Rejetés après le 7 octobre, les Juifs LGBTQ+ américains se réconfortent à la semaine des fiertés de Tel Aviv
Les sentiments anti-Israël au sein de la communauté queer en ont aliéné beaucoup qui ont choisi de développer leur identité juive pour compenser

Pour Yoanna Chaya Kollin, comme pour beaucoup de ses pairs LGBTQ+, le pogrom commis par le Hamas en Israël le 7 octobre 2023 a été un tournant dans sa relation avec une communauté qui l’avait pourtant adoptée.
« À l’époque, je vivais dans les dortoirs LGBTQ+ de mon université, et du jour au lendemain, plus personne ne m’a parlé dans le bâtiment », se souvient la native de Los Angeles. « Je ne pouvais plus aller au centre étudiant LGBTQ+ parce qu’ils savaient que je soutenais Israël, alors que tout le monde était anti-Israël. »
Kollin explique avoir fini par quitter l’université et avoir connu une période « incroyablement difficile » pour apprendre à se redéfinir davantage en tant que sioniste et moins en tant que membre d’une communauté dont elle a eu le sentiment qu’elle s’était retournée contre elle.
« J’ai appris à me faire entendre et dorénavant, je veux être reconnue comme une fille sioniste transgenre. Israël est le seul endroit où les personnes transgenres juives peuvent vivre sans crainte pour leurs droits. »
L’histoire de Kollin est celle de nombreux participants à la mission de la fierté LGBTQ+ des Fédérations juives d’Amérique du Nord en Israël, à l’occasion de la semaine de la fierté de Tel Aviv, qui aurait dû culminer avec le défilé des fiertés, le vendredi 13 juin. L’évènement a finalement été annulé après qu’Israël a mené des frappes sur contre des cibles nucléaires et militaires iraniennes.
Une centaine de leaders juifs LGBTQ+ originaires de 26 communautés d’Amérique du Nord étaient venus en Israël pour témoigner de leur solidarité et se connecter avec la communauté LGBTQ+ d’Israël. La plupart d’entre eux confient avoir été ostracisés par leur communauté LGBTQ+ après le pogrom commis le 7 octobre et avoir renoué avec leur identité juive pour retrouver leur fierté.
« Cette mission a vu le jour parce que nous avons tous besoin de vivre des moments qui nous permettent d’incarner pleinement toutes les facettes de notre identité, sans explication ni peur », explique Nate Looney, l’un des organisateurs du voyage et par ailleurs directeur de la sécurité communautaire au sein du Centre d’appartenance juive des Fédérations juives d’Amérique du Nord.

« Devant le mur Occidental, nous tous, gays, lesbiennes, transgenres et personnes non binaires, avons senti ces vieilles pierres nous relier à des générations de résilience juive. Nous pouvons nous promener dans Tel Aviv et voir le drapeau arc-en-ciel flotter à côté de l’étoile de David sans avoir à choisir entre les deux. »
Unis dans l’adversité
Jeudi soir, à l’occasion d’une fête sur le toit de l’un des hôtels les plus chics de Tel Aviv, les participants se sont confiés sur leur redécouverte du judaïsme au moment où leur identité au sein de la communauté LGBTQ+ s’est effondrée, pour ainsi dire, du jour au lendemain.
« La plupart des gens ont entendu parler du regain d’identité juive vécu depuis le 7 octobre par de nombreux Juifs américains curieux d’en savoir plus sur leur identité juive, de se rendre à la synagogue et scolariser leurs enfants dans des écoles juives », explique Jeff Schoenfeld, un éminent dirigeant de la Fédération et l’un des organisateurs de cette mission.
« Mais bien peu de personnes sont conscientes que c’est en fait au sein de la communauté LGBTQ+ que le phénomène est le plus perceptible. Nombre d’entre elles ont été purement et simplement rejetées par leur ancienne communauté progressiste, et ont trouvé un nouveau foyer au sein des espaces juifs.

Pour beaucoup, ce voyage a été un rare moment de coexistence de leur identité juive et sexuelle en parfaite harmonie.
Originaire de Philadelphie et militant des causes juives et LGBTQ+, Max Tabak parle de ce voyage comme l’une des semaines les plus émouvantes de toute sa vie.
« Après le 7 octobre, des extrémistes de ma propre communauté queer, au sein de laquelle j’organisais des soirées queer depuis des années, se sont mis à m’ignorer. Et dans le même temps, j’ai commencé à me sentir plus juif. Pas juif, mais juif, une partie de notre nation. Et le fait de me trouver en Israël pour y rencontrer de fiers dirigeants a été une expérience très puissante et vectrice d’unité », confie-t-il.

Gili Roman, Israélien dont la sœur, Yarden Roman-Gat, a été enlevée le 7 octobre au kibboutz Beeri et libérée 54 jours plus tard à la faveur du premier cessez-le-feu, ne dit pas autre chose à l’issue d’une tournée auprès des communautés LGBTQ+ des États-Unis.
« Ce que j’ai découvert, c’est que les communautés LGBTQ+ ne s’intéressaient absolument pas à nous ou notre douleur », regrette Roman. « Ils ne m’ont pas accepté ou n’ont pas reconnu les menaces auxquelles nous sommes confrontés. Alors que les communautés juives m’ont accueilli à bras ouverts, que ce soit dans leur cœur, leur maison, leur synagogue ou leur communauté. En Israël, je n’ai pas à choisir. On me voit à la fois en tant qu’homosexuel, en tant que Juif et en tant qu’Israélien. C’est une approche totalement holistique. »

« Venir en Israël a été thérapeutique et révélateur », se confie Dillon Perez, de New York. « Je me sens vraiment en sécurité ici, à un endroit où je peux être moi-même et dire ce que je pense à des personnes en lesquelles j’ai confiance. C’est stimulant de voir ce que les personnes queer en Israël font pour leurs droits et pour protéger nos droits dans le monde entier. »
Dénoncer l’hypocrisie
Les participants disent avoir du mal à accepter l’incohérence de la situation – celle d’avoir été rejetés par des communautés LGBTQ+ fondées sur des valeurs de tolérance, d’inclusion, de respect et de diversité, en faveur du Hamas, une entité terroriste déterminée à faire exactement le contraire.
« Je continue d’essayer de comprendre pourquoi ces communautés les soutiennent », explique Gordy Nathan, un Californien. « En fait, ils ne disent jamais le mot Hamas. Ils ne peuvent pas parler de quoi que ce soit en rapport avec le 7 octobre. Mais ils ne parlent que de « Libérer la Palestine ». Quand j’entends ça, c’est comme si j’entendais ‘Heil Hitler’ – de l’antisémitisme pur. »

« Quand j’entends mes propres camarades queer scander « De la rivière à la mer », je suis sidéré », ajoute Tabak. « Savez-vous que vous, en tant que personne queer, vous ne tiendriez pas cinq minutes à Gaza ? On vous jetterait du haut d’un immeuble, on vous assassinerait ou quelque chose dans le genre. Ne comprenez-vous pas ce qu’ils ont fait le 7 octobre ?
Face à une telle hypocrisie, les participants ont convenu qu’ils devaient se regrouper et former des communautés plus fortes pour soutenir les Juifs LGBTQ+.
« Tout le monde ici a ses expériences et son histoire, mais au final, nous vivons tous la même chose », conclut Tabak. « Notre place n’est plus auprès d’eux. Nous avons tous l’impression d’être des cibles, et si nous ne nous rassemblons pas et ne nous unissons pas, nous souffrirons seuls. »
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