Crise humanitaire au Soudan : appel de l’ONU pour 6 Mds de dollars d’aide en 2025
Les affrontements entre les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), de Mohamed Hamdane Daglo, et l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, deux anciens alliés devenus rivaux, ont fait des dizaines de milliers de morts depuis 2023

« La souffrance est épouvantable » : l’ONU a lancé lundi un appel de six milliards de dollars afin de fournir cette année une aide cruciale à la population du Soudan, ravagé depuis avril 2023 par une guerre civile, mais aussi aux millions de Soudanais ayant fui leur pays.
L’objectif est de fournir une assistance à près de 26 millions de personnes au total, ont souligné l’agence humanitaire des Nations Unies, OCHA, et l’agence chargée des réfugiés, le HCR, dans un appel commun.
« Le Soudan reste en proie à une crise humanitaire massive », a déclaré dans un communiqué le chef humanitaire de l’ONU, Tom Fletcher, lors du lancement de l’appel à Genève.
Décrivant la situation comme une urgence « aux proportions choquantes », il a souligné que plus de la moitié de la population souffrait d’insécurité alimentaire, « avec des signalements alarmants de conditions de famine qui se propagent ».
« La famine s’installe. Les violences sexuelles font rage. Les femmes et les filles continuent de subir des schémas effroyables de violences sexuelles liées au conflit. Des enfants sont tués ou blessés. La souffrance est épouvantable », a-t-il ajouté.
Les affrontements entre les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), de Mohamed Hamdane Daglo, et l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane, deux anciens alliés devenus rivaux, ont fait des dizaines de milliers de morts depuis 2023.
Alors que l’armée contrôle l’est et le nord du Soudan, les paramilitaires maintiennent leur emprise sur la quasi-totalité du Darfour, une vaste région de l’ouest où vivent un quart des 50 millions de Soudanais.
Quelque 12 millions de personnes ont été déplacées, dont 3,5 millions ont fui le Soudan depuis le début de la guerre civile, ont souligné les agences des Nations Unies.
Dans le même temps, près des deux tiers de la population a besoin d’une aide d’urgence, des régions entières étant confrontées à des conditions de famine.
« Conflit insensé »
Des conditions de famine ont déjà été signalées dans au moins cinq zones au Soudan, y compris dans les camps de déplacés au Darfour et dans les monts Nouba, dans le sud, selon l’ONU.
« Nous voyons au Soudan une crise de la faim à grande échelle… Une catastrophe », a déclaré la directrice du Programme alimentaire mondial, Cindy McCain, lors d’une visioconférence.
Compte tenu de cette situation désespérée, l’ONU a déclaré qu’elle lançait un appel de 4,2 milliards de dollars pour atteindre près de 21 millions de personnes à l’intérieur du Soudan.
Alors que l’administration Trump vient d’annoncer de larges coupes budgétaire dans l’aide étrangère des États-Unis – traditionnellement le plus grand donateur d’aide au monde – M. Fletcher a reconnu qu’il pouvait sembler étrange que l’ONU lance son plus grand appel jamais réalisé pour le Soudan « à un moment où les discussions portent naturellement sur les réductions et les gels de l’aide ».
« Mais une crise de financement difficile ne signifie pas que les crises dans des endroits comme le Soudan disparaissent » et le plan de l’ONU pour le Soudan sera « une bouée de sauvetage pour des millions de personnes », a-t-il insisté.
L’ONU a dit avoir également besoin de 1,8 milliard de dollars pour soutenir 4,8 millions de personnes – à la fois des réfugiés soudanais et leurs communautés d’accueil – en République centrafricaine, au Tchad, en Égypte, en Éthiopie, en Libye, au Soudan du Sud et en Ouganda.
Le HCR a précisé que cela représentait environ un dollar par personne ciblée et par jour.
Aujourd’hui, « un tiers de la population entière du Soudan est déplacée », a déploré le chef du HCR, Filippo Grandi, dans un communiqué, soulignant que « les conséquences de ce conflit horrible et insensé s’étendent bien au-delà des frontières du Soudan ».
L’ONU a averti que, sans financement immédiat, les deux tiers des enfants réfugiés seraient privés d’un accès à l’éducation primaire, « menaçant une génération entière ».
Et « jusqu’à 4,8 millions de réfugiés et membres des communautés hôtes continueront à faire face à une grave insécurité alimentaire, avec au moins 1,8 million de personnes privées d’aide alimentaire », a-t-elle mis en garde, estimant que « les systèmes de santé, déjà sous tension, pourraient s’effondrer ».
L’année dernière, les organisations humanitaires ont reçu 1,8 milliard de dollars pour le Soudan – soit 66 % des 2,7 milliards demandés – et ont réussi à aider plus de 15,6 millions de personnes à travers le pays.
L’appel émis l’an dernier par l’ONU pour rassembler 1,5 milliard de dollars pour la crise des réfugiés soudanais n’a été financé qu’à moins d’un tiers.
Mais il a permis de fournir une aide alimentaire vitale à plus d’un million de personnes dans les Etats voisins, ainsi qu’une assistance médicale à un demi-million de personnes et des services de protection à plus de 800.000.