« 10 minutes pour emballer une vie » : Un hôtel de Jérusalem accueille à nouveau des évacués
Après que les frappes iraniennes ont détruit leurs maisons, des centaines d'habitants de Holon trouvent refuge dans la capitale, entre peur, résilience et espoir

Lorsque Hadas Tal, 38 ans, n’a eu que 10 minutes pour retourner dans son appartement détruit à Holon et récupérer le strict nécessaire après qu’un missile iranien a frappé son immeuble jeudi, son esprit a basculé en mode survie.
« Mon mari était en état de choc, mais je savais que je devais rester pragmatique », explique Tal, mère de trois filles âgées de 5, 8 et 11 ans.
« J’avais l’impression d’être dans une émission de téléréalité : dix minutes pour remplir une mission. Tout était cassé et couvert de débris de verre, mais j’ai réussi à attraper des vêtements, des chaussures et les poupées de mes filles. »
Tal s’est entretenue avec le Times of Israel à l’hôtel Leonardo de Jérusalem, qui appartient au groupe Fattal. L’hôtel accueille actuellement quelque 800 personnes évacuées de cette ville, située dans le centre d’Israël, après qu’un missile a frappé un immeuble, faisant quatre blessés graves.
La guerre entre Israël et la République islamique a commencé le 13 juin, lorsque l’armée de l’air israélienne a frappé préventivement plusieurs cibles en Iran pour empêcher ce pays d’obtenir l’arme nucléaire, après que des renseignements ont indiqué que Téhéran, qui cherche ouvertement à détruire l’État juif, était sur le point d’atteindre son objectif.
Avant qu’un fragile cessez-le-feu ne soit conclu mardi, la République islamique avait lancé quelque 550 missiles balistiques et environ 1 000 drones sur Israël en représailles. Selon les autorités sanitaires et les hôpitaux israéliens, les attaques iraniennes ont fait 28 morts et des milliers de blessés.

Selon la Fédération des autorités locales, 11 000 personnes avaient été évacuées vers des hôtels dans tout le pays lundi, et 4 000 autres auraient trouvé refuge chez des amis ou des proches.
« Pour l’instant, mes filles sont euphoriques, car elles ont l’impression d’être en vacances », explique Tal.
« Elles ont beaucoup d’amis ici, elles courent partout avec eux, mais quand elles voudront rentrer à la maison, nous aurons un problème. »
Tal explique qu’elle s’efforce de rester occupée en permanence, d’abord en s’occupant de ses filles, mais aussi en aidant autant qu’elle le peut.

« Je distribue des glaces aux enfants, je trie les dons et j’aide à d’autres tâches », dit-elle.
« J’ai l’impression que mon cerveau ne peut rien gérer d’autre que des tâches pratiques. »
Avec les touristes partis, les écoles toujours fermées, la Vieille Ville voisine bouclée aux non-résidents et tous les commerces non essentiels fermés, les rues autour de l’hôtel étaient calmes dans la chaleur étouffante de Jérusalem lundi, lorsque le Times of Israel s’y est rendu.
Mais juste à l’extérieur de l’entrée de l’hôtel, l’ambiance était tout autre. Les gens se regroupaient, fumaient, discutaient au téléphone ou profitaient simplement d’un moment de calme.

Parmi eux se trouvait Reut Haggiag, 39 ans.
« Il y a eu des sirènes, nous sommes descendus avec les enfants dans l’abri de notre immeuble, nous avons fermé la porte, puis nous avons entendu un bruit assourdissant », raconte-t-elle en se remémorant le moment de l’impact.
« Tout le monde criait, et quand nous avons ouvert la porte, nous avons compris qu’il y avait eu un impact à proximité, pas dans notre immeuble, mais dans celui d’à côté. Il y avait du verre et des débris partout. »
La famille a immédiatement été évacuée vers un hôtel.
Haggiag a noté que beaucoup de gens s’étaient mobilisés pour leur venir en aide.
« Le peuple israélien est très spécial », dit-elle.
« De nombreux bénévoles sont venus, en particulier issus des communautés religieuses. Beaucoup de filles du mouvement de jeunesse Bnei Akiva et de la communauté ultra-orthodoxe sont venues jouer avec les enfants. D’autres nous ont apporté des bougies de Shabbat. Il y a eu beaucoup d’initiatives privées pour nous apporter toutes sortes de choses. »
« Pour autant, ce n’est pas chez moi », ajoute-t-elle, l’air fatigué.

Interrogée sur ses enfants, âgés de 8 et 11 ans, Haggiag explique que les choses ne sont pas faciles pour eux.
« Ils ne comprennent pas tout à fait la situation, ils ont peur », dit-elle.
« Ils sont tristes que toutes leurs affaires aient été détruites. Ils veulent savoir ce qu’il va advenir de notre appartement et quand nous pourrons rentrer. »
« Ils posent beaucoup de questions auxquelles nous n’avons pas de réponse », ajoute-t-elle.
Comme toutes les personnes interrogées par le Times of Israel, Haggiag ne sait pas combien de temps il faudra avant qu’ils puissent rentrer chez eux.
Des enfants partout
À l’intérieur de l’hôtel, il semblait y avoir des enfants partout.
Dans le hall de l’hôtel, à une table de café, un groupe d’écoliers est plongé dans un jeu consistant à imiter des cris d’animaux. Ils discutent et rient entre deux rugissements et deux « coin-coin ».

Au milieu du hall, une petite fille âgée d’à peine deux ans colorie tranquillement avec des crayons de couleur, visiblement indifférente à l’agitation qui l’entoure.
Beaucoup d’enfants – et pas mal d’adultes – tiennent dans leurs mains des ballons fantaisie en forme d’animaux, offerts par l’un des nombreux bénévoles venus remonter le moral des familles évacuées.
L’hôtel Leonardo a déjà accueilli des centaines de personnes évacuées à la suite du pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre 2023, lorsque des milliers de terroristes ont infiltré le sud d’Israël, tuant plus de 1 200 personnes et détruisant des communautés entières.
Au plus fort de la guerre, plus de 140 000 Israéliens ont été déplacés de leurs foyers, non seulement dans le sud du pays, mais aussi dans le nord, après que le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah, proxy de la République islamique, a commencé à tirer des roquettes sur Israël dès le 8 octobre 2023.

Les personnes évacuées, alors hébergées au Leonardo, venaient de Sderot, dans le sud, et de Kiryat Shmona, dans le nord, et y sont restées entre six et douze mois.
La guerre contre l’Iran a également réactivé un réseau de bénévoles urbains initialement formé à la suite des massacres du 7 octobre : le Jerusalem Civilian Volunteer Hub (Centre des bénévoles civils de Jérusalem). Cette initiative est le fruit d’une collaboration entre plusieurs organisations, dont Lev Ehad (« Un Cœur »), Habayit HaMeshutaf (« Un foyer commun ») et Hitorerut (« Éveil »), un mouvement sioniste libéral qui siège également au conseil municipal.
« Au cours de la première année de la guerre, nous avions jusqu’à 5 000 bénévoles et 20 départements différents, notamment pour le logement, les enfants et l’aide juridique », explique Rachael Risby Raz, qui est bénévole au centre depuis le début.
« Lorsque la guerre contre l’Iran a éclaté, nous avons immédiatement repris nos activités », a-t-elle déclaré au Times of Israel par téléphone, peu après s’être rendue à l’hôtel Leonardo accompagnée d’un bienfaiteur qui apportait des jouets et du matériel artistique pour les enfants.

Lundi, elle a expliqué qu’environ 500 bénévoles travaillaient sur différents projets dans la ville, notamment le nettoyage des abris anti-atomiques publics et la collecte de dons pour les personnes évacuées.
« Je pense qu’une partie du travail consiste simplement à écouter ces personnes qui ont tout perdu », explique Risby Raz.
Aux côtés des bénévoles, des dizaines d’employés municipaux de Holon, vêtus de gilets jaunes vifs, étaient répartis dans tout l’hôtel, où ils avaient installé des stands d’information pour expliquer aux résidents leurs droits juridiques et financiers et répondre à leurs questions.
« J’ai déjà fait ma demande d’indemnisation », explique Amin Abdelhadi, 27 ans.
Sa petite amie et lui vivaient au dernier étage de l’un des immeubles gravement endommagés par la frappe iranienne.
« Toutes les vitres ont volé en éclats et tous les cadres de porte sont tombés », raconte-t-il.
« Mais au moins, notre appartement est encore debout. Dans notre rue, certaines maisons ont été complètement détruites. »
Le couple s’était préparé à l’éventualité d’une évacuation.

« Nous avions tous les deux préparé un sac avec le strict nécessaire », dit Abdelhadi.
Il explique que se rendre au refuge n’a pas été simple : leur chienne venait de mettre bas et avait donné naissance à trois chiots. Ils ont donc dû tout planifier minutieusement pour mettre tout le monde en sécurité.
« Nous ne pouvions malheureusement pas emmener les chiens à l’hôtel, alors je les ai confiés à mes parents, qui vivent dans le nord. »
Abdelhadi confie qu’il lui a été difficile de ne pas pouvoir travailler.

« Je suis cuisinier dans un restaurant, mais il est trop loin d’ici », explique-t-il.
Entre tristesse et espoir
L’hôtel fournit également le petit-déjeuner, le déjeuner et le dîner aux personnes évacuées.
Au moment où l’auteur de ces lignes s’est rendu sur place, le déjeuner battait son plein et des personnes de tous âges se régalaient d’un buffet composé de salades, de légumes, de plats à base de viande et bien d’autres choses encore.
Nassim Aharoni, 79 ans, était assis seul à une table.
Son appartement a également été endommagé lors de l’attaque, et ses deux voitures, ainsi que celle de sa compagne, ont été complètement détruites. Malgré l’épreuve qu’il a traversée, il se dit optimiste, surtout depuis que les États-Unis se sont joints aux efforts militaires d’Israël pour détruire le programme nucléaire iranien.
« Ce n’est pas chez moi, mais ça va », confie Aharoni au Times of Israel.
« Nous aimons Israël, nous aimons le pays, nous aimons le gouvernement, nous aimons les soldats de Tsahal et le peuple » dit-il.

« Nous n’avons pas d’autre endroit où aller. C’est notre pays. »
Aharoni dit qu’au milieu des troubles récents dans la région, il garde l’espoir de pouvoir un jour visiter sa ville natale, Bagdad.
« J’ai immigré en Israël depuis l’Irak au début des années 1950, et toute ma vie, j’ai voulu visiter la terre où je suis né », dit-il.
« Maintenant, j’espère avoir la chance de voir un accord de paix avec l’Irak dans un avenir proche. »
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