France : Yaël Braun-Pivet cherche une place au centre
"Elle est dans son couloir" et "elle y va", lui reconnaît un député Renaissance. "C'est une femme très courageuse", alors qu'il "y a beaucoup de friture" avec l'exécutif

Entre ses appels à se pencher sur les superprofits des grandes entreprises et sa « diplomatie parlementaire », la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet joue sa carte au milieu des ambitieux de la majorité, malgré un déficit de notoriété.
Taxer les superprofits des grandes entreprises ? « Il ne doit pas y avoir de tabou, aucun (…) Il faut regarder toutes les options » face au dérapage des déficits, a-t-elle répété lundi, à rebours du ministre de l’Économie Bruno Le Maire.
Arrivée au perchoir contre l’avis d’Emmanuel Macron en 2022, Yaël Braun-Pivet fait de nouveau entendre sa voix ces derniers jours.
Durant le week-end, elle s’est attirée les bonnes grâces des alliés du MoDem à Blois avec ses positions sur la fiscalité et son appel à introduire une dose de proportionnelle aux législatives, revendication historique des centristes.
« Elle est dans son couloir » et « elle y va », lui reconnaît un député Renaissance. « C’est une femme très courageuse », alors qu’il « y a beaucoup de friture » avec l’exécutif, assure cet élu.
« Braun-Pivet, elle aime bien faire du foin là où il n’y en a pas », grince de son côté une ministre.
Avec quelle ambition ? Dans la majorité, certains la voient tenter de se mêler à la course pour 2027, entre Edouard Philippe, Bruno Le Maire, Gérald Darmanin ou Gabriel Attal. En occupant un espace plus central, vu l’embouteillage sur le flanc droit de la majorité.
« Ça me va bien qu’elle s’active. Elle a légitimement le droit d’avoir de l’ambition », souligne la députée Stella Dupont, à l’aile gauche. « La sensibilité social-démocrate a besoin d’être portée. » « C’est une femme qui a réussi à s’imposer à la commission des Lois (en 2017) puis au perchoir, malgré la pression, ce que beaucoup n’ont pas réussi à faire », loue l’élue.
Autre carte revendiquée par la présidente de l’Assemblée, la « démocratie parlementaire ». « L’avenir sera fait de figures féminines », a-t-elle lancé le 7 mars, en réunissant à Paris des collègues présidentes de Parlement de 24 pays.
« Que du mépris » pour les attaques de Mélenchon
Cette semaine, elle se rend de nouveau à Kiev pour intervenir devant la Rada, le parlement ukrainien.
L’Assemblée, « c’est un des seuls endroits où on peut avoir ce pouvoir diplomatique, dans un domaine plutôt réservé au président de la République », relève le sociologue Etienne Ollion. « C’est un bon élément pour se présidentialiser. »
La titulaire du perchoir a été fortement critiquée par la France insoumise (LFI) pour son « soutien inconditionnel » à Israël trois jours après l’attaque sans précédent menée par les terroristes palestiniens du Hamas.
« Rien ne doit empêcher Israël de se défendre », avait-elle déclaré à Tel Aviv le 22 octobre, lors d’une visite aux côtés du député apparenté LR Meyer Habib, un proche du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Yaël Braun-Pivet, qui n’a « que du mépris » pour les attaques de Jean-Luc Mélenchon (LFI), avait balayé les critiques et organisé, avec son homologue du Sénat Gérard Larcher, une grande marche contre l’antisémitisme à Paris le 12 novembre. Elle porte régulièrement plainte pour les nombreuses menaces de mort antisémites dont elle fait l’objet.
À l’Assemblée, celle qui dit souvent « défendre l’institution » a vu ses relations s’abîmer avec les groupes de gauche durant la réforme des retraites. L’opposition lui reproche d’avoir barré la route à l’arrivée dans l’hémicycle à une proposition de loi pour abroger le report à 64 ans de l’âge de départ.
Autre embûche, son déficit de notoriété, si on en croit les baromètres de popularité, qui la placent en queue de peloton des 50 personnalités politiques identifiées par les Français. « Elle ne fait pas d’étincelles dans nos baromètres, mais bon, c’est bien d’y croire », glisse un sondeur, anonymement.