Élisabeth Borne dénonce le RN « héritier de Pétain », sans sous-estimer la part de LFI
"Je ne crois pas du tout à la normalisation du Rassemblement national," a affirmé la Première ministre sur Radio J
Élisabeth Borne s’en est prise dimanche au Rassemblement national (RN), « héritier de Pétain » dont elle juge la victoire « possible » en 2027, tout en accusant Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise (LFI) de faire « le jeu de l’extrême-droite » et de concourir à la montée de la violence.
« Je ne crois pas du tout à la normalisation du Rassemblement national. Je pense qu’il ne faut pas banaliser ses idées, ses idées sont toujours les mêmes. Alors maintenant, le Rassemblement national y met les formes, mais je continue à penser que c’est une idéologie dangereuse », a déclaré la Première ministre dans un entretien à Radio J diffusé dimanche.
Le RN, héritier de Pétain ? « Oui, également, héritier de Pétain, absolument », a répondu Borne.
Qu’en est-il de Marine Le Pen ? « Je n’ai jamais entendu Marine Le Pen dénoncer ce qu’ont pu être les positions historiques de son parti et je pense qu’un changement de nom ne change pas les idées, les racines », a jugé la Première ministre au sujet du changement de nom du parti en 2018, de FN à RN.
Le président du parti Jordan Bardella a aussi dénoncé ce qu’il a appelé des « propos graves, mensongers et injurieux ».
« Élisabeth Borne est à la fois inculte, indigne et incapable », l’a également étrillée le député RN Sébastien Chenu, en soulignant que parmi les fondateurs du mouvement figurent des résistants.
Mme Le Pen n’est « pas l’héritière de Pétain, faut pas rigoler, le parti a changé », a assuré à BFMTV le maire de Béziers Robert Ménard, un proche. Il a estimé que « continuer à caricaturer comme ça Marine Le Pen, ça exaspère les gens » et ainsi Mme Borne « fait le jeu » du RN.
« Le RN a beaucoup évolué », a aussi jugé le député centriste Charles de Courson (groupe Liot), jugeant sur France 3 les propos de la Première ministre « un peu excessifs ».
Interrogée sur la possibilité d’une victoire de la fille de Jean-Marie Le Pen à la présidentielle de 2027, la cheffe du gouvernement a dit son inquiétude. « Je crains que tout soit possible. (…) À force de banalisation, c’est une réelle menace. »
Borne a également jugé qu’il existait « une proximité évidente » entre le RN et Vladimir Poutine. « Si Marine Le Pen veut réécrire l’histoire, on n’est pas obligé de tomber dans ce panneau. Cette proximité existe et ne s’efface pas », a-t-elle assuré. L’ancienne présidente du RN s’est défendue cette semaine de tout « tropisme russe » devant une commission d’enquête parlementaire.
Comme on lui demandait si le parti de Poutine en France était à l’extrême-droite ou à l’extrême-gauche, au RN ou à LFI, la Première ministre a notamment répondu : « il y a effectivement des voix minoritaires aux deux extrêmes, qui sont très ambiguës, qui sans doute n’osent pas afficher publiquement leurs positions mais qui ne prennent pas non plus la condamnation qu’on peut attendre face à une agression de la Russie sur l’Ukraine ».
La « part de responsabilité » de Mélenchon
Vise-t-elle Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ? « Absolument (…) Je pense qu’il y a la même ambiguïté vis-à-vis de Vladimir Poutine, et la même connivence qui continue à exister vis-à-vis de lui. »
Borne ne met cependant « pas de signe égal » entre le RN et la LFI, alors que cette question agite le camp présidentiel. « Je dis que le plus dangereux, que l’idéologie qui est fondamentalement dangereuse, c’est celle de l’extrême-droite. Mais je vois que le comportement de la LFI qui veut finalement déstabiliser notre pays, qui s’en prend à nos institutions, fait aussi le jeu de l’extrême-droite. »
S’il y a « beaucoup de facteurs qui expliquent la montée de la violence » dans la société française, « Jean-Luc Mélenchon a sa part de responsabilité, quand on le voit hurler devant des policiers ‘la République c’est moi’, quand on l’entend effectivement vouloir casser, abattre la ‘mauvaise République’, tenir des propos outranciers en permanence », a jugé Borne, pour qui les députés de la LFI « ne jouent pas le jeu du débat démocratique à l’Assemblée nationale ».
Au cours de cet entretien, Borne a également évoqué son père, rescapé de la Shoah, et son propre parcours.
« J’ai été orpheline à 11 ans, j’étais pupille de la Nation. Ensuite j’ai intégré l’Ecole Polytechnique où j’ai pu poursuivre les études parce que j’étais aussi rémunérée. Et ensuite j’ai commencé mon emploi au sein de l’État », a-t-elle rappelé, en soulignant « qu’elle doit tout à la République et à [son] pays ».