Abbas regretterait de ne pas avoir signé l’accord de paix de 2008 – Ehud Olmert
L'ancien Premier ministre, qui a proposé un État aux Palestiniens, affirme que le dirigeant de l'AP "regrettait de ne pas avoir signé"
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Le dirigeant de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, aurait été favorable en privé à l’accord de paix sans précédent qu’il a refusé en 2008, a déclaré jeudi l’ancien Premier ministre Ehud Olmert.
« Il était évident qu’il était entièrement pour », a déclaré Olmert, qui a négocié avec Abbas sous les auspices américains en 2007 et 2008.
« Je pense que lorsque quelqu’un lui parlera en privé, les yeux dans les yeux, à huis clos, il dira qu’il regrette de ne pas avoir signé. »
Olmert a fait ses commentaires durant une interview sur Zoom avec le Dr. Sherry Sufi, écrivain et universitaire australien.
« Il comprend maintenant que cela aurait pu être un grand changement pour eux. »
En 2015, Abbas a déclaré avoir rejeté l’offre d’Olmert – qui prévoyait de placer la Vieille Ville de Jérusalem sous contrôle international – parce qu’il n’avait pas été autorisé à étudier la carte.
« Je n’étais pas d’accord », a déclaré un jour Abbas à la Dixième chaîne israélienne. « Je l’ai rejeté d’emblée. »
Olmert a déclaré avoir offert un retrait quasi-total de la Cisjordanie, proposant qu’Israël conserve 6,3 % du territoire afin de garder le contrôle des principales implantations juives. Il a ajouté qu’il proposait de dédommager les Palestiniens en leur offrant des terres israéliennes équivalant à 5,8 % de la Cisjordanie, ainsi qu’une liaison avec la bande de Gaza – un autre territoire censé faire partie d’un futur État palestinien.
Olmert était également prêt à diviser Jérusalem en deux villes, l’une sous contrôle israélien et l’autre sous contrôle palestinien, et à renoncer à la souveraineté israélienne sur le mont du Temple et l’ensemble de la Vieille Ville. Il a proposé que le « bassin sacré » soit plutôt supervisé par une tutelle internationale non souveraine de cinq membres, comprenant Israël, l’AP, la Jordanie, les États-Unis et l’Arabie saoudite.
Il a décrit l’offre d’abandonner le contrôle israélien de la Vieille Ville comme le jour le plus difficile de sa vie.
Abbas a déclaré en 2015 qu’il soutenait l’idée d’échanges de territoires, mais qu’Olmert l’avait pressé d’accepter le plan sans lui permettre d’étudier la carte proposée.
M. Abbas a également estimé que l’offre d’Olmert d’accepter un nombre symbolique de réfugiés palestiniens en Israël ne résolvait pas la question, car les descendants des réfugiés palestiniens se comptent aujourd’hui par millions, dont beaucoup sont dispersés dans la région.
Au cours de la conversation de jeudi, Olmert s’est dit avoir été encore plus généreux envers Abbas pendant les pourparlers que ce que demandait le dirigeant de l’AP en 2015.
« Abbas n’a jamais dit non », a souligné Olmert.
« Non seulement il n’a pas dit non – toute la rumeur selon laquelle il l’aurait rejeté catégoriquement est fausse », a-t-il poursuivi. « À chaque occasion possible, depuis lors jusqu’à aujourd’hui, le dirigeant Abbas souligne et il me relaie également… qu’il n’a jamais, jamais dit non à ce plan. »
« Ce qu’il m’a dit en fait, c’est que ce plan semblait très impressionnant, qu’il semblait très sérieux… Il était enthousiaste et très ouvert à l’option de conclure cet accord. Mais il a dit, vous savez, ‘Je ne suis pas un expert en cartes’. Comment puis-je signer quelque chose avant de le montrer aux experts de notre côté pour qu’ils l’examinent ? »
« Mahmoud Abbas est un homme très qualifié, une personne décente et éprise de paix. Je l’aime bien, je lui fais confiance, j’aurais fait la paix avec lui. Malheureusement, ça n’a pas marché pour des raisons qui dépassent ma compréhension. »
« Je ne peux pas parler pour lui », a déclaré l’ancien Premier ministre.
Dans son livre Tested by Zion, le diplomate américain chevronné Elliott Abrams a exploré un certain nombre de raisons pour lesquelles Abbas avait rejeté l’offre d’Olmert. Il a peut-être attendu que le successeur du président américain de l’époque, George W. Bush, prenne ses fonctions avant de s’engager dans un accord de paix, il a peut-être considéré Olmert comme un canard boiteux faisant l’objet d’une enquête criminelle, ou il n’avait peut-être pas la légitimité nécessaire auprès des Palestiniens pour conclure un accord mettant fin au conflit.
Lors de son entretien avec Sherry Sufi, Olmert a évoqué la possibilité que le conflit soit la « source de subsistance » des groupes terroristes palestiniens et qu’ils aient dissuadé Abbas de conclure un accord.
D’autres ont suggéré qu’Abbas n’était finalement pas disposé à renoncer à l’idée qu’Israël permette à des millions de descendants de réfugiés palestiniens de s’installer à l’intérieur du pays en tant que citoyens à part entière, une ligne rouge qu’Olmert n’était pas disposé à franchir car cela aurait détruit le caractère juif d’Israël.
Un article du New Republic de 2013 rapporte qu’Olmert avait proposé la relocalisation d’un nombre symbolique de réfugiés palestiniens (5 000 sur une période de cinq ans) à l’intérieur des frontières israéliennes, tout en offrant une compensation et une réinstallation aux autres.
« J’aurais fait un petit compromis », avait alors déclaré Olmert.
Des « sources très bien informées » citées dans l’article affirment que M. Abbas avait dit à Condoleezza Rice, alors secrétaire d’État américaine, qu’il aurait été prêt à accepter un accord dans lequel Israël aurait accueilli entre 40 000 et 60 000 réfugiés.
« Le Premier ministre israélien a fait une offre de paix, et le leader palestinien – chef du parti du Fatah, de l’OLP et de l’Autorité palestinienne – l’a rejetée », a écrit Abrams sur son blog. « Ceux qui souhaitent blâmer Israël pour le manque persistant de progrès dans la conclusion d’un accord de paix global ne prêteront sans doute aucune attention à cette interview, mais les faits sont là. »
Sufi a déclaré qu’il avait organisé cet entretien pour aider à clarifier les raisons pour lesquelles Olmert et Abbas n’avaient pas conclu d’accord de paix.
« De nombreux critiques anti-israéliens affirment que, si seulement Israël se retirait aux frontières de 1967, cela résoudrait le conflit, et le plan de paix de M. Olmert en 2008 était ce qui s’en rapprochait le plus, ce qui nécessite de se demander pourquoi il n’a pas été mis en œuvre », a déclaré M. Sufi. « Il y a beaucoup d’informations contradictoires sur ce qui a mal tourné, sur les raisons pour lesquelles cet accord n’a pas été conclu, et j’ai donc pensé qu’il serait bon d’entendre directement M. Olmert lui-même. C’était l’idée derrière cette interview. »
« J’ai trouvé son attitude à l’égard des dirigeants palestiniens incroyablement sympathique, ce qui est fascinant car cela montre en soi la diversité des pensées qui existent dans la société israélienne moderne. »
La menace du Hamas
Olmert a également exprimé sa position sur la menace permanente posée par le Hamas, depuis la bande de Gaza, et sur ce que devrait être la politique d’Israël envers les civils qui s’y trouvent.
« Nous devrions changer le paradigme de l’influence israélienne à Gaza », a-t-il déclaré. « Nous devrions les aider à construire un port en eau profonde, nous devrions les aider à créer plus d’emplois… afin qu’ils aient intérêt à ne pas être les captifs du Hamas, dans l’agression politique et militaire, contre l’État d’Israël. La seule façon d’y parvenir est de jeter les bases d’une meilleure qualité de vie pour les Palestiniens de Gaza. »
Il a également minimisé la menace que le Hamas faisait peser sur Israël.
« La seule chose qui ne m’inquiète pas vraiment, c’est la menace militaire du Hamas. Non pas que j’aime ça, mais à tout moment, dans toutes les circonstances possibles, que nous pouvons avoir à l’esprit, nous pouvons détruire le Hamas à Gaza ou dans n’importe quel endroit où il se trouverait. Ils le savent et nous le savons. »