Smotrich accuse Kohavi de politisation après sa mise en garde contre la coalition
Le chef de Tsahal a discuté avec Netanyahu des projets de loi qui auraient un impact sur l’armée ; le chef de HaTzionout HaDatit dit que Kohavi vise une carrière politique
Le chef du parti HaTzionout HaDatit, le député Bezalel Smotrich, a critiqué mardi Aviv Kohavi, chef d’état-major de Tsahal, et l’a accusé de tenter de politiser l’armée.
Il a tenu ces propos un jour après les révélations d’un entretien entre le nouveau Premier ministre Benjamin Netanyahu, et Kohavi, qui doit terminer son mandat le mois prochain, et au cours duquel ce dernier a exprimé ses inquiétudes concernant les demandes de la coalition qui touchent à l’autorité militaire
Smotrich a cité le journaliste de Ynet Yossi Yehoshua, qui a affirmé qu’il était probable que Kohavi envisage une carrière politique dans le futur et qu’il cherchait à ajouter à son CV une preuve de sa capacité à tenir tête à Netanyahu.
« Yossi Yehoshua dit la vérité en ce qui concerne la politisation éhontée que Kohavi introduit au sein de Tsahal », a tweeté Smotrich.
Le député a ajouté que « quiconque souhaite préserver l’unité de Tsahal en tant qu’armée du peuple, dans le cadre du consensus et en dehors de la politique, devrait adopter une loi imposant une période de réflexion d’au moins 10 ans pour les chefs d’état-major ».
Actuellement, les hauts responsables de Tsahal doivent attendre trois ans entre la fin de leur service et leur entrée en politique.
Les commentaires de Smotrich ont été faits quelques heures après la publication d’informations selon lesquelles Kohavi avait partagé ses inquiétudes concernant « une législation potentielle relative à Tsahal » avec Netanyahu, information confirmée par l’armée.
Selon Tsahal, Netanyahu et Kohavi se seraient mis d’accord « pour que les décisions liées à Tsahal ne soient prises qu’après la présentation par Tsahal des conséquences et de l’importance de telles décisions ».
Le coup de fil qui a eu lieu la semaine dernière – entre le chef de Tsahal et un homme qui n’est pas encore Premier ministre – est un rare exemple d’un chef militaire se mêlant directement des intrigues politiques, renforçant l’inquiétude d’un certain nombre d’institutions israéliennes concernant les réformes prévues par Netanyahu et ses partenaires de coalition lorsqu’ils prendront le pouvoir.
Il s’agit notamment d’un projet qui donnerait à Smotrich un nouveau poste indépendant de ministre au sein du ministère de la Défense pour superviser les affaires civiles dans les zones de la Cisjordanie entièrement contrôlées par Israël, connues sous le nom de zone C ; et des projets pour accorder au leader d’extrême droite Otzma Yehudit, Itamar Ben Gvir, le contrôle de la police des frontières de Cisjordanie comme faisant partie des fonctions élargies qui lui ont été promises au poste de ministre en charge de la police. Cette unité est actuellement subordonnée à l’armée et au ministère de la Défense.
Le ministre de la Défense sortant, Benny Gantz, lui-même ancien chef de Tsahal, a défendu Kohavi et critiqué Smotrich pour ses commentaires.
« Quiconque souhaite préserver une armée unie ne voterait pas pour un projet de loi de dispense de service militaire et ne diviserait pas Tsahal en organes subordonnés », a tweeté Gantz, critiquant également les promesses de la nouvelle coalition d’adopter des lois exemptant les Israéliens ultra-orthodoxes de l’enrôlement.
Gantz a déclaré qu’il soutenait pleinement Kohavi, « qui a l’obligation d’exprimer son opinion professionnelle contre toute mesure susceptible de nuire à la sécurité et au fonctionnement de Tsahal ». Il a également accusé Smotrich de tenter de faire taire les chefs d’état-major actuels et futurs par des « menaces ».
Le mandat de Kohavi à la tête de Tsahal devrait prendre fin le 17 janvier, date à laquelle il sera remplacé par Herzi Halevi.
Le ministre des Finances sortant Avigdor Liberman, qui avait proposé Kohavi pour le poste lorsqu’il était ministre de la Défense sous Netanyahu, a fait l’éloge du chef d’état-major de Tsahal pour son comportement professionnel.
Kohavi est « un commandant de grand calibre, qui n’a pas le moindre agenda politique – un homme qui a consacré toute sa vie à la sécurité d’Israël, travaillant nuit et jour pour le succès de Tsahal et de la nation », a déclaré Liberman.
Ben Gvir, quant à lui, a offert son soutien à Smotrich et a appuyé sa proposition visant à prolonger la période de réflexion actuelle.
« Ces dernières années, nous avons assisté à un défilé de chefs de Tsahal se précipitant dans la politique après une courte période de réflexion », a déclaré Ben Gvir. Ce court intervalle entre le service au sein de Tsahal et la Knesset « donne le sentiment à la population qu’il y a une politisation de Tsahal, et que la crainte de voir un chef de Tsahal, qui aspire à entrer en politique, tenter de marquer des points auprès de la population pour l’aider politiquement est bien réelle ».
Kohavi n’a pas encore fait connaître ses projets de vie post-militaire. Il a passé 40 ans au service de Tsahal.
Les anciens chefs d’état-major de Tsahal sont connus pour se lancer dans la politique. Au cours des 30 dernières années, tous les chefs militaires sauf un se sont présentés à la Knesset : Gantz, Gadi Eisenkot, Gabi Ashkenazi, Moshe Yaalon, Ehud Barak, Amnon Lipkin-Shahak et Shaul Mofaz l’ont fait avec plus ou moins de succès.
Ces dernières semaines, Kohavi a fait plusieurs déclarations visant à prévenir les efforts de politisation de Tsahal ou de subversion de son autorité.
Le mois dernier, le chef de Tsahal a déclaré que l’ingérence politique dans les décisions militaires était « inacceptable« , après un tollé politique, notamment de la part de Ben Gvir, à propos d’un soldat qui avait été condamné à 10 jours de prison militaire pour avoir nargué des militants de gauche.
« Nous ne permettrons à aucun politicien, ni de droite ni de gauche, d’interférer dans les décisions du commandement et d’utiliser l’armée pour promouvoir un programme politique », a déclaré Kohavi à l’époque. « L’ingérence politique dans Tsahal nuit directement à la capacité de l’armée à accomplir ses tâches, et à sa légitimité. »
La semaine dernière, réagissant à un habitant des implantations qui a traité l’unité du porte-parole de Tsahal comme étant « d’extrême gauche », Kohavi a mis en garde contre une « campagne hideuse qui doit cesser immédiatement ».
Il a ajouté que l’armée « est une armée apolitique du peuple, qui opère… sans parti pris ni programme politique. »
Emanuel Fabian a contribué à cet article.