Trump a écarté une frappe israélienne sur l’Iran en faveur des négociations sur le nucléaire – NYT
Le président américain aurait informé Benjamin Netanyahu de sa décision de ne pas soutenir une telle attaque lors de la visite de ce dernier à la Maison Blanche au début du mois

Le président américain Donald Trump a écarté une attaque israélienne contre des sites nucléaires iraniens prévue le mois prochain, préférant négocier un accord avec l’Iran pour limiter son programme nucléaire, a rapporté jeudi le New York Times, citant des responsables de l’administration et d’autres sources.
Selon le journal, Trump aurait informé le Premier ministre Benjamin Netanyahu de sa décision de ne pas soutenir une telle attaque lors de la visite de ce dernier à la Maison Blanche au début du mois. Au cours de leur rencontre, Trump avait annoncé que les États-Unis entameraient des négociations avec l’Iran en vue d’un accord visant à empêcher ce pays de développer des armes nucléaires.
L’article indique que Trump a décidé de ne pas soutenir les plans d’attaque israéliens, qui auraient nécessité le soutien militaire américain, en raison de désaccords internes au sein de l’administration. Il ajoute que Netanyahu faisait pression pour que cette opération ait lieu dès le mois prochain.
Le général Michael E. Kurilla, chef du Commandement central des États-Unis (CENTCOM), et Mike Waltz, conseiller à la Sécurité nationale des États-Unis, se sont montrés ouverts au plan israélien et ils ont discuté de la manière dont Washington pourrait apporter son aide, selon le journal.
Les plans initiaux de l’attaque prévoyaient une opération commando israélienne sur les sites nucléaires souterrains, accompagnée d’une campagne de bombardement pour protéger les équipes sur le terrain. Les responsables israéliens espéraient que les bombardements impliqueraient des avions américains.
Toutefois, une telle opération aurait nécessité des mois de planification. Les responsables israéliens et américains, en particulier Netanyahu, voulaient accélérer le processus. L’idée des commandos a donc été abandonnée et les responsables ont commencé à discuter d’une vaste campagne de bombardements avec l’aide des Américains.

La campagne aurait commencé début mai et duré plus d’une semaine, avec l’élimination des systèmes de défense aérienne iraniens restants après qu’Israël en a détruit une grande partie lors de frappes dans le pays l’année dernière. Les chasseurs israéliens ont ainsi pu frapper directement les sites nucléaires. Une telle attaque aurait probablement incité l’Iran à lancer un barrage de missiles de représailles sur Israël, ce qui aurait nécessité l’aide des États-Unis pour le repousser.
Toutefois, Trump a refusé de discuter des plans concernant l’Iran lorsque Netanyahu l’a appelé le 3 avril, préférant l’inviter à se rendre à la Maison Blanche, selon des responsables israéliens cités dans l’article du New York Times.
Netanyahu est arrivé à Washington quatre jours plus tard, lors d’une visite présentée publiquement comme une occasion d’aborder les droits de douane de Trump, bien que les responsables israéliens se soient principalement concentrés sur la discussion de l’attaque prévue contre l’Iran.
Netanyahu s’est ainsi retrouvé de manière inattendue et visiblement en décalage avec le président américain sur la question de l’Iran lorsque Trump a annoncé, alors que le Premier ministre israélien était assis à ses côtés dans le Bureau ovale, que les États-Unis entamaient des pourparlers nucléaires avec Téhéran.
Un réveil brutal
Après sa visite à la Maison Blanche, Netanyahu a fait savoir dans une déclaration vidéo en hébreu que Trump et lui « sont d’accord pour que l’Iran n’ait pas d’armes nucléaires » et que cet objectif ne pourra être atteint que par un accord dans lequel les capacités nucléaires seront définitivement démantelées, et non simplement limitées.
Le Premier ministre a déclaré que cet objectif ne pourrait être atteint diplomatiquement que s’il était similaire au désarmement nucléaire de la Libye en 2003, au cours duquel les forces américaines avaient détruit ou fait sortir du pays les composants du programme nucléaire du pays.
« Nous y allons, nous faisons exploser les installations, nous démantelons tous les équipements, sous la supervision et l’exécution des Américains – c’est une bonne chose », a déclaré Netanyahu.

« Il y a aussi une deuxième possibilité : que cela ne se produise pas et que l’Iran fasse traîner les pourparlers. Dans ce cas, l’option militaire serait la seule. Tout le monde le comprend », a ajouté Netanyahu, qui a noté qu’il avait longuement discuté de cette éventualité avec Trump.
Les responsables américains et israéliens ont qualifié la réunion dans le Bureau ovale de tendue, en particulier sur la question de l’Iran, a rapporté Axios mercredi.
« Trump et Netanyahu ont une vision très différente au sujet d’une attaque militaire en Iran », a déclaré un responsable à Axios.
« Le président s’est en quelque sorte délecté de lui donner du fil à retordre sur la question de l’Iran. La dynamique que vous avez vue en public est la même que celle qui s’est produite en privé », a-t-il ajouté.

Les deux camps de Trump
L’Iran et les États-Unis tiendront un nouveau cycle de négociations nucléaires samedi, une semaine après la tenue à Mascate de discussions importantes entre des hauts responsables des deux pays, les plus importantes depuis que Trump a abandonné un accord nucléaire historique en 2018.
Les deux parties ont qualifié les discussions de « constructives », bien que les États-Unis continuent d’imposer des sanctions à l’Iran et qu’ils ont déployé des bombardiers B-2 à distance de frappe du pays.
Selon l’article d’Axios publié mercredi, les responsables de l’administration Trump sont toujours divisés entre le dialogue et l’option militaire pour empêcher le développement du programme nucléaire iranien.
« La politique iranienne n’est pas très claire, principalement parce qu’elle est encore en cours d’élaboration. Elle est délicate parce qu’il s’agit d’une question très chargée politiquement », a indiqué à Axios un responsable américain au fait des discussions internes.
Bien que les responsables s’accordent à dire qu’en l’absence d’accord, il y aura probablement une guerre, deux camps au sein de l’administration Trump divergent sur la meilleure approche à adopter actuellement, selon le reportage.
Les responsables américains ont déclaré que les partisans d’un accord comprennent le vice-président JD Vance, l’envoyé américain Steve Witkoff et le secrétaire à la Défense Pete Hegseth. Ces derniers souhaitent éviter de mettre les soldats américains en danger et craignent les répercussions économiques qu’une flambée des prix du pétrole pourrait entraîner après une attaque contre l’Iran. Certains de ces responsables doutent également de la possibilité d’exiger un démantèlement complet du programme nucléaire iranien dans le cadre d’un accord, comme le demande Netanyahu.
D’autres, comme le secrétaire d’État Marco Rubio et le conseiller à la Sécurité nationale Waltz, prônent une confrontation militaire, arguant qu’au vu de la position affaiblie de l’Iran, le moment est venu de détruire son programme nucléaire, soit en frappant directement la République islamique, soit en soutenant un assaut israélien.
L’Iran est devenu de plus en plus vulnérable à la suite des contre-attaques israéliennes contre Téhéran et contre ses mandataires depuis le mois d’octobre 2023. Ces attaques ont conduit à la quasi-désintégration du principal proxy de l’Iran, le groupe terroriste chiite libanais Hezbollah, tandis que l’effondrement du gouvernement du dictateur syrien Bashar el-Assad a encore affaibli son emprise sur la région.

Poursuite des pourparlers à Rome
Les discussions indirectes entre l’Iran et les États-Unis, entamées le week-end dernier à Mascate sous médiation omanaise, se poursuivront samedi à Rome, en Italie, et non à Oman comme cela avait été précédemment annoncé, a indiqué mercredi la télévision d’État iranienne.
À quelques jours de ces pourparlers, le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi a affirmé que la question de l’enrichissement d’uranium n’était « pas négociable » pour Téhéran.
« L’Iran doit stopper son programme d’enrichissement et de militarisation nucléaires, et l’éliminer », avait écrit mardi l’émissaire du président Trump pour le Moyen-Orient, Witkoff, sur le réseau social X.

Cette déclaration semble contredire ses propos tenus la veille sur la chaîne Fox News, où il s’était abstenu de réclamer un démantèlement total du programme nucléaire iranien.
Rafael Mariano Grossi, directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), l’organe de surveillance nucléaire des Nations unies, est également arrivé en Iran mercredi pour des entretiens qui pourraient inclure des négociations sur l’accès que les inspecteurs de l’AIEA pourraient obtenir dans le cadre de tout accord proposé.
Grossi a décrit sa « visite opportune en Iran » sur X, affirmant que la coopération avec l’AIEA « est indispensable pour fournir des garanties crédibles sur la nature pacifique du programme nucléaire iranien à un moment où la diplomatie est plus que jamais nécessaire ».
Depuis l’effondrement de l’accord nucléaire en 2018, avec le retrait unilatéral des États-Unis de l’accord, connu sous l’acronyme JCPOA, l’Iran a abandonné toutes les limites de son programme nucléaire, en enrichissant librement l’uranium jusqu’à un degré de pureté de 60 %, proche du niveau de qualité militaire de 90 %.

L’Iran a perturbé les caméras de surveillance installées par l’AIEA et a empêché certains inspecteurs de l’agence d’accéder à certains sites. Les responsables iraniens ont également de plus en plus souvent menacé de se doter de l’arme atomique, ce qui inquiète l’Occident et l’AIEA depuis que Téhéran a renoncé à un programme d’armement organisé en 2003.
« Sans nous, tout accord n’est qu’un morceau de papier », a déclaré Grossi dans les colonnes du journal Le Monde mercredi, avertissant que l’Iran n’était « pas loin » d’obtenir des armes nucléaires.
« L’enrichissement de l’uranium par l’Iran est une question réelle et acceptée. Nous sommes prêts à instaurer la confiance pour répondre à d’éventuelles préoccupations, mais la question de l’enrichissement n’est pas négociable », a déclaré Araghchi à la presse à l’issue d’une réunion du cabinet.
Araghchi et Witkoff doivent se rencontrer lors de la réunion de Rome de samedi.
La décision américaine de se retirer du JCPOA en 2018 avait en partie été motivée par l’absence de mesures contre le programme balistique de Téhéran, perçu comme une menace pour Israël, l’allié des États-Unis.
Depuis son retour à la Maison Blanche, Trump a appelé l’Iran à négocier un nouveau texte et menacé de bombarder le pays en cas d’échec de la diplomatie.
Dimanche, le porte-parole de la diplomatie iranienne, Esmaïl Baghaï, a affirmé que « le seul sujet des discussions sera le nucléaire et la levée des sanctions » imposées à l’Iran. L’influence régionale de l’Iran et ses capacités en matière de missiles font partie des « lignes rouges » de Téhéran, a par ailleurs averti l’agence de presse officielle iranienne Irna.
« En diplomatie, un tel changement [impulsé par des faucons incapables de saisir la logique et l’art de négocier de manière sensée] risque de compromettre toute ouverture », avait-il fustigé sur X.
Ce message faisait référence au changement de position de l’administration Trump, selon Irna.
Araghchi, à la tête de la délégation de négociateurs iraniens, est attendu jeudi en Russie pour des discussions sur le nucléaire. Il transmettra au président russe, Vladimir Poutine, un message écrit du guide suprême iranien.
Le Corps des Gardiens de la Révolution islamique (CGRI), le bras armé du régime iranien avait affirmé mardi que les capacités militaires et de défense du pays constituaient des « lignes rouges » intouchables, à quelques jours d’un nouveau cycle de pourparlers indirects sur le nucléaire avec Washington prévu samedi.
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