Un Juif de Montréal négocie la libération des esclaves sexuelles yazidi
Développant son ethos 'plus jamais' avec une campagne de crowdfunding en ligne, l'ONG de Steve Maman a déjà libéré 130 femmes et fillettes. Des milliers sont encore en captivité
NEW YORK – Rester les bras croisés n’a jamais été une option pour Steve Maman lorsque les images de Chrétiens et de Yazidis d’Irak brutalisés ont défilé sur les écrans de télévision de son domicile de Montréal et rempli le flux Twitter de cet homme de 42 ans.
« Le moment déterminant pour moi a été quand l’Etat islamique a diffusé des images d’enfants habillés de combinaisons oranges entassés dans une cage tandis qu’à l’extérieur un soldat dirigeait une flamme vers eux. Je me suis dit : ‘Steve, tu dois agir’, » a confié Maman dans une interview téléphonique avec The Times of Israel cette semaine.
L’homme d’affaires juif de Montréal et père de six enfants a créé une ONG, The Liberation of Christian and Yazidi Children of Iraq (CYCI).
Depuis sa création il y a huit mois, CYCI a négocié avec succès la libération de près de 130 femmes et jeunes filles des zones contrôlées par l’EI en Irak.
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Depuis que l’État islamique (communément appelé EI ou EIIL) a repris Mossoul, en Irak, en juin 2014, ses partisans ont violé et agressé sexuellement des milliers de femmes et d’enfants, dont la plupart sont des Yazidis et des Chrétiens. Beaucoup ont aussi été vendues comme esclaves sexuelles et mariées de force à des combattants de l’État islamique.
Les militants de l’EIIL soumettent les femmes et les enfants des conditions inhumaines. Souffrant de malnutrition, les prisonniers sont obligés de dormir dans des cages pendant la nuit, selon le Haut Commissariat des Nations Unies sur les droits de l’Homme.
Au moins 2 700 femmes et de filles supplementaires sont encore en captivité, estime Maman, ajoutant que la mission de son association prendra fin lorsqu’elles seront toutes libérées.
Canon Andrew White, l’ancien pasteur de Saint-George, la plus grande église de Bagdad, a présenté Maman à un réseau de contacts.
Selon White, il en coûte entre 1 000 et 3 00 dollars pour libérer chaque femme ou fille des mains de l’EI. CYCI négocie leurs libérations avec des intermédiaires dans les territoires contrôlés par l’Etat islamique. La plupart des femmes et des filles ont subi des abus de violence physique et sexuelle extrêmes.
« Vous devez les acheter. Il n’y a pas d’autre moyen, » a déclaré White dans une interview téléphonique.
Bien que le Canada ne négocie pas avec des organisations terroristes telles que l’Etat islamique, il n’y a aucune loi interdisant aux ONG de poursuivre le genre de travail que celui que Maman est en train d’accomplir.
Initialement, Maman a compté sur des dons de la communauté juive séfarade de Montréal. De bouche à oreille, le soutien financier est venu d’Allemagne, d’Angleterre, d’Australie, d’Irlande et des États-Unis. Jusqu’ici CYCI aurait amassé près de 450 000 dollars.
Mis à part la collecte de fonds à travers leur campagne sur la plateforme de GofundMe, Maman espère obtenir les soutiens d’Elie Wiesel et d’Oprah Winfrey afin de sensibiliser davantage l’opinion publique.
« Vous pouvez agir, ou vous pouvez rester un spectateur, » dit Maman.
« Si vous restez un spectateur, sachez que vous êtes dans le même groupe de personnes qui ont regardé et n’ont rien fait quand six millions de Juifs ont été assassinés durant la Shoah. »
«Si vous restez un spectateur, sachez que vous êtes dans le même groupe de personnes qui ont regardé et n’ont rien fait quand six millions de Juifs ont été assassinés durant la Shoah»
Une fois libérées, les femmes et les filles sont d’abord emmenées à un camp de personnes déplacées au Kurdistan.
Là, elles reçoivent de la nourriture, des abris et des soins médicaux. Beaucoup de femmes et de filles sont enceintes.
Le personnes fraichement libérées sont réunies avec leurs familles dès que possible. Une assistance est fournie pour aider à localiser celles dont les familles n’ont pas pu être trouvées.
« Personne n’est seul. Nous les recherchons », dit White, qui travaille depuis 2005 avec la Fondation pour les secours et la réconciliation au Moyen-Orient.
Bien que la presse ait surnommé Maman « Le Schindler juif », la comparaison ne convient pas au militant humanitaire d’origine marocaine.
« Schindler était sur une autre planète que moi. Pour moi, je trouve qu’il est inapproprié de m’appeler ainsi, mais si cela contribue à sensibiliser à la cause alors qu’il en soit ainsi », a-t-il répondu.
En revanche, Maman insiste sur son travail d’équipe. Mis à part les gens sur le terrain, il y a tout un groupe de « Juifs, Musulmans et Chrétiens qui rendent cela possible. Ils se battent bec et ongles pour faire passer le mot. Sans eux, CYCI est sans valeur. »
À Montréal, cinq bénévoles supervisent l’opération, qui consiste à réaliser des vidéos promotionnelles, à répondre à des courriels et à préparer des dossiers de presse. Kelly Amram, une opticienne de Montréal, est l’une de ces bénévoles.
« Il s’agit du plus grand génocide des femmes et d’enfants depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, » dit-elle. « Quand nous disons ‘jamais plus’, nous voulons dire ‘jamais plus’; quel que soit votre religion, ou vos convictions.
« Les gens font des dons comme si c’était leurs propres enfants », a ajouté Amram.
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