Cisjordanie : Avec son opération la plus longue en 20 ans, l’armée prépare le terrain à des raids plus réduits à l’avenir
L'armée se focalise dorénavant sur Jénine où les soldats ont défoncé des routes à la recherche d'explosifs, œuvrant à prendre "le contrôle opérationnel" ; 14 terroristes auraient été tués et 25 suspects auraient été arrêtés, a annoncé Tsahal
CAMP DE RÉFUGIÉS DE JÉNINE, Cisjordanie – Les troupes mènent des opérations à Jénine – une ville qui est considérée par Israël comme un bastion majeur du terrorisme – depuis mercredi dernier en tout début de matinée, ce qui fait du raid qui a été lancé par l’armée israélienne l’un des plus longs à avoir été effectués sur le territoire de la Cisjordanie depuis plus de deux décennies.
L’opération – désignée par Tsahal, en interne, sous le nom de « Camps d’été » – a commencé par des incursions simultanées à Jénine, à Tulkarem et dans le camp de Fara, qui est situé aux abord de Tubas. Objectif : démanteler les réseaux terroristes du Hamas et du Jihad islamique palestinien, soutenus par l’Iran, dans ces trois secteurs du nord de la Cisjordanie.
Mais l’envergure de l’opération en cours, ainsi que ses objectifs tels qu’ils ont été présentés, sont très éloignés de ceux de l’Opération Bouclier défensif, le nom donné à l’incursion qui avait eu lieu en Cisjordanie pendant la Seconde intifada et qui avait duré un mois.
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Jusqu’à présent, a annoncé l’armée israélienne, plus de 30 hommes armés ont été tués dans le cadre de cette opération, avec parmi eux le chef du Hamas à Jénine et celui du Jihad islamique dans les environs de Tulkarem.
Du côté israélien, un soldat a perdu la vie à Jénine et plusieurs militaires ont été blessés.
Les activités lancées par les troupes sont dorénavant terminées à Tulkarem et à Fara. Elles continuent à Jénine où, aux premières heures de la matinée de lundi, une frappe au drone a pris pour cible un groupe de Palestiniens qui jetaient des explosifs sur les soldats.
A Jénine seulement, 14 terroristes ont été tués dans des affrontements ou lors de frappes au drone. 25 Palestiniens qui étaient recherchés par l’État juif ont été placés en détention ; une vingtaine d’armes ont été saisies et plus d’une trentaine d’explosifs ont été neutralisés, a fait savoir l’armée dans la soirée de lundi.
Quelques heures seulement après l’attaque au drone de lundi matin, les journalistes ont pu se rendre, sous escorte militaire, à Jénine et dans le camp de réfugiés de la ville où les troupes affrontent depuis mercredi dernier des hommes armés, où elles ont découvert des laboratoires de fabrication d’armes et ont défoncé les routes pour détecter la présence d’éventuels explosifs.
De hauts-responsables de Tsahal ont indiqué que les opérations en cours à Jénine avaient pour objectif principal de prendre « le contrôle opérationnel » nécessaire pour pouvoir plus librement mener des activités dans le secteur, à l’avenir, et déjouer d’éventuels attentats terroristes. Ce qui était également l’objectif qui avait été établi lors de la dernière opération majeure qui avait eu lieu dans la ville, il y a plus d’un an.
En portant atteinte aux réseaux du Hamas et du Jihad islamique palestinien dans la zone, expliquent les responsables militaires, l’armée pourra plus facilement aller arrêter des Palestiniens recherchés à Jénine et pourra plus facilement déjouer les attentats terroristes majeurs préparés depuis la ville, en ayant recours à un nombre moindre de soldats et en faisant face à une résistance moins forte de la part des hommes armés locaux.
Tsahal œuvre à éliminer les chefs et les membres de ces réseaux terroristes, détruisant également les laboratoires où ils fabriquent des bombes – tout en gardant pleinement conscience du fait que les commandants et les hommes armés seront remplacés dans la foulée et que de nouveaux sites où des bombes seront produites verront eux aussi le jour, même si cela demandera un peu de temps.
Les responsables de Tsahal déclarent néanmoins qu’il faut trouver un équilibre entre l’intensité des opérations et les répercussions de ces dernières, Israël ne pouvant pas se payer le luxe de transformer la Cisjordanie en front principal dans le contexte de la guerre en cours contre le Hamas, à Gaza, et des tensions accrues qui agitent la frontière nord.
Israël n’a pas non plus la légitimité internationale nécessaire pour lancer une opération en Cisjordanie qui serait d’une plus grande envergure encore – avec, par exemple, une présence de soldats à Jénine qui se maintiendraient pendant une longue période, expliquent les responsables de l’armée.
Les militaires estiment qu’ils peuvent continuer au rythme actuel leurs activités à Jénine et dans d’autres parties de la Cisjordanie, avec des raids d’arrestations nocturnes quasi-quotidiens et des opérations régulières de grande ampleur dont l’objectif est de déjouer les tentatives du Hamas et du Jihad islamique qui cherchent à élargir leur réseau – éloignant en conséquence le spectre d’attaques terroristes de grande envergure qui prendraient pour cible des Israéliens.
Établir le contrôle
Dans le camp de réfugiés de Jénine, lundi, les rues qui sont habituellement très animées sont presque entièrement vides – et fortement endommagées.
Certains civils – et notamment les employés municipaux qui s’efforcent de réparer les infrastructures et des journalistes locaux – s’aventurent dans les rues, malgré les opérations menées par l’armée israélienne.
Selon les estimations faites par Tsahal, environ 85 % de la population a quitté le camp pendant le raid, rejoignant la ville de Jénine elle-même. Les militaires ont autorisé les Palestiniens à quitter la zone en toute sécurité même si aucun ordre d’évacuation n’a été émis.
De nombreuses routes du camp – pas toutes – ont été retournées par les bulldozers blindés de Tsahal et les soldats des unités de génie de combat se sont mis en quête des explosifs placés sous les rues et sur le bord des routes par les terroristes locaux. Ils en ont neutralisé des dizaines au cours de leurs opérations.
Le major Ron — son nom de famille ne sera pas publié pour des raisons de sécurité – qui est ingénieur en chef au sein de la Brigade régionale Menashe, a confié aux journalistes que « la menace représentée par les explosifs s’est considérablement accrue, depuis un an, dans le secteur du nord de la Cisjordanie et en particulier à Jénine ».
« C’est une menace qui ne cesse de se renforcer, l’ennemi comprend très bien qu’une bombe est une arme létale », a-t-il ajouté, faisant référence à trois attaques meurtrières qui se sont produites dans le nord de la Cisjordanie, ces derniers mois, avec des explosifs qui avaient été placés en bord de route.
« L’ennemi tente de s’en prendre à nos forces sur les routes et notre réponse à ces tentatives est d’utiliser les véhicules du génie, les bulldozers, les pelleteuses, ce qui nous permet de dégager les routes de façon à ce que les soldats soient en mesure d’atteindre leurs objectifs », a-t-il noté.
Le superintendant en chef Zacky Tafesh, officier au sein de la police des frontières qui prend actuellement part au raid en cours, dit qu’il n’avait jamais vu auparavant un si grand nombre d’explosifs lors d’une opération en Cisjordanie.
« Il y a de nombreuses bombes ici. Cela fait très longtemps que nous n’en avions pas vu autant. Nous en rencontrons constamment sur notre chemin. Mais grâce à notre expérience, nous savons très bien comment prendre ce problème en charge », a-t-il expliqué.
Détruire les routes n’est-il pas contre-productif, rendant plus difficile pour les soldats de trouver les explosifs qui ont pu être à nouveau enfouis dans le sol ? À cette question, Ron, l’officier de l’unité de génie, déclare que « c’est un dilemme » mais que l’objectif poursuivi est « de garantir qu’aucune atteinte ne sera portée aux troupes ».
« Nous ne faisons rien sans y réfléchir en amont. Nous ne frappons pas tous les secteurs en laissant une destruction totale derrière nous. Les opérations du génie militaire ne se font pas indépendamment de tout le reste. Elles sont accompagnées de renseignements », affirme Ron.
Les militaires qui répondent à nos questions font remarquer qu’aucune arme « susceptible de changer la donne » n’a été trouvée à Jénine jusqu’à présent – comme ce serait le cas de RPG ou d’explosifs « de plus haute qualité » – mais ils disent être conscients que de telles découvertes sont encore possibles.
L’officier du génie déclare que « notre objectif, en fin de compte, c’est d’établir un contrôle opérationnel dans cette zone et de ne pas permettre aux groupes terroristes de se développer, de devenir plus forts. Nous sommes ici pour prendre le contrôle opérationnel du secteur et pour abattre le plus grand nombre d’hommes armés qui sera possible de manière à ce que Tsahal puisse ensuite mener les raids appropriés, en profitant d’une plus grande liberté d’action ».
Tafesh partage le même point de vue, disant aux journalistes que le but de l’opération est d’offrir « une plus grande latitude d’action au niveau opérationnel » aux troupes israéliennes dans le cadre de missions futures.
« Elle vise à empêcher les terroristes de venir ici et de lancer des attaques sur le front intérieur. Ce que nous devons faire dans le cadre de la mission, c’est contenir tout ce qu’il y a ici. Arrêter des individus recherchés, présenter les attaquants devant la justice ou les tuer, déjouer les attentats terroristes en Judée-Samarie et dans le pays », a-t-il expliqué.
« Cette opération est d’une grande importance. Tant que le terrorisme ne se propage pas et que nous parvenons à le déjouer ici, c’est une réussite à nos yeux. Tant qu’il n’y a pas d’attaque prenant pour cible des civils et des soldats, c’est une réussite à nos yeux. Ce qu’on exige de nous, c’est de déjouer les attentats avant qu’ils ne soient commis », a ajouté Tafesh.
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