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Morts près des sites d’aide : Tsahal enquête mais nie que les soldats ont reçu l’ordre de tirer sur des civils

Selon Haaretz, l'armée enquête sur d'éventuels crimes de guerre, citant des témoignages de soldats qui décrivent un "champ de la mort" où ils recourent régulièrement aux armes à feu pour contrôler la foule

Des Palestiniens evacuant un homme qui aurait été blessé par des tirs israéliens alors qu'il attendait près d'un centre d'aide alimentaire à l'hôpital Nasser de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 juin 2025. (Crédit : AFP)
Des Palestiniens evacuant un homme qui aurait été blessé par des tirs israéliens alors qu'il attendait près d'un centre d'aide alimentaire à l'hôpital Nasser de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 juin 2025. (Crédit : AFP)

L’armée israélienne a reconnu vendredi enquêter sur des allégations selon lesquelles ses soldats auraient ouvert le feu sur des Gazaouis affamés qui cherchaient à obtenir de l’aide, mais elle a vigoureusement nié que les soldats aient reçu l’ordre de leurs commandants d’ouvrir délibérément le feu sur les civils palestiniens.

Cette déclaration a été diffusée après la publication par le quotidien Haaretz d’un article qui avait annoncé que Tsahal avait ouvert une enquête, cette semaine, sur d’éventuels crimes de guerre commis par ses troupes. Des soldats témoignant sous couvert d’anonymat avaient confié dans cet article que la zone était un « devenue un champ de la mort » et qu’ils avaient reçu l’ordre d’utiliser des armes à feu pour contrôler la foule, considérant que tous les Gazaouis venant chercher de l’aide étaient des assaillants a-priori.

L’article de Haaretz a suscité une première réponse détaillée de l’armée concernant les fusillades meurtrières quasi quotidiennes autour des sites de distribution d’aide humanitaire. Il a également donné lieu à une déclaration conjointe rare du Premier ministre Benjamin Netanyahu et du ministre de la Défense Israel Katz, dans laquelle ils accusent le journal de gauche « d’accusations de crimes rituels » contre Tsahal.

L’accusation de meurtre rituel est un vieux trope antisémite selon lequel les Juifs utilisent le sang d’enfants chrétiens dans des rituels.

Selon Haaretz, ces incidents ayant fait de nombreuses victimes ont été discutés lors d’une réunion tenue en début de semaine, au cours de laquelle le bureau de l’avocate militaire générale a chargé le mécanisme d’évaluation des faits de l’état-major général d’enquêter sur les crimes de guerre présumés qui ont été commis en grande partie à proximité des sites de distribution de la Gaza Humanitarian Foundation (GHF).

Ce mécanisme est un organe militaire indépendant chargé d’enquêter sur les incidents inhabituels survenus pendant la guerre.

Au cours de cette réunion, des responsables du bureau de l’avocate militaire générale ont fait part de leur inquiétude face à la vague mondiale d’indignation suscitée par la mort de civils qui se rendaient sur des sites d’aide humanitaire, d’après Haaretz. Des officiers supérieurs du Commandement du Sud de Tsahal ont répliqué en affirmant que ces incidents étaient isolés et que les soldats n’avaient tiré que sur des Palestiniens représentant une menace.

Les représentants du bureau de l’avocate militaire générale ont exprimé leur désaccord, affirmant que le récit du Commandement du Sud ne correspondait pas à la réalité sur le terrain, selon une source ayant assisté à la réunion.

« L’affirmation selon laquelle il s’agit de cas isolés ne correspond pas aux incidents au cours desquels des grenades ont été larguées depuis les airs et des tirs de mortier et d’artillerie ont été dirigés contre des civils », a déclaré un représentant de l’avocate militaire générale.

« Il ne s’agit pas de quelques personnes tuées, mais de dizaines de victimes chaque jour », a ajouté le représentant.

Le ministère de la Santé contrôlé par le groupe terroriste palestinien du Hamas affirme que 549 personnes ont été tuées et 4 000 blessées alors qu’elles tentaient de récupérer de l’aide dans les sites de la GHF ou qu’elles attendaient les camions de nourriture de l’ONU depuis le 27 mai, date à laquelle le GHF a été lancé.

Les chiffres publiés par le groupe terroriste sont invérifiables, et ne font pas de distinction entre civils et terroristes. Toutefois, entre le 27 mai et le 24 juin, au moins 19 incidents impliquant des tirs de Tsahal liés à la distribution d’aide humanitaire ont été répertoriés à Gaza, réalisée par le Times of Israel.

Dans la plupart de ces cas, Tsahal a admis avoir ouvert le feu et touché des Palestiniens, mais a qualifié ces tirs de « tirs d’avertissement » visant ceux qui s’étaient trop approchés des soldats ou qui empruntaient les voies d’accès aux sites alors que ceux-ci étaient fermés.

L’accès à l’aide est difficile à cause de la confusion régnant sur ce sujet, l’armée ayant imposé un couvre-feu de 18 heures à 6 heures du matin sur les routes menant aux sites de la GHF pendant un certain temps. Mais les habitants doivent souvent partir bien avant l’aube s’ils veulent avoir une chance de récupérer de la nourriture.

Des Palestiniens repartant avec des colis distribués par la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), une organisation humanitaire privée, sur la route de Salaheddin, dans le camp de réfugiés de Nuseirat, dans le centre de la bande de Gaza, le 24 juin 2025. (Crédit : Eyad Baba/AFP)

Selon cet article, les soldats ont reçu l’ordre de tirer sur toute personne s’approchant des sites de distribution avant leur ouverture ou restant sur place après leur fermeture. Il ajoute que de nombreux incidents se sont produits pendant la nuit, ce qui signifie que les Palestiniens qui ont été pris pour cible ne savaient probablement pas qu’ils se trouvaient dans une zone interdite.

Un champ de bataille

Des soldats israéliens servant près des sites de distribution d’aide humanitaire ont décrit des scénarii sinistres lors d’interviews accordées à Haaretz sous couvert d’anonymat.

« C’est un champ de bataille », a déclaré l’un d’eux.

« Là où j’étais posté, entre une et cinq personnes étaient tuées chaque jour. Ils sont traités comme une force hostile : aucune mesure de contrôle des foules, pas de gaz lacrymogène, juste des tirs à balles réelles avec tout ce qui est imaginable : mitrailleuses lourdes, lance-grenades, mortiers. Puis, une fois que le centre ouvre, les tirs cessent et ils savent qu’ils peuvent s’approcher. Notre forme de communication, ce sont les coups de feu. »

« Nous ouvrons le feu tôt le matin si quelqu’un tente de s’approcher à quelques centaines de mètres, et parfois nous chargeons simplement à bout portant. Mais il n’y a aucun danger pour les forces », a poursuivi le soldat.

« Je n’ai connaissance d’aucun cas de riposte. Il n’y a ni ennemi, ni arme. »

Il a décrit ces incidents comme une version mortelle du jeu « Un, deux, trois, soleil ».

Des Palestiniens qui auraient été blessés par des tirs israéliens alors qu’ils se rassemblaient près d’un centre d’aide alimentaire, à l’hôpital Nasser de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 juin 2025. (Crédit : AFP)

« Tirer des mortiers pour éloigner des gens affamés n’est ni professionnel ni humain. Je sais qu’il y a des membres du Hamas parmi eux, mais il y a aussi des gens qui veulent simplement recevoir de l’aide », a déclaré un autre soldat au journal Haaretz.

« C’est devenu un endroit avec ses propres règles. La perte de vies humaines n’a aucune valeur. Ce n’est même pas un ‘incident malheureux’, comme [Tsahal] avait l’habitude de dire. »

« C’est devenu une routine. Vous savez que ce n’est pas normal. Vous n’êtes pas à l’aise avec cela, avec le fait que les commandants prennent la loi entre leurs mains. Mais Gaza est un univers parallèle, [nous] passons très vite à autre chose. La vérité, c’est que la plupart ne s’arrêtent même pas pour y réfléchir », a déclaré un autre soldat à Haaretz.

Accusation de crime rituel 

Suite à la publication de l’article de Haaretz, l’armée a confirmé dans un communiqué que le mécanisme d’évaluation des faits mis en place par l’état-major général enquêtait sur cette affaire.

Cependant, Tsahal a déclaré rejeter fermement l’article de Haaretz, ajoutant qu’il « opère pour permettre et faciliter la distribution de l’aide humanitaire par la fondation humanitaire américaine pour Gaza [GHF] et pour sécuriser les routes menant aux centres de distribution, afin que l’aide parvienne aux civils plutôt qu’au [groupe terroriste palestinien du] Hamas ».

« Tsahal n’a pas donné l’ordre à ses soldats de tirer délibérément sur des civils, y compris ceux qui s’approchaient des centres de distribution. Pour être clair, les directives de Tsahal interdisent les attaques délibérées contre des civils. »

Néanmoins, le communiqué précise que l’armée s’efforce d’améliorer la situation afin de minimiser « les frictions potentielles » avec les civils. « Dans le cadre de cet effort, les soldats de Tsahal ont récemment pris des mesures pour réorganiser la zone, notamment en installant de nouvelles clôtures et de nouveaux panneaux, en ouvrant des routes supplémentaires, etc.

Des Palestiniens transportant des sacs contenant de la nourriture et des colis d’aide humanitaire livrés par la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), une organisation soutenue par les États-Unis, à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 15 juin 2025. (Crédit : Abdel Kareem Hana/AP)

Toute allégation de violation de la loi ou des directives de Tsahal fera l’objet d’une enquête approfondie et des mesures supplémentaires seront prises si nécessaire », poursuit le communiqué.

« Les allégations de tirs délibérés contre des civils présentées dans l’article ne sont pas reconnues sur le terrain », a affirmé l’armée.

« Il s’agit de mensonges éhontés destinés à discréditer Tsahal, l’armée la plus morale au monde », indique le communiqué.

« Les soldats de Tsahal reçoivent des ordres clairs pour éviter de blesser des civils innocents, et ils agissent en conséquence. »

Suite à la publication de l’article, la GHF a déclaré ne « être pas au courant de ces incidents ».

Le communiqué de la GHF tient à souligner que les tirs n’ont pas eu lieu à proximité immédiate de ses sites de distribution.

La GHF souligne également dans son communiqué que « Tsahal est chargé d’assurer la sécurité des personnes qui sollicitent de l’aide auprès de toutes les organisations humanitaires opérant à Gaza, y compris la GHF ».

« Ces allégations sont trop graves pour être ignorées et nous appelons donc Israël à enquêter et à publier les résultats de manière transparente et dans un délai raisonnable », poursuit le communiqué.

Par ailleurs, l’organisation caritative Médecins Sans Frontières (MSF) a appelé vendredi à la suspension immédiate des opérations de secours de la GHF, qualifiant celles-ci de « massacre déguisé en aide humanitaire » et affirmant qu’elles « humilient délibérément les Palestiniens, les obligeant à choisir entre mourir de faim ou risquer leur vie pour obtenir un minimum de provisions ».

Il y aurait une grave pénurie de nourriture et d’autres produits de première nécessité à Gaza après près de deux ans de campagne militaire israélienne qui a déplacé la plupart des 2,3 millions d’habitants de Gaza, tandis que le Hamas retient toujours 50 otages israéliens.

La GHF affirme que son modèle est plus efficace que les méthodes des Nations unies, car ses convois n’ont pas été pillés, ses propres hommes armés empêchant de telles saisies.

Toutefois, l’organisation ne dispose que de quatre sites de distribution dans la bande de Gaza, dont aucun dans le nord, et les Gazaouis sont contraints de parcourir de longues distances à pied tout en traversant des barrages militaires pour récupérer les vivres.

Des hommes armés sur des camions transportant de l’aide après leur entrée dans le nord de la bande de Gaza depuis Israël, à l’ouest de Beit Lahiya, le 25 juin 2025. (Crédit : Bashar Taleb/AFP)

Les camions d’aide internationale et les entrepôts où sont stockées les provisions ont souvent été pillés, Israël accusant le Hamas de voler l’aide destinée à ses propres terroristes ou de la vendre pour financer ses opérations, une accusation que le groupe terroriste palestinien nie, tandis que d’autres affirment que les pillards sont souvent des Palestiniens désespérés et affamés.

L’ONU a reconnu que ses convois ont été victimes de pillages, imputant toutefois la responsabilité à des gangs armés plutôt qu’au Hamas. Elle a insisté sur le fait que la solution réside dans l’autorisation par Israël d’une entrée d’aide beaucoup plus importante à Gaza, afin que la demande diminue.

La guerre à Gaza a éclaté lorsque quelque 6 000 Gazaouis dont 3 800 terroristes dirigés par le Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël le 7 octobre 2023, tué plus de 1 200 personnes, principalement des civils, enlevé 251 otages de tous âges, et commis de nombreuses atrocités, utilisant les violences sexuelles comme arme à grande échelle.

Les groupes terroristes de la bande de Gaza détiennent 50 otages, dont 49 des 251 personnes enlevées par des terroristes du Hamas le 7 octobre 2023. Parmi eux se trouvent les corps d’au moins 28 personnes dont le décès a été confirmé par l’armée israélienne, et 20 seraient encore en vie. Les autorités israéliennes ont fait part de leurs vives inquiétudes concernant le sort de deux autres personnes. Le Hamas détient également le corps d’un soldat des Tsahal tué à Gaza en 2014.

Plus de 56 000 personnes seraient mortes à Gaza depuis le début de la guerre, selon le ministère de la Santé du Hamas. Les chiffres publiés par le groupe terroriste sont invérifiables, et ne font pas de distinction entre civils et terroristes. Israël affirme avoir tué 20 000 terroristes au combat depuis janvier, et 1 600 autres terroristes à l’intérieur du pays le 7 octobre 2023.

Tsahal affirme prendre « de nombreuses mesures » pour minimiser les atteintes aux civils et souligne que le groupe terroriste viole systématiquement le droit international et exploite brutalement les institutions civiles et la population comme bouclier humain pour ses activités de terrorisme, en combattant depuis des zones civiles, notamment des maisons, des hôpitaux, des écoles et des mosquées.

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