Jessica Chastain, héroïne de l’Holocauste dans « The zookeeper’s wife »
L'actrice dit avoir été 'honorée' d'incarner une telle héroïne qui a réellement existé et qui a tout risqué pour sauver 300 Juifs de la griffe des nazis
JTA — Les femmes fortes occupent une place d’honneur dans la filmographie de l’actrice Jessica Chastain.
Il y a Maya, l’agent de la CIA de fiction dans « Zero Dark Thirty », dont le travail mène l’équipe des forces spéciales américaines Seal Team Six à Oussama Ben Laden. Il y a Melissa Lewis, la commandante héroïque qui refuse d’abandonner un co-équipier dans « Seul sur mars » et il y a Elizabeth Sloan, femme d’influence de Washington qui s’attaque à l’industrie de l’armement dans « Miss Sloan ».
“Je recherche des personnages qui défient le statu-quo », explique Chastain – qui a remporté un Golden Globe pour son rôle dans « Zero Dark Thirty » – à JTA dans un entretien téléphonique. « Je sais que toutes les femmes ne sont pas fortes. Mais ces personnalités fortes qui luttent contre le cadre dans lequel elles ont été placées par la société m’inspirent incontestablement ».
Il n’est guère surprenant qu’elle ait sauté sur l’opportunité d’incarner Antonina Zabinski dans le film « The Zookeepers Wife ». C’est un film émouvant émotionnellement sur la Deuxième guerre mondiale qui raconte l’histoire vraie d’une héroïne et de son époux, Jan, qui se sont mis en danger – eux et leurs enfants – en cachant 300 Juifs au sein du zoo de Varsovie qu’ils dirigeaient.
Avant la guerre, le zoo était considéré comme l’un des plus importants d’Europe. Les gens venaient de partout pour s’y promener, voir les animaux et peut-être parvenir à apercevoir l’originale Antonina lors de l’une de ses tournées en bicyclette, souvent suivie par une ménagerie d’autruches.
Mais comme le raconte le film, les bombes ont détruit une grande partie du zoo durant l’invasion nazie de la Pologne, tuant un nombre substantiel d’animaux.
Les Zabinski ont été épargnés et auraient pu vivre une existence relativement confortable durant l’Occupation : un collègue d’avant-guerre originaire de Berlin, Lutz Heck (Daniel Brühl), avait été nommé chef zoologue du Reich. Il a protégé le couple en partie en raison du respect que lui avaient inspiré les réussites de la famille – qui était parvenue à créer un zoo de renommée mondiale – et en partie également à cause de son attirance pour Antonina, qu’il a eu d’ailleurs du mal à cacher.
Et pourtant, Heck a fait transférer les plus belles (et les plus rares) espèces du zoo à Berlin, pour des questions d’élevage, vidant le parc animalier d’une partie de ses occupants. C’est une décision dont la famille Zabinski a largement profité. Ainsi, Jan (interprété par Johan Heldenbergh) a utilisé les cages vides pour y stocker des armes pour la résistance et s’est finalement joint au combat mené par le mouvement lui-même.
Le couple a également dissimulé une amie proche, la sculptrice Magdalena Gross (Efrat Dor, une actrice israélienne).
‘Les troupes nazies étaient constamment présentes – un éternuement ou les pleurs d’un enfant au mauvais moment pouvaient entraîner une tragédie’
Puis Jan et Antonina ont décidé de faire plus. Ils sont parvenus à convaincre Heck de les laisser élever des cochons sous prétexte de nourrir les soldats, promettant de collecter les déchets qui s’accumulaient dans le ghetto de Varsovie avoisinant pour nourrir les animaux. Cette formule a semblé gagnante pour Heck – mais le couple Zabinski et d’autres membres de la résistance ont en réalité fait entrer des familles entières dans le zoo en les dissimulant dans des tonneaux et en les recouvrant des ordures destinées au cochons. Ils étaient ensuite cachés dans des cages vides, dans un réseau de tunnels.
Les troupes nazies étaient constamment présentes – un éternuement ou les pleurs d’un enfant au mauvais moment pouvaient entraîner une tragédie. En fait, à plusieurs occasions, la situation a semblé sur le point de dégénérer définitivement, ce qui renforce le sentiment d’oppression dans ce film bien construit et tendu, qui suit la vie de la famille Zabinski depuis les bonheurs d’avant la guerre au danger omniprésent durant tout le conflit jusqu’à la réunion poignante du couple à la fin du film.
Grâce à l’héroïsme du couple Zabinski, environ 300 personnes ont été cachées et finalement mises en sécurité par la résistance.
Pendant tout le film, Chastain traverse une gamme d’émotions reflétant les nombreuses facettes de la personnalité de son personnage – zoologue, épouse, mère, espionne, tentatrice de Heck — dans une performance pleine de bravoure et de force.
Je demande à Chastain si elle est forte dans la vraie vie.
« Je suis d’accord pour combattre les contraintes qui me sont imposées par la société », répond-t-elle. Est-ce que cela a toujours été le cas ? Est-ce le succès qui l’a enhardie ?
“Je pense que j’ai toujours été comme ça », dit-elle. « Je me suis toujours insurgée verbalement quand quelque chose n’était pas juste ou pas honorable ».
Mais Chastain note rapidement que se dresser contre l’autorité est souvent plus facile à dire qu’à faire.
« Je pourrais immédiatement dire que ‘oui, j’aurais fait [ce que le couple Zabinski] a fait’, mais une réponse tellement facile diminuerait la force dont ils ont témoigné et les sacrifices auxquels ils ont consenti », dit-elle. « Cela nous ferait oublier que ses enfants auraient pu être tués. J’espère que je ne rencontrerais jamais une telle situation. Elle a placé le bien-être des autres au-dessus du bien-être de quelques-uns et était prête à tout sacrifier pour une cause juste ».
Lorsqu’on lui a offert le rôle, Chastain explique avoir rencontré la réalisatrice Niki Caro, et avoir été immédiatement captivée par le script.
‘J’espère que je ne rencontrerais jamais une telle situation. Elle a placé le bien-être des autres au-dessus du bien-être de quelques-uns et était prête à tout sacrifier pour une cause juste’
« L’histoire – c’est une histoire du monde », explique-t-elle. « Dans les écoles américaines, vous n’apprenez pas ce qu’ont été les femmes dans l’Histoire. Cela a été un honneur pour moi d’incarner cette femme incroyable ».
“The Zookeeper’s Wife” est une adaptation d’un livre éponyme qui a été écrit par Diane Ackerman, inspiré par les journaux intimes d’Antonina. C’est le récit de la bravoure et de l’altruisme, en particulier lorsque, Jan parti à la guerre, Antonina a dû tout prendre en charge elle-même.
Le couple Zabinski repose au sein des Justes parmi les Nations de Yad Vashem. Chastain, qui n’a pas encore visité le centre consacré à l’Holocauste de Jérusalem, a réussi à mener des recherches extensives pour s’imprégner du rôle.
« J’ai lu le livre bien sûr, et j’ai visité le zoo de Varsovie », explique-t-elle. « J’ai rencontré sa fille [Teresa], qui était un bébé à l’époque du film, et j’ai découvert la famille d’un point de vue personnel. Je suis également allée à Auschwitz. J’avais beaucoup lu à ce sujet, bien sûr, mais je n’étais pas allée dans un camp de concentration. »
Chastain indique que la visite d’Auschwitz a suscité en elle de profondes émotions.
Ses expériences lui ont fait réaliser le caractère contemporain du message de l’oeuvre.
“On apprend en regardant l’Histoire et quand on l’observe, on voit chez Hitler et Mussolini — que l’une des premières choses qu’ils ont faites, ça a été de museler la presse », dit-elle.
« Cela a mené à des atrocités. Et quand on regarde où nous en sommes aujourd’hui, nous devons nous demander : ‘Est-ce qu’on va suivre leurs pas, est-ce qu’on va commettre d’autres atrocités, ou est-ce qu’on va créer un monde qui protégera dans le sens large, indépendamment de l’ethnicité ?' »
La compassion de Chastain pour les étrangers est bien enracinée. Même si elle n’en parle pas beaucoup, elle est la fille d’une mère célibataire qui, à certains moments, a été dans l’obligation de voler à l’étalage pour pouvoir nourrir Jessica et sa soeur. J’aborde la question avec précaution et lui demande comment cela a impacté sa carrière et sa vie.
« Je pense que grandir dans une situation où l’argent n’était pas nécessaire au bonheur m’a aidé, en fait », dit-elle. « Je l’ai réalisé en menant une carrière d’artiste, ce n’est pas quelque chose que vous faites pour l’argent. J’ai finalement compris que je pouvais vivre sans. J’ai grandi sans ».
« J’ai grandi sans de nombreuses choses et du coup, j’ai de la compassion pour ceux qui ont moins. Je suis très heureuse de payer des impôts pour que les gens puissent aller à l’école et avoir des soins de santé, parce que je sais ce que c’est d’avoir peu. »
La sortie nationale de « The Zookeeper’s Wife” est prévue le 31 mars.