sont créées à l'aide de différents réseaux pour s'assurer qu'elles ne pourront pas disparaître en tant que preuves présumées de crimes de guerre. Mais Israël protège-t-il efficacement ses vétérans ?

Un soldat de l'armée israélienne se tient debout devant un suspect palestinien à Gaza dans une séquence non datée téléchargée sur les réseaux sociaux le 2 février 2024. (Capture d'écran/X)
Un soldat de l'armée israélienne se tient debout devant un suspect palestinien à Gaza dans une séquence non datée téléchargée sur les réseaux sociaux le 2 février 2024. (Capture d'écran/X)

Ces derniers mois, alors même que la guerre d’Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza entrait dans sa deuxième année, l’armée a réactualisé ses directives concernant les interviews avec les soldats et elle a demandé aux journalistes de dorénavant taire l’identité des troupes. Elle a également mis en garde ces dernières en les appelant à s’abstenir de poster des photos et des vidéos du champ de bataille sur les réseaux sociaux.

Des changements qui sont intervenus après que certaines organisations anti-israéliennes – c’est notamment le cas de la Fondation Hind Rajab, dont le siège est en Belgique et dont les activités ont été révélées au grand jour dans une enquête de Shomrim, au début de l’année – se sont efforcées de poursuivre en justice les militaires israéliens pour des crimes de guerre présumés qui auraient été commis à Gaza, traquant leurs déplacements partout dans le monde.

Comme Shomrim en avait antérieurement fait part dans une série d’articles effectués en collaboration avec la chaîne d’information israélienne N12, l’armée n’a pas su faire appliquer ses propres directives s’agissant de l’utilisation des téléphones sur le front depuis le début de la guerre – ce qui met en évidence la difficulté, pour Tsahal, de garantir la discipline militaire dans ses rangs, de façon plus générale. Et même lorsque l’armée est finalement passée à l’acte, elle a été dans l’incapacité d’empêcher la diffusion des images par le biais des réseaux sociaux.

Ces dernières semaines, un autre groupe, appelé Israel Exposed, a mis en ligne une énorme base de données contenant des vidéos postées sur les réseaux sociaux par les soldats israéliens, s’attardant sur leurs agissements présumés illégaux à Gaza et en Cisjordanie.

Cette base contient plus de 350 gigaoctets d’informations, téléchargeables via des réseaux de partage peer-to-peer à l’aide d’un lien partagé par le groupe sur Telegram.

Certaines de ces séquences pourraient être utilisées pour étayer des poursuites judiciaires pour crimes de guerre présumés de la part des troupes israéliennes, tandis que d’autres pourraient servir à « doxer » des soldats, un terme désignant la divulgation des informations personnelles d’un individu – son adresse personnelle, son numéro de téléphone et son état civil – ce qui permettrait à des activistes anti-israéliens de potentiellement les suivre et les harceler.

Au mois de mars, l’Afrique du Sud a soumis un dossier au Conseil de sécurité des Nations unies, qui, selon elle, contient « des preuves librement accessibles sur les actes de génocide commis par l’État d’Israël contre la population palestinienne à Gaza ». Le dossier comprend des centaines de références à des vidéos de soldats qui ont été diffusées sur les réseaux sociaux.

Des soldats de la brigade Golani interviennent dans le sud de Gaza, à Rafah, sur une photo distribuée le 11 avril 2025. (Armée israélienne)

La base de données qui a été mise en ligne par Israel Exposed est constituée de sauvegardes de compilations existantes de vidéos qui ont été hébergées ailleurs sur Internet – sur TikTokGenocide.com, par exemple – et de séquences que les propres militants du groupe ont compilées et triées grâce à une initiative collective qui, selon ses organisateurs, a été mise en place sur Discord, une application de chat social populaire auprès des gameurs.

Selon Israel Exposed, la base de données comprend des vidéos compilées par des centaines de militants pro-palestiniens qui ont rassemblé et trié les séquences sur Discord. La base de données sert également à archiver des banques de vidéos existantes qui ont été collectées par diverses organisations qui surveillent les comptes des soldats israéliens, qui postent quotidiennement des images de la guerre sur les réseaux sociaux.

Deux manifestantes brandissent le drapeau palestinien devant le Palais de la Paix, à l’arrière, qui abrite la Cour internationale de justice, à La Haye, aux Pays-Bas, le 24 mai 2024. (Crédit : Peter Dejong/AP)

Le groupe cherche à garantir que, grâce à cette vaste base de données, les vidéos des soldats qui ont été postées sur les réseaux sociaux resteront dans le domaine public, même si les troupes tentent de supprimer de leurs propres comptes les preuves des agissements de l’armée israélienne à Gaza.

Israel Exposed a fait savoir, sur les réseaux sociaux, que la base de données avait été remise par ses soins à la Cour pénale internationale de La Haye, ainsi qu’à l’équipe juridique de la Fondation Hind Rajab.

Des images sur la blockchain

Cette initiative n’est que l’une des nombreuses tentatives récentes, de la part des groupes en ligne, qui visent à rassembler des images postées par les soldats et à les diffuser sur internet en les rendant accessibles à tous. Des projets similaires ont permis, ces dernières années, de collecter des documents en provenance de diverses zones de conflit, notamment après l’invasion de l’Ukraine par la Russie – les images montrant les atrocités de la guerre se répandant rapidement sur la Toile.

Une autre initiative qui, là aussi, prend pour cible la guerre à Gaza, s’appuie sur la technologie blockchain pour stocker les séquences diffusées par les soldats sur les réseaux sociaux dans un registre décentralisé, ce qui les rend moins vulnérables à une éventuelle censure de la part des sociétés de réseaux sociaux et des géants de la technologie – des plateformes telles que X et Facebook étant susceptibles de tenter de bloquer leurs opérations.

Un soldat de l’armée sur le point de jeter un Coran au feu, à Gaza. (Capture d’écran)

Sur une troisième base de données qui vient d’être lancée, un catalogue de vidéos des actions des soldats israéliens à Gaza – certaines provenant des posts écrits par les troupes et d’autres de sources palestiniennes. Les vidéos sont classées en sections différentes : « Jouer avec des jouets d’enfants » ou « Utiliser des Palestiniens comme boucliers humains », entre autres – et elles sont catégorisées en fonction de l’unité militaire des soldats, du type d’arme utilisée et du lieu géographique exact de l’incident, sur la base des balises de localisation des soldats.

La base donne les noms des soldats qui ont initialement téléchargé les vidéos sur les réseaux sociaux.

Une section consacrée à la brigade Givati contient plus de 50 séquences montrant des soldats « en train de profaner le Coran » et « ouvrant le feu sans discernement ».

Certaines de ces bases de données se focalisent sur les soldats qui ont la double nationalité, avec pour objectif d’exercer des pressions sur les autorités étrangères en faveur du lancement de poursuites judiciaires à l’encontre des individus incriminés, hors des frontières d’Israël. Les personnes ayant la double nationalité sont ainsi particulièrement exposées, comme l’avait signalé Shomrim dans une enquête antérieure.

Le journaliste canadien Davide Mastracci, par exemple, a constitué une base de données à partir des reportages diffusés par les médias et des messages postés sur les réseaux sociaux par environ 85 citoyens canadiens ayant servi au sein de Tsahal. L’un des citoyens canadiens mentionnés dans la base de données est Ben Mizrachi qui, après une enfance passée à Vancouver, avait déménagé en Israël et avait servi comme soldat seul dans le cadre de l’unité médicale de combat de la Brigade des parachutistes. Mizrachi a été assassiné à l’âge de 22 ans lors du pogrom commis par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre. Il s’était rendu au festival de musique électronique Supernova, où le groupe terroriste avait été à l’origine d’un carnage.

Ben Mizrachi (Crédit : capture d’écran Facebook, utilisée conformément à la clause 27a de la loi sur le droit d’auteur)

L’objectif apparent de l’initiative prise par Mastracci est de faire pression sur le gouvernement canadien de manière à ce qu’il interdise aux citoyens de rejoindre Tsahal. Les Juifs canadiens, de leur côté, s’inquiètent de la possibilité que la base de données puisse être utilisée pour menacer physiquement toute personne dont le nom y figure.

« Nous savons ce que les ‘listes de Juifs’ signifient pour des gens comme Mastracci », a écrit sur X Paul Hirschson, le consul-général d’Israël à Montréal.

D’autres bases de données vont encore au-delà des soldats qui ont servi à Gaza, avec des organisations qui indiquent qu’elles sont en train de compiler des listes de journalistes israéliens liés à l’armée ou à des organisations juives de premier plan. Parmi eux, Barak Ravid d’Axios, qui a autrefois servi dans l’armée dans le cadre de son service obligatoire.

Assurance évasion

Les autorités israéliennes ont jusqu’à présent eu du mal à relever les défis soulevés par ce champ de bataille numérique. Au début de l’année, après qu’un soldat israélien, Yuval Vagdani, a été menacé d’arrestation alors qu’il se trouvait au Brésil, le ministère des Affaires étrangères s’est empressé de diffuser un communiqué affirmant que « le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, a immédiatement déployé toutes les ressources du ministère pour s’assurer que l’Israélien n’était pas en danger ».

Et pourtant, en pratique, il n’est pas certain que le ministère ait pris des mesures suffisantes pour protéger les militaires en mission à l’étranger. Alors qu’il lui était demandé si Vagdani avait payé son propre billet d’avion pour rentrer en urgence en Israël après avoir été évacué du Brésil, un porte-parole du ministère a refusé d’établir si son bureau avait pris en charge les frais ou s’il allait rembourser le soldat.

Une réponse à cette question peut être trouvée sous la forme d’une publicité qui a été diffusée par la compagnie israélienne d’assurance voyage PassportCard. Elle a récemment lancé une campagne de vente d’assurances aux soldats dans le cas où ils auraient besoin de prendre la fuite.

« Parce que nous sommes profondément attachés à la sécurité et à la liberté des réservistes et des soldats de l’armée israélienne, nous avons créé un fonds spécial à hauteur d’un million de dollars pour couvrir les frais de billets d’avion achetés en urgence, à un prix allant jusqu’à 1 500 dollars, pour tous nos clients contraints de modifier l’itinéraire de leur voyage ou de quitter le pays dans lequel ils se trouvent en raison de demandes de mandat d’arrêt à l’étranger consécutives à leur participation à l’opération ‘Épées de fer’, » a fait savoir Passport Card dans un courriel.

Le mois dernier, le Times of Israel a rapporté que PassportCard avait payé le retour en Israël, en toute urgence, de deux soldats qui étaient en vacances à Amsterdam après que des groupes anti-israéliens se sont mobilisés pour obtenir l’émission de mandats d’arrêt à leur encontre.

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