La loi sur les ONG est le dernier coup d’une salve du gouvernement israélien contre les critiques
L’effort ciblant les organisations financées par des gouvernements étrangers est l’une des mesures ciblant les critiques

JTA – Ses soutiens parlent d’une victoire de la transparence. Ses opposants disent que cela sent la dictature.
Dans tous les cas, une nouvelle loi demandant à certaines ONG israéliennes de déclarer publiquement leurs financements de gouvernement étranger avance après son approbation par un comité ministériel dimanche. La ministre de la Justice, Ayelet Shaked, qui a proposé la loi, a déclaré qu’elle révélait les étrangers se mêlant des affaires israéliennes.
« La loi de transparence, qui a passé aujourd’hui [le mois dernier] le comité ministériel de législation, n’étiquète pas les gens ni les organisations », a écrit dimanche sur Facebook Shaked, qui est membre du parti HaBayit HaYehudi. « Elle étiquète les intérêts étrangers de différents états, qui cherchent à mettre en place des ONG ici, et à qui ils donnent des centaines de millions de shekels.
Le projet de loi de Shaked est le dernier d’une série de mesures entreprises par les gouvernements de droite d’Israël pour cibler les ONG de gauche.
Le vote de dimanche a eu lieu deux semaines après que des ministres du gouvernement décident de restreindre les activités de Breaking the silence, une organisation de vétérans qui attirent l’attention sur les exactions présumées de l’armée israélienne en Cisjordanie.
En 2011, la Knesset a promulgué une loi demandant aux ONG de déclarer tout financement de gouvernement étranger sur une base trimestrielle.
Un projet de loi de 2013 cherchait à lever des impôts élevés sur les donations de gouvernement étranger, mais a été abandonné quand le procureur général israélien a informé que c’était anticonstitutionnel.
Ces dernières années ont aussi vu des efforts législatifs pour prohiber le boycott des produits des implantations et autoriser les soldats à poursuivre individuellement les organisations qui diffament l’armée.
« Cela fait partie de la tentative de nuire aux organisations qui critiquent le régime », a déclaré Amir Fuchs, un chercheur du think tank de l’institut pour la démocratie en Israël. « Ils essaient de mettre les ONG de côté et disent qu’elles ne sont pas légitimes. »
Le projet de loi de Shaked demanderait aux ONG qui reçoivent une majorité de leur financement d’ « entités politiques étrangères » de déclarer ce financement et de le détailler dans chaque rapport ou à chaque fois qu’elles s’expriment devant des fonctionnaires. Une version précédente du projet de loi demandait aux représentants des ONG de porter des badges les identifiant comme des lobbyistes de gouvernements étrangers.
Les ONG touchées par le projet de loi ont décrié ces mesures comme des tentatives de réduire au silence les opposants en Israël à la politique du gouvernement. Ils déclarent qu’en distinguant les financements de gouvernement étranger, qui vont majoritairement à des organisations de gauche, le projet de loi ignore les financements étrangers des organisations de droite par des donateurs privés.
« Cela crée une image négative et n’a pas sa place dans un état démocratique », a déclaré Yariv Oppenheimer, directeur exécutif de La paix maintenant, qui tomberait sous le coup de la loi, ayant reçu des donations dans le passé des gouvernements britanniques, belges et espagnols. « Il n’y a pas de raison pour que je porte une étiquette disant que je reçois des financements étrangers alors que les ONG de droite se tiendraient à côté de moi, comme s’ils recevaient tous leurs financements du pays. »

Les politiciens de droite ont travaillé à réprimer les ONG de gauche depuis 2009, quand un rapport de l’ONU a accusé Israël de crimes de guerre en citant des recherches de groupes de gauche.
Le projet de loi de Shaked, qui étendrait les exigences de transparence de la loi de 2011, survient au milieu d’une campagne de l’organisation de droite Im Tirtzu, qui a placé des publicités dans les grandes villes accusant des militants importants de gauche d’être des « taupes » étrangères en Israël et de soutenir le terrorisme.
Le fondateur d’Im Tirtzu, Ronen Shoval, a écrit un éditorial sur le site internet d’informations Walla disant que le projet de loi fournit la transparence nécessaire sur les entités étrangères cherchant à se mêler des affaires israéliennes.
« Imaginez ce qu’il arriverait si l’Etat d’Israël choisissait de donner de l’argent à des organisations en Espagne travaillant pour l’indépendance catalane, ou, Dieu me pardonne, basque, a écrit Shoval. Pendant des années, les états européens ont sapé la démocratie israélienne. »

NGO Monitor, une organisation israélienne qui examine le travail des organisations des droits de l’Homme, affirme que les gouvernements européens fournissent environ 100 millions de dollars en financement direct ou indirect des ONG agissant en Israël, en Cisjordanie et à Gaza – des financements qui constituent un effort illégitime pour influencer la politique israélienne.
« Quand des états souverains ont un désaccord, ils ont un désaccord via la diplomatie et d’autre mesures », a dit le président d’NGO Monitor, Gerald Steinberg, qui a déclaré que son organisation ne s’opposait ni ne soutenait le projet de loi, bien qu’elle attire depuis longtemps l’attention sur ce qu’elle appelle le « problème » des financements étrangers des ONG.
« Ils ne le font pas via la manipulation de la société civile. Quand des états fournissent de l’argent pour influencer la politique d’un autre pays, c’est une violation unique de la souveraineté. »
Les critiques affirment que le projet de loi de Shaked est un stratagème pour supprimer les dissidents en visant largement les organisations de gauche. Le New Israel Fund, qui finance plusieurs organisations qui seraient touchées par la loi, a déclaré dimanche dans un communiqué que la loi « est une copie très précise des politiques de la Russie de Poutine et d’autres régimes autoritaires réprimant la société civile. »
Les politiciens du centre et de gauche ont également critiqué le projet de loi comme un outil pour attirer la honte sur les organisations de gauche. La notion que la loi encourage la transparence est fausse, selon eux, puisque la loi de 2011 demande déjà une transparence financière.
Les critiques ont aussi dit que la loi était inconsistante en ne demandant une déclaration publique que des financements gouvernementaux, mais pas des donations privées. La Paix maintenant a publié plus tôt ce mois-ci une étude rapportant que des centaines de millions de shekels de donations privées finançant neuf organisations de droite ne pouvaient pas être retracés jusqu’à une organisation ou un individu spécifique.
« Ce n’est pas une loi qui vise la transparence, mais plutôt une loi qui vise à étiqueter les Israéliens, a écrit dimanche sur Facebook la députée de l’opposition Tzipi Livni. L’objectif de cette loi est d’étiqueter les organisations qui s’opposent à la politique du gouvernement. »