Ben Gvir s’est bien rendu au mont du Temple ce mardi
Le député travailliste Gilad Kariv a déclaré que le ministre de la Sécurité nationale accordait la priorité à la "promotion d'une vision du monde nationaliste extrême"
Le nouveau ministre israélien de la Sécurité nationale et figure très controversée de l’extrême droite, Itamar Ben Gvir, s’est rendu tôt mardi sur le mont du Temple, lieu saint au cœur des tensions à Jérusalem-Est.
« Notre gouvernement ne cédera pas aux menaces du Hamas« , a déclaré mardi Ben Gvir après que le mouvement terroriste islamiste palestinien Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, avait qualifié l’intention du ministre de se rendre sur le site de « prélude à une escalade dans la région ».
« Le mont du Temple est l’endroit le plus important pour le peuple d’Israël. Nous maintenons la liberté de mouvement pour les musulmans et les chrétiens, mais les juifs aussi montent sur le site, et ceux qui font des menaces doivent être traités avec une poigne de fer », a-t-il ajouté.
« Le gouvernement israélien dont je suis un membre ne cèdera pas à une organisation vile et meurtrière », a déclaré Ben Gvir après sa visite. « Si le Hamas pense que me menacer va me dissuader, qu’ils comprennent que les temps ont changé », a-t-il écrit dans un tweet.
La visite de Ben Gvir, dont le ministère est en charge de la police, a eu lieu après une évaluation avec des responsables de la sécurité et de la police, a indiqué son bureau dans un communiqué.
Il a rencontré le chef du Shin Bet, Ronen Bar, ainsi que le chef de la police Kobi Shabtai et le commandant du district de Jérusalem, qui « ont déterminé qu’il n’y avait aucun obstacle » à la visite, selon le communiqué.
Lors de sa visite, le ministre était accompagné de membres des forces de sécurité israéliennes, alors qu’un drone survolait l’esplanade, ont indiqué à l’AFP des gardes du Waqf jordanien, qui administre le site.
Le ministère jordanien des Affaires étrangères a dénoncé une « provocation » laissant présager « une escalade ».
Le ministère des Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne (AP) a condamné mardi cette visite, la qualifiant de « provocation sans précédent ».
« Netanyahu porte la responsabilité de cette attaque contre al-Aqsa », a estimé l’AP dans un communiqué.
« Notre peuple palestinien continuera de défendre ses lieux saints et la mosquée Al-Aqsa », a promis mardi un porte-parole du Hamas, Hazem Qassem, qualifiant la visite de « crime ».
Après le départ de M. Ben Gvir, la situation sur l’esplanade était calme et des fidèles et visiteurs ont pu y accéder sans encombres, a constaté une journaliste de l’AFP.
Le mont du Temple est considéré par les Juifs comme le lieu historique des deux temples juifs, ce qui en fait le site le plus sacré du judaïsme. C’est aussi le troisième lieu saint pour les musulmans, qui l’appellent la mosquée Al-Aqsa ou le Noble Sanctuaire.
Les provocations et la violence sur le site se sont souvent transformées en hostilités plus larges.
En vertu d’un statu quo historique, les non-musulmans peuvent s’y rendre à des heures précises mais ne peuvent pas y prier. Or, ces dernières années, un nombre croissant de juifs, souvent nationalistes, y prient subrepticement, un geste dénoncé comme une « provocation » par les Palestiniens.
La visite de Ben Gvir mardi a eu lieu le 10 Tevet, un jour de jeûne juif pleurant les événements qui ont conduit à la destruction du Temple.
Le député travailliste Gilad Kariv a déclaré que la décision de Ben Gvir montrait qu’il accordait la priorité à la « promotion d’une vision du monde nationaliste extrême » plutôt qu’à la sécurité des citoyens israéliens et au bon fonctionnement de la police.
« Particulièrement le jour du jeûne du 10 Tevet, il est important de se rappeler que le lien entre l’extrémisme politique, l’ivresse du pouvoir et la corruption gouvernementale a conduit à la destruction du temple », a déclaré Kariv dans un communiqué. « Se dresser contre ces phénomènes est essentiel pour garantir l’avenir d’Israël. »
Ben Gvir, qui s’est rendu au mont du Temple à maintes reprises dans le passé en tant que député, avait annoncé dimanche son intention de visiter le site pour la première fois en tant que ministre.
En réponse, le Hamas avait averti Israël que la visite de Ben Gvir sur le mont du Temple « ferait exploser la situation ».
Le quotidien Haaretz a rapporté lundi que des diplomates de plusieurs États arabes anonymes se sont rendus à Jérusalem pour exprimer leur inquiétude face au projet de Ben Gvir de visiter le mont du Temple, affirmant que de telles mesures pourraient entraîner une détérioration de la situation sécuritaire à Jérusalem, en Cisjordanie et dans la région.
Ils ont noté que Pessah et le Ramadan tomberont à nouveau en même temps cette année et que « les déclarations et actions extrêmes des hauts responsables du nouveau gouvernement, ainsi que le sentiment de désespoir du côté palestinien, pourraient faire des ravages », a déclaré une source au journal.
L’annonce par Ben Gvir de sa visite a été critiquée par l’opposition, le chef de l’opposition Yair Lapid avertissant qu’une telle visite « coûterait des vies » et exhortant Netanyahu à l’empêcher d’effectuer la visite.
En 2000, la visite d’Ariel Sharon, alors à la tête de l’opposition de droite israélienne, avait été perçue comme une provocation par les Palestiniens. Le lendemain, des heurts sanglants avaient opposé Palestiniens et policiers israéliens, marquant le début de la seconde Intifada.
En mai 2021, des violences à Jérusalem-Est, notamment sur l’esplanade, avaient été le prélude à une guerre de 11 jours entre le Hamas et Israël.
Avocat de formation vivant dans une implantation parmi les plus radicales de Cisjordanie, Ben Gvir est devenu ministre en décembre 2022 dans le gouvernement mené par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, le plus à droite de l’histoire du pays.
Celui-ci n’a pas commenté la visite lors de la première réunion du cabinet mardi.
« Voilà ce qui arrive lorsqu’un Premier ministre faible est forcé de donner des responsabilités à la personne la plus irresponsable du Moyen-Orient dans l’endroit le plus explosif du Moyen-Orient », a commenté sur Twitter Lapid.
Il défend l’annexion par Israël de la Cisjordanie, où vivent 2,9 millions de Palestiniens et 475 000 Israéliens, mais sans accorder de droits égaux.
Il prône également le transfert d’une partie de la population arabe d’Israël, jugée déloyale, vers les pays voisins, et se rend souvent là où les tensions sont les plus fortes, mettant, selon ses détracteurs et le chef de la police actuel, le feu aux poudres.