Lapid : Un gouvernement Netanyahu-Smotrich-Ben Gvir serait la « fin de la démocratie »
"Ceux qui s'obstinent à ne pas les prendre au sérieux font l'autruche. Ils pensent chaque mot qu'ils disent", a mis en garde le Premier ministre
Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.
À sept jours du scrutin, le Premier ministre Yair Lapid a averti mardi que la démocratie israélienne serait gravement menacée si ses rivaux politiques arrivaient au pouvoir et lançaient un programme de réformes judiciaires exhaustif.
S’adressant lors d’une conférence organisée par le Movement for Quality Government à Tel Aviv, Lapid a affirmé qu’aujourd’hui, « la fin de la démocratie n’est plus une menace imminente », mais plutôt « la promesse électorale » du chef du Likud Benjamin Netanyahu et du parti d’extrême droite HaTzionout HaDatit.
Netanyahu a riposté en accusant Lapid d’avoir adopté une série de mesures antidémocratiques, tandis que le chef du parti HaTzionout HaDatit, Bezalel Smotrich, a décrété respecter la démocratie.
Smotrich a récemment dévoilé son programme de réforme judiciaire radicales, qui permettrait aux politiciens de mettre leur veto aux décisions de la Cour suprême en matière de législation, de modifier le mode de sélection des juges, de diviser les pouvoirs du procureur général et d’abolir le délit de « fraude et d’abus de confiance » – une accusation qui constitue la base de trois des quatre procès pour corruption en cours contre Netanyahu.
Le Likud a déclaré que l’abolition de la loi ne concernerait pas rétroactivement les affaires de Netanyahu, même si les répercussions juridiques sur les affaires en cours ne sont pas encore claires.
Bien que la réforme judiciaire ait été l’un des débats politiques les plus concrets précédant le cinquième scrutin national israélien en 43 mois, elle n’a pas fait progresser le débat et les sondages prévoient une impasse potentielle entre les blocs actuels dirigés par Netanyahu et le parti Yesh Atid de Lapid.
L’alliance HaTzionout HaDatit-Otzma Yehudit, soutenue par la popularité d’Itamar Ben Gvir, l’allié d’extrême droite de Smotrich, a fait un bond depuis les dernières élections en Israël en mars 2021, et est actuellement le troisième plus grand parti du pays.
Bien que Ben Gvir et Smotrich aient tempéré leur langage parfois enflammé au cours des derniers mois, Lapid a déclaré que le programme de leur alliance restait extrême.
« Voici donc le programme qu’ils ont publié – avoir ici un pays sombre, raciste et extrémiste, sans aucune restriction légale », a déclaré Lapid. « Smotrich a déjà annoncé qu’il voulait être ministre de la Défense, et Ben Gvir, ministre de la Sécurité intérieure » responsable de la police et de la sécurité intérieure.
« Ceux qui s’obstinent à ne pas les prendre au sérieux font l’autruche. Ils pensent chaque mot qu’ils disent », a-t-il ajouté.
« Si cela devait arriver, à Dieu ne plaise, je ne sais pas exactement ce qu’il adviendra d’Israël, mais ce ne sera plus la seule démocratie du Moyen-Orient. Ce ne sera plus une démocratie du tout », a-t-il poursuivi, dans l’un de ses discours les plus enflammés de cette campagne électorale.
S’en prenant à Lapid, Netanyahu a déclaré que « Lapid se comporte comme un dictateur dans son propre parti », lequel, contrairement au Likud, n’organise pas de primaires. Il a également critiqué le parti Yesh Atid de Lapid pour avoir attaqué la Quatorzième chaîne, une chaîne de droite, et pour s’être allié au parti HaMahane HaMamlahti, qui a récemment présenté un programme politique prévoyant des perquisitions sans mandat en cas de suspicion de crimes majeurs.
« Il s’est adressé à la population arabe aujourd’hui et a essayé de l’inciter contre moi », a-t-il ajouté à propos de l’intervention de Lapid à Nazareth.
Smotrich a déclaré mardi, lors de la Sderot Conference on Society and Education de Beer Sheva, dans des commentaires sans rapport avec le sujet, qu’il respectait la démocratie, et, pour preuve, a évoqué sa réaction au retrait unilatéral par Israël, en 2005, de ses implantations et de ses forces de la bande de Gaza.
« Nous avons respecté la démocratie au fil des ans, et il y a quelques années seulement, nous l’avons acceptée dans le cadre de l’expulsion de Gush Katif, même si, à notre avis, il s’agissait d’une erreur grossière », a-t-il déclaré.
Smotrich, soupçonné à l’époque d’avoir organisé des manifestations violentes contre le désengagement de Gaza, avait été arrêté par l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet en 2005 mais il a été libéré sans avoir été inculpé.
Selon Lapid, les droits des femmes, les droits des LGBT et un système judiciaire libre et équitable figurent parmi les principales libertés qui seront menacées si l’extrême droite devait prendre le pouvoir cet automne.
Prédisant que le plafond de verre lié au genre reviendra, « plus fort que jamais », le Premier ministre a déclaré que si une telle idéologie prenait racine, elle pourrait conduire à la perte des droits des femmes sur leur corps, ainsi qu’à une moindre représentation dans les postes de pouvoir.
Les communautés LGBT, a-t-il ajouté, pourraient perdre leur reconnaissance et avoir des difficultés à fonder une famille.
Et sur le plan juridique, Lapid a déclaré que le processus de réforme judiciaire décrit par Smotrich pourrait mener à « l’annulation du procès de Netanyahu. »
A Beer Sheva, Smotrich a réaffirmé sa position selon laquelle une réforme judiciaire était nécessaire pour rééquilibrer le pouvoir entre le gouvernement et les juges.
Smotrich a déclaré que « sans un remaniement profond du système judiciaire et un changement de l’équilibre entre le gouvernement et le système judiciaire, nous n’avons pas le droit d’exister en tant que coalition. »
« La population ne pardonnera pas à ceux qui tentent délibérément de nous empêcher d’apporter des modifications au système judiciaire », a-t-il ajouté.