Pas de vacances pour les proches, désireux d’obtenir un accord, dit le frère d’un otage
Selon Michael, le frère aîné de l'otage Or Levy, les familles n'ont pas le choix sinon de continuer à faire tout leur possible pour faire revenir leurs proches
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Il y a de cela plus d’une semaine, les proches des otages Or Levy, Hersh Goldberg-Polin et Eliya Cohen ont rendu publiques des vidéos de leurs proches pris en otage par des terroristes du Hamas le 7 octobre, entassés à l’arrière d’une camionnette en direction de Gaza.
Dans cette vidéo, on peut voir Or Levy, 33 ans, blotti dans le camion, terrifié et en état de choc. C’était sans doute quelques minutes après avoir vu sa femme Eynav se faire tuer par des terroristes, alors que le couple tentait de se cacher dans un abri anti-aérien situé dans un champ, près de la rave du désert Supernova.
Les trois hommes, ensanglantés et manifestement hébétés, se font hurler dessus en arabe par des terroristes du Hamas qui leur font relever la tête en les tirant sans ménagement par les cheveux.
Cela fait six mois que la famille de Levy a vu cette vidéo pour la première fois, explique le frère.
« Nous avons vu la partie avec Or », précise Michael, l’aîné de trois frères, dont Or est le cadet. « C’était le premier signe de vie de sa part. Cela semblait tellement irréel : j’ai très vite su que nous la diffuserions pour que le monde comprenne bien à quel genre de monstres nous avons affaire, des gens qui tuent, mutilent, menacent et s’en délectent. »
Trois des familles dont les proches se trouvaient à bord de ce camion ont donné leur accord pour la diffusion de la vidéo au moment-même où le projet d’accord sur les otages de Netanyahu, proposé par le président américain Joe Biden en mai, peinait à rallier les suffrages.
« La vidéo n’a pas permis d’aboutir à un accord, mais elle a fait parler, comme nous le voulions », explique Levy. « Elle a été vue dans tous les médias et nous avons donné des interviews un peu partout, parce que même si c’est terrible de voir leur souffrance, les gens voulaient voir. »
Or et Eynav s’étaient rencontrés au lycée et avaient été amis avant que leur relation prenne une autre nature et qu’ils ne se marient il y a de cela cinq ans. Avec leur fils âgé de 3 ans, Almog, ils vivaient à Givatayim, dans les environs de Tel Aviv. Ils se sont rendus à la rave du désert Supernova aux premières heures du 7 octobre.
Ce sont désormais les grands-parents, qui vivent tous deux à Rishon Lezion, qui prennent soin du petit Almog.
« Ce sont les petites choses du quotidien qui sont difficiles », confie Levy, « comme de savoir où inscrire Almog à la maternelle l’an prochain, à Rishon ou à Givatayim ? Et où sera-t-il d’ici là ? »
Le combat pour faire revenir son frère Or ainsi que les autres otages a pris le pas sur tout le reste de leur vie, dit Michael Levy.
« C’est bizarre, fut un temps, je n’étais que Michael et maintenant je ne suis que le frère d’Or », explique celui qui dirigeait un service dans une grande entreprise israélienne mais qui, depuis le 7 octobre, se consacre corps et âme à la libération de son frère. C’est lui qui s’occupe des papiers, effectue les déplacements prévus pour les proches à l’étranger et donne des interviews aux médias.
C’est particulièrement difficile en ce moment, admet-il, car l’année scolaire se termine, ce sont les vacances d’été, le temps des voyages et du temps libre pour beaucoup.
« C’est bien, mais nous ne pouvons pas nous le permettre. Nous ne pouvons pas vivre comme si de rien n’était ». « Ni notre famille ni nos amis, parce que nous ne savons pas ce qui va se passer. »
Levy fait tout ce qu’il peut pour faire progresser l’accord sur les otages proposé par Biden. Il passera les prochaines semaines à effectuer des déplacements organisés par le Forum des otages et des proches de disparus pour sensibiliser diplomates et politiciens étrangers.
« Il faut amener le Hamas à l’accepter », assure-t-il. « C’est ce dont nous avons besoin. Il faut bien comprendre que Tsahal ne peut pas sauver tous les otages. Tout ce que nous avons, c’est un accord pour les sauver tous, c’est aussi simple que ça. »
Là où on a peu vu Levy faire du lobbying, c’est à la Knesset, car il estime que les politiciens élus sont totalement déconnectés des proches d’otages.
Il explique qu’aucun de ces élus – de la coalition ou de l’opposition – ne l’a contacté, lui ou sa famille, suite à la prise en otage de son frère, avant la diffusion de la vidéo, la semaine dernière. Il juge ces appels téléphoniques « trop peu nombreux et trop tardifs ».
« Je préfère me concentrer sur des projets qui ont une chance d’aboutir plutôt que de parler à des gens qui ne se soucient que de leur avenir politique ou des crédits disponibles dans leur budget », poursuit Levy.
Il est difficile d’être positif, mais il dit qu’il n’a pas d’autre choix que de continuer à travailler.
« Je ne peux pas me permettre de penser à autre chose », ajoute-t-il. « Je ne peux pas me permettre de m’apitoyer sur mon sort ou d’attendre que quelqu’un d’autre le fasse. J’ai besoin que mon frère et tous les autres otages rentrent à la maison. »