Kais Saied : Les Tunisiens ont sauvé des Juifs, alors qu’Israël tue des Palestiniens
Des groupes juifs et des Juifs tunisiens ont condamné les remarques faites par le président tunisien pour répondre aux critiques concernant l'assassinat de 2 Juifs à Djerba le 9 mai
![Le président tunisien Kais Saied votant lors des élections législatives, à Tunis, le 17 décembre 2022. (Crédit : AP/Slim Abid) Le président tunisien Kais Saied votant lors des élections législatives, à Tunis, le 17 décembre 2022. (Crédit : AP/Slim Abid)](https://static-cdn.toi-media.com/fr/uploads/2023/05/AP22351510711649-e1671304580754-640x400.jpeg)
Le président tunisien Kais Saied a répondu aux allégations d’antisémitisme dans son pays en se plaignant qu’alors que les Tunisiens, notamment son grand-père, ont sauvé des Juifs pendant la Shoah, Israël tue des Palestiniens impunément.
Saied a fait ces commentaires en début de semaine lors d’une visite à l’Ariana, une ville proche de la capitale Tunis, moins d’une semaine après l’assassinat, lors d’une attaque terroriste, de deux juifs et de deux agents de sécurité par un gendarme, qui a été tué dans la fusillade qui a suivi.
Les critiques, y compris de nombreux groupes juifs, ont déclaré que l’attentat montrait que l’antisémitisme avait infiltré certains membres de l’armée et que la gestion de l’affaire par le gouvernement était défectueuse.
« Il y avait des tentes des forces nazies ici. Les Juifs se sont cachés dans l’appartement de mon père et les habitants les ont protégés des nazis. Et ils disent que nous sommes antisémites ? Nos frères palestiniens sont tués tous les jours, des personnes âgées, des jeunes, des femmes. Des maisons sont démolies, mais, à ce sujet, personne ne dit rien. »
« Certains déforment l’histoire, déforment les faits, conspirent contre l’État, souhaitent déstabiliser notre foyer national et nous accusent ensuite d’antisémitisme. À quelle époque se croient-ils ? », a déclaré Saied, plus tard au cours de la visite.
Le rabbin Pinchas Goldschmidt, président de la Conférence des rabbins européens, a appelé dans une déclaration les gouvernements européens à « condamner les déclarations incendiaires du président tunisien Kais Saied ». « Avec de telles remarques gratuites, le président continue d’inciter à la haine et même à des attaques contre la communauté juive du pays, que le ciel nous en préserve », a ajouté Goldschmidt.
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Goldschmidt a noté que « depuis l’attaque, le Grand Rabbin de Tunisie Haïm Bitan n’a été ni visité ni contacté par aucun membre du gouvernement. Le président tunisien et les autorités compétentes devraient plutôt offrir leur soutien à la communauté juive et œuvrer pour assurer sa sécurité. »
Mardi, Saied a invité Bitan à le rencontrer le lendemain au palais présidentiel, a déclaré le rabbin à la chaîne publique israélienne Kan.
Les remarques de Saied ont suscité la colère des Juifs d’origine tunisienne, dont certains ont publié des déclarations incendiaires en ligne, qualifiant le président de « honte ».
Un Juif né en Tunisie, Ilan Cohen, a contesté les affirmations du président concernant la réaction apparemment bienveillante des Tunisiens pendant la Shoah. Quoi qu’il en soit, a ajouté Cohen, étudiant en médecine vivant au Portugal, « le président a abusé de la mémoire de la Shoah pour faire une déclaration politique sur des questions qui n’ont rien à voir, et c’est tout simplement inapproprié et inacceptable ».
Selon le Middle East Monitor, Saied avait déjà déclaré que la maison de son grand-père était ouverte aux Juifs, y compris à la militante féministe Gisèle Halimi, après l’arrivée des forces nazies en Tunisie en 1942.
Les forces de l’axe pro-nazi et les forces alliées se sont battues en Tunisie jusqu’en 1943. Plusieurs dizaines de Juifs tunisiens, rassemblés par les forces pro-nazies, ont été tués pendant la Shoah. Au moins un Tunisien non juif, Khaled Abdul-Wahab, est largement reconnu pour avoir risqué sa vie pour sauver des Juifs.
La Tunisie comptait autrefois plus de 100 000 Juifs, mais la plupart d’entre eux ont quitté le pays dans les dizaines d’années qui ont suivi la guerre, en raison de l’hostilité croissante du gouvernement et des émeutes de la population locale.
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Une communauté juive d’environ 1 000 membres subsiste sur l’île de Djerba, où des milliers de Juifs séfarades se rassemblent chaque année pour un pèlerinage à l’occasion de Lag BaOmer, centré autour de la synagogue El Ghriba de l’île.