Une commissaire démissionne, accusant le gouvernement d’avoir politisé et négligé la police
Selon Lee Pearl-Bahiri, les forces de l'ordre ont "changé de visage" sous l’autorité de Ben Gvir et manquent de ressources et d'effectifs pour lutter contre la criminalité

Une haute responsable de la police israélienne a démissionné mardi, dénonçant ce qu’elle a qualifié de politisation des forces de l’ordre sous le gouvernement actuel.
La commissaire Lee Pearl-Bahiri, ancienne officière de la division des enquêtes du quartier général de la police, a déclaré que les forces de l’ordre avaient changé leurs priorités et rencontré des difficultés financières ces dernières années, ce qui l’avait poussée à démissionner après près de trente ans de service.
Pearl-Bahiri a déclaré qu’elle avait toujours agi en tant que « défenseur public » du système judiciaire dans ses conversations avec ses amis, mais qu’elle était désillusionnée depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement actuel dirigé par le Premier ministre Benjamin Netanyahu.
« Je me suis retrouvée dans une position très délicate, exposée à des choses incompatibles avec les valeurs qui ont toujours été les miennes », a-t-elle expliqué.
Selon elle, toute une série de questions urgentes ont été mises en veille depuis lors, notamment la lutte contre le crime organisé, les accidents de la route et du travail, les délits sexuels, la violence à l’égard des femmes et la criminalité au sein de la communauté arabe israélienne.
« Tout cela a été mis de côté. ‘Ce n’est pas ce qui est important pour le moment’, m’ont-ils dit », a-t-elle raconté dans un message publié sur Facebook après avoir présenté sa démission.

Au lieu de cela, elle a reçu pour instruction de se concentrer sur les plaintes des résidents juifs concernant les nuisances causées par les mosquées qui diffusent l’appel à la prière, ainsi que sur l’incitation en ligne du « bon type », faisant vraisemblablement référence à l’incitation des Arabes contre les Juifs.
« Des commissariats ont été supprimés. Des postes demeurent vacants. Personne ne vient, et si quelqu’un vient, il repart aussitôt », a-t-elle exposé, avertissant que la situation risquait de se détériorer encore davantage à mesure que sa génération approchait de l’âge de la retraite.
Depuis l’entrée en fonction, fin 2022, du ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, dont le poste a été récemment modifié et dont l’influence sur la police a été considérablement élargie, de nombreux experts juridiques ont exprimé leurs inquiétudes quant à la politisation des forces de police sous son mandat. Ses détracteurs l’accusent de vouloir modeler les forces de l’ordre pour qu’elles se conforment à son programme idéologique.
Le ministre ultranationaliste s’est lui-même vanté d’accorder des promotions aux officiers uniquement s’ils appliquent ses politiques, notamment « la compassion envers les militants d’extrême droite » et la destruction « de villages entiers » construits illégalement par des Bédouins sur des terres appartenant à l’État dans le Néguev.
Pearl-Bahiri a décrit le déclin des forces de l’ordre comme indéniable au premier coup d’œil.
« J’habite au-dessus d’un terrain de jeux. À droite de mon immeuble, il y a un projet de construction de luxe. La nuit, le terrain de jeux est contrôlé par de jeunes gens qui, à l’époque où j’étais éducatrice, auraient été renvoyés chez eux avec une amende pour tapage et n’y seraient jamais revenus », a-t-elle souligné.
Quant au projet de construction, Pearl-Bahiri a déclaré qu’il était sous le contrôle d’un gang ultra-orthodoxe qui « extorque l’entrepreneur par des menaces, brûle des tracteurs, démolit des clôtures et cause des dommages matériels ainsi que des nuisances sonores dans tout le quartier ».
Bien que la police soit venue pour « faire étalage de sa force », elle n’a jamais arrêté aucun des fauteurs de troubles, a-t-elle affirmé.
« Je pense que c’est politique. Car si ces mêmes ultra-orthodoxes avaient simplement changé de tee-shirt et s’étaient dirigés vers [la rue] Kaplan, ils auraient été arrêtés par la garde montée et des fumigènes », a-t-elle déclaré, faisant référence au lieu où se déroulent la plupart des manifestations anti-gouvernemental à Tel Aviv.
Outre la politisation présumée de la police, elle a ajouté que les forces de l’ordre souffraient également d’un sous-financement chronique, une autre raison justifiant son départ.
« Il n’y avait jamais assez de fonds… On avait toujours l’impression que les ressources appartenaient au ministère de la Défense, qui en avait davantage besoin », a expliqué Pearl-Bahiri. Mais son opinion a changé après les événements tragiques du 7 octobre 2023, « lorsque la police a physiquement sauvé le sud de l’invasion du [groupe terroriste palestinien du] Hamas ».
« Le 7 octobre a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, et [ma] destinée vers la vie civile s’est initiée plus tôt que prévu et souhaitée », a-t-elle écrit.