Israël en guerre - Jour 371

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Interview

Une histoire d’amitié entre septuagénaires et une fille juive de bonne famille

Bellina Welner-Goldberg explore les maisons closes de Belgique avec son deuxième roman, rempli d'humour malgré le deuil omniprésent

Couverture du roman Toutes les grands-mères ne tricotent pas que des grenouillères de l’auteure belgo-israélienne Bellina Welner-Goldberg (Crédit : Autorisation)
Couverture du roman Toutes les grands-mères ne tricotent pas que des grenouillères de l’auteure belgo-israélienne Bellina Welner-Goldberg (Crédit : Autorisation)

Toutes les grands-mères ne tricotent pas que des grenouillères, le deuxième roman de Bellina Welner-Goldberg, est amusant, subtil et incisif.

Il narre l’histoire d’une jeune fille juive de bonne famille qui vend des préservatifs dans les maisons closes huppées de Belgique et qui, par un concours de circonstances (tragiques), va se retrouver à vivre avec la grand-mère délurée de son ex-mari et les trois amies septuagénaires de cette dernière.

En très peu de mots et avec son humour caractéristique – découvert dans son premier roman, Spleen Ashkenaze – Bellina Welner-Goldberg parvient, en une centaine de pages, à toucher une multitude de sujets actuels et épineux, des maisons closes et leurs prostituées aux droits des septuagénaires (au travail), en passant par la religion et les tensions que celle-ci peut engendrer au sein d’une famille. Le deuil, sujet central, est évoqué avec délicatesse et sans mettre d’ombre au récit ni alourdir ces personnages touchants et attachants, même les « vilains ».

Dès la première scène, l’auteure nous amène au cœur de ce récit attendrissant, et nous retrouvons l’héroïne, Julia, une jeune femme enceinte jusqu’au bout des ongles, en pleine discussion avec des clients d’une de ces maisons closes, attendant leur « tour ».

Comment associe-t-on de manière aussi fluide et presque naturelle même, prostituées, religion et septuagénaires ? D’où lui est venue cette idée ? Qu’espère-t-elle apporter avec son récit ?

Née à Bruxelles, l’écrivaine, vit en Israël depuis 2005 ; elle a accepté de répondre à toutes ces questions depuis le volant de sa voiture.

Après un bref intermède dans la publicité, l’auteure, chargée du marketing dans la vente de produits divers, va, au travers de ses nombreux voyages, faire toutes sortes de rencontres de personnages issus de tous milieux.

L’auteure nous confie que la première scène du livre est autobiographique : « Cette scène surréaliste et pourtant véridique (j’en ai bu des thés !) m’accompagne depuis des années et je trouvais amusant de l’utiliser comme point de départ de l’histoire. Vendre des préservatifs aux professionnelles du sexe et se retrouver le soir à la table de Shabbat..!  À partir de là, les personnages farfelus ou tendres se sont invités dans mon histoire. »

En découvrant ce monde si loin de celui dans lequel elle a grandi et des dîners de Shabbat familiaux, Bellina Welner-Goldberg raconte que ce qui l’a le plus frappé était « cette normalité dans les relations entre collègues, et la manière dont chacune appréhendait leur travail. Pour certaines, cette ‘occupation’ est un vrai business, un ‘9 to 5’ donc, tout va bien. Pour d’autres, c’est un moyen de survie, et l’impression est plutôt lugubre. »

En contact aussi bien avec les filles que les tenancières, Bellina Welner-Goldberg dit qu’elle n’a jamais eu peur, juste « quelques palpitations en sonnant à la porte, la toute première fois ». Elle rit en se remémorant le fou rire qui l’a saisie « quand, après une semaine dans mon nouveau job, j’ai dû faire mon premier ‘déroulé’ de capote devant une trentaine de représentants assez sérieux !»

En plus d’être drôle et incisif, le récit est aussi une véritable ode à la liberté et à l’amitié.

Liberté pour ces quatre amies septuagénaires d’abord. L’auteure confesse avoir une tendresse particulière pour « toutes ces femmes âgées, très attendrissantes et pleines de ressources» et a voulu les « faire vivre comme bon leur semble ».

Bellina Welner-Goldberg explique que contrairement aux pays où l’on jouit de moins de droits, dans nos sociétés dites libres, « cette liberté existe, mais la pression sociale nous rend vieux et nous contraint à nous arrêter. Mes ‘grands-mères’ sont déterminées, belles et ont de l’énergie à revendre. »

Bellina Welner-Goldberg qui n’a jamais connu ses grands-mères dit avoir créé de toutes pièces la grand-mère formidable de son récit, basé sur ses « fantasmes de la grand-mère parfaite, de la grand-mère rigolote, de la grand-mère espiègle, et là il y a quatre grands-mères ».

Liberté de culte aussi, ou de non culte. La religion, ici, aide les uns et oppresse les autres, miroir de débats récents en Israël. « Dans mon histoire, la religion est parfois utilisée comme moyen de contrôle sur les autres. Certains personnages choisissent d’y adhérer, d’autres pas, et les histoires individuelles continuent », nous explique l’auteure.

Le livre, « s’adresse à tous. Ces femmes sont des guerrières luttant pour la tolérance et contre les préjugés de toutes sortes et on en a bien besoin en Israël, pour l’instant. »

(L’auteure belgo-israélienne Bellina Welner-Goldberg tenant son roman Spleen Ashkénaze à la foire du livre à Bruxelles, en mars 2020 (Crédit : Autorisation)

L’amitié tient une place importante dans ce récit, comme le témoigne le lien entre les quatre grands-mères ou cette amitié intergénérationnelle entre les grands-mères et Julia. Une amitié qui sera salvatrice pour chacune d’entre elles et leur donnera un nouvel élan de vie.

Pour Bellina Welner-Goldberg, l’amitié entre femmes n’est pas assez évoquée. « On parle souvent d’amitié entre hommes, on parle un petit peu moins d’amitié qui perdure entre femmes et je voulais aussi parler de cette amitié qui est plus forte que les années, la vie quotidienne, les aléas de la vie et le plaisir de se retrouver et de créer ensemble des choses ».

Le deuil est omniprésent dans le livre – sans lui, il n’y aurait pas d’histoire – mais il ne rend l’histoire ni les personnages pesants. L’auteure dit avoir voulu « l’évoquer, mais pas m’y attarder. Par pudeur, parce qu’en quelques phrases tout est dit. Ce drame est le pivot de l’histoire et les personnages doivent se reconstruire ».

Malgré les sujets difficiles abordés tout au long du livre, ce dernier reste léger, digeste et très drôle, car l’histoire est racontée avec l’humour légendaire de l’auteure. « L’humour désamorce des situations qui pourraient être dramatiques … L’humour doux-amer permet parfois de faire passer les choses plus facilement, en tous cas pour moi».

C’est un livre émouvant, empreint d’espoir et comme le dit si joliment son auteure, « on peut avoir de beaux rêves et s’imaginer avancer puis la réalité vous rattrape. Il faut néanmoins essayer de la dépasser, de la sublimer par les mots et ne jamais désespérer. »

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