Israël en guerre - Jour 370

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Opinion

Les liens diplomatiques au Moyen-Orient mis à rude épreuve par la guerre à Gaza

Alors que Benjamin Netanyahu agace ses alliés, les Etats-Unis songent à un retrait de Syrie et les relations entre l'Egypte et la Russie se tendent

Un Koweïtien tient une pancarte portant le portrait du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors d'un rassemblement de solidarité avec la population de Gaza sur la place Iradah à Koweït City, le 14 janvier 2024. (Crédit : YASSER AL-ZAYYAT / AFP)
Un Koweïtien tient une pancarte portant le portrait du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors d'un rassemblement de solidarité avec la population de Gaza sur la place Iradah à Koweït City, le 14 janvier 2024. (Crédit : YASSER AL-ZAYYAT / AFP)

La diplomatie israélienne au Moyen-Orient est en crise. L’Arabie saoudite, qui semblait encore récemment sur le point d’établir des liens officiels avec Israël, vient de dépoussiérer son initiative de paix arabe proposée il y a plus de 20 ans – un texte prévoyant une normalisation conditionnée à une solution du conflit israélo-palestinien – ; les Émirats arabes unis ont prié le Premier ministre Benjamin Netanyahu de demander au président russe Vladimir Poutine de s’occuper des travailleurs palestiniens qui ont perdu leur emploi ; et le président égyptien Abdel-Fattah el-Sissi ne répond plus au téléphone.

Netanyahu rêvait de commencer son mandat par une visite à Abou Dhabi, comme il sied à l’homme qui a signé les accords d’Abraham avec les Émirats, le Bahreïn et le Maroc. Au lieu de cela, il est désormais considéré par ces mêmes gouvernements comme une menace non seulement pour les Palestiniens, mais aussi pour la stabilité des gouvernements des nations arabes.

Les voix qui s’élèvent contre Israël ne sont pas aussi fortes dans les nations arabes qu’en Occident, les régimes ne ménageant pas leurs efforts pour étouffer les manifestations et les marches pro-Gaza et anti-Israël. Toutefois, le sentiment général dans les rues arabes est clair comme de l’eau de roche : en Jordanie, un restaurant baptisé « 7 octobre » a ouvert ses portes pour célébrer l’attaque sans précédent du Hamas contre Israël, au cours de laquelle près de 1 200 personnes ont été tuées, pour la plupart des civils, et 253 ont été prises en otage. (Il a depuis été rebaptisé).

Parmi les autres signes de soutien populaire, on peut citer des chansons sur le porte-parole du Hamas, Abu Obaida, jouées lors des mariages en Égypte, ou le fait que près de 91 % des Saoudiens considèrent la guerre à Gaza comme une victoire pour le monde arabe et les Palestiniens.

Par ailleurs, les dirigeants arabes qui continuent à soutenir une normalisation avec Israël (les vols Tel Aviv-Dubaï n’ont pas été interrompus, le pétrole israélien continue à couler vers l’Égypte et l’Arabie saoudite a déclaré publiquement qu’elle était toujours intéressée par une normalisation) craignent que les faux pas diplomatiques israéliens, conjugués aux violents combats dans le sud de la bande de Gaza, ne provoquent une nouvelle vague de protestations et de résistance dans leurs pays.

Le refus de Netanyahu de discuter des plans pour Gaza après la guerre fait passer ces dirigeants pour des faibles, ce qu’aucun régime autoritaire qui se respecte ne saurait accepter.

De gauche à droite : le ministre des Affaires étrangères du Bahreïn Abdullatif al-Zayani, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le Président américain Donald Trump et le ministre des Affaires étrangères des Émirats arabes unis Abdullah bin Zayed al-Nahyan, exhibent les documents issus de la signature des Accords d’Abraham, où le Bahreïn et les Émirats arabes unis reconnaissent Israël, à la Maison Blanche à Washington, DC, le 15 septembre 2020. (SAUL LOEB / AFP)

Les États-Unis vont-ils quitter la Syrie ?

Le magazine Foreign Policy a révélé la semaine dernière que l’administration du président américain Joe Biden considérait le retrait des troupes américaines de Syrie. Le magazine a cité quatre sources à Washington confirmant que des discussions avaient été engagées sur cette question stratégique, sans pour autant aboutir à une décision définitive.

De l’avis de l’auteur de l’article, Charles Lister, Senior fellow et directeur des programmes Syrie et Lutte contre le terrorisme et l’extrémisme au Middle East Institute (MEI), une telle décision pourrait contrecarrer tous les succès obtenus dans la guerre contre l’État islamique (EI), car les troupes américaines en Syrie sont le dernier frein de facto à l’organisation terroriste meurtrière.

Ce retrait pourrait poser un autre problème. Si les Etats-Unis retirent leurs forces de la Syrie, où ils ne voulaient pas entrer et d’où ils ont déjà tenté de se retirer par le passé, cela laisserait le champ libre à l’Iran et à la Russie pour contrôler la région et ceux qui subiraient les plus lourdes pertes seraient les alliés des Etats-Unis, les Kurdes.

Les bases américaines en Syrie et en Irak faisaient déjà l’objet, plusieurs mois avant le 7 octobre, d’attaques massives de la part des forces pro-iraniennes. Mais depuis, ces bases sont attaquées par des missiles et des drones tous les deux ou trois jours, et les Américains ont essuyé des pertes, dont la mort de trois soldats américains au cours du week-end.

Des soldats américains patrouillent près d’une prison qui a été attaquée par les terroristes de l’État islamique à Hassakeh, en Syrie, mardi 8 février 2022. (Crédit : Baderkhan Ahmad/AP)

Il semble évident qu’il n’est pas dans l’intérêt des États-Unis, en cette année électorale, d’étendre leur présence militaire dans une région où ils n’ont rien à faire. Le problème est que si les États-Unis retirent leurs troupes de Syrie, c’est tout le château de cartes du Moyen-Orient qui sera sérieusement endommagé, s’il ne s’effondre pas complètement. Les alliés des États-Unis seront affaiblis, leur propre image sera ternie et les seuls qui se réjouiront seront les forces qu’ils tentent d’endiguer.

Les Kurdes, qui ont déjà subi un coup dur avec le retrait d’une partie des forces américaines de Syrie, ne peuvent s’attendre à rien d’autre qu’à des massacres et des expulsions. Le retrait des États-Unis du Moyen-Orient signifiera pour les ennemis de l’Amérique que leur patience a été récompensée.

L’Égypte se rapproche de la Russie

Début janvier, l’Égypte a officiellement rejoint le groupe Brésil, Russie, Inde, Chine (BRICS), devenant ainsi un allié économique de ces quatre pays ainsi que d’autres membres du groupe.

La semaine dernière, Poutine a assisté, par vidéoconférence, à la cérémonie de pose de la première pierre de la quatrième et dernière centrale nucléaire à El-Dabaa, en Égypte, un projet de la société d’État russe de l’énergie atomique Rosatom.

Depuis quelques mois, l’Égypte est devenue le plus grand importateur de blé russe après la conclusion d’un accord sur le plafonnement des prix entre les deux pays. Lors d’un appel vidéo entre Poutine et Sissi, le président russe a mentionné la construction du barrage d’Assouan et l’importante contribution de l’ex-Union soviétique (URSS) au développement énergétique de l’Égypte, ce à quoi le président égyptien a répondu en appelant Poutine « son frère ».

Le président russe Vladimir Poutine, à droite, et le président égyptien Abdel Fattah El-Sissi se rencontrent au palais Constantin en marge du sommet Russie-Afrique à Saint-Pétersbourg, Russie, le 26 juillet 2023. (Crédit : Vladimir Smirnov/TASS Host Photo Agency Pool Photo/AP)

A priori, les deux pays, qui se sont rapprochés depuis l’arrivée au pouvoir de Sissi en 2013, affichent leur volonté de coopérer pleinement. Cependant, il semble que, du côté égyptien, les liens étroits avec la Russie ne se dresseront pas pour autant entre l’Égypte et les États-Unis.

Il y a environ deux ans, l’Égypte avait refusé les avions de chasse russes SU-13. Il a ensuite reçu une promesse des États-Unis de lui fournir des F-15. Les relations entre l’Égypte et les États-Unis, qui s’étaient refroidies depuis le début du mandat présidentiel de Biden, se sont réchauffées depuis la guerre à Gaza, et les deux nations travaillent en étroite collaboration pour tenter de trouver une solution afin de stabiliser la région.

Malgré les pressions de la Chambre des représentants, l’administration Biden a approuvé la fourniture d’une aide militaire à l’Égypte. Ayant subi l’une des pires crises économiques depuis les années 70, l’Égypte a besoin de l’aide des États-Unis.

L’Égypte partage donc ses œufs entre plusieurs paniers.

Tant qu’il n’y aura pas de conflit d’intérêt significatif dans les relations de l’Egypte avec la Russie et les Etats-Unis, l’Egypte n’aura pas de problème. Elle pourra repousser à plus tard ses préoccupations sur l’attitude à adopter en cas de conflit.

L’auteure de l’article, ancienne membre de la Knesset, est senior non-resident fellow à l’Atlantic Council et directrice exécutive de ROPES.

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