Marche contre l’antisémitisme : LFI boycotte ; la participation du RN jugée encombrante
Cette marche, à l'initiative de Gérard Larcher et Yael Braun-Pivet se voulait consensuelle : "une mobilisation générale" contre la recrudescence record des actes antisémites en France

Malgré une banderole unique, les politiques manifesteront divisés dimanche contre l’antisémitisme lors d’une « grande marche civique », où se rendra Elisabeth Borne mais pas la France insoumise, tandis que la participation du Rassemblement national est contestée par la gauche et la majorité macroniste.
« Pour la République, contre l’antisémitisme » pourra-t-on lire sur la banderole de tête, que porteront les présidents de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet et du Sénat Gérard Larcher, leurs initiateurs.
Mais les deux responsables ont précisé sur TF1 qu’ils « ne défileraient pas à côté » du Rassemblement national, dont la présence annoncée suscite un malaise à gauche et au sein de la majorité.
M. Larcher a appelé à un « sursaut autour des valeurs de la République » face à la recrudescence des actes antisémites en France – plus de 1 000 en un mois, un record – tandis que Mme Braun-Pivet a souhaité ne « pas salir le message » de cette marche « avec des polémiques stériles ».
Le défilé entre l’Assemblée nationale et le Sénat a été, dès son annonce, boycottée par Jean-Luc Mélenchon, le leader de la France insoumise, pour qui « les amis du soutien inconditionnel au massacre ont leur rendez-vous » dimanche, « sous prétexte d’antisémitisme ».

Marine Le Pen cheffe de file des députés RN a promis elle d’y participer, en appelant « l’ensemble de (ses) adhérents et de (ses) électeurs » à s’y joindre, et en se disant prête à défiler « en queue de cortège » puisque sa présence dérange.
Une polémique similaire avait eu lieu en 2015 pour la manifestation en soutien à Charlie Hebdo, visé le 7 janvier par un attentat islamiste. Le FN avait alors appelé ses partisans à manifester en province.
« A mon sens, le Rassemblement national n’a pas sa place dans cette manifestation », mais « c’est une manifestation publique à laquelle chacun est libre, en conscience, de participer », a relevé le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, après le Conseil des ministres.
« Illégitime »
Emmanuel Macron n’a pas dit s’il y participerait mais il a mis en garde mercredi ceux qui confondent « le rejet des musulmans et le soutien des juifs », dans une allusion claire à l’extrême droite, et ceux qui « préfèrent rester ambigus sur la question de l’antisémitisme par souci de flatter de nouveaux communautarismes », référence cette fois à LFI.
« S’en prendre à un juif », « c’est toujours chercher à atteindre la République », a prévenu aussi le chef de l’Etat devant le Grand Orient de France, principale obédience française de francs-maçons.
La Première ministre Elisabeth Borne, dont le père de confession juive a été déporté, sera présente à la manifestation, ainsi que plusieurs membres du gouvernement.
A gauche, le malaise domine. Les partis socialiste, communiste et écologiste participeront à la marche mais ils souhaitent mettre en place « un cordon républicain » dans la manifestation pour ne pas se mêler à l’extrême droite.
Le numéro un du PCF Fabien Roussel va se rendre au rassemblement, mais « ne défilera pas aux côtés » du RN, héritier du Front national fondé par Jean-Marie Le Pen, « plusieurs fois condamné pour propos antisémites », et par « des hommes qui ont collaboré » avec l’Allemagne nazie.

Même embarras chez les socialistes, qui jugent « illégitime » la présence du RN au vu notamment des propos tenus par son président Jordan Bardella pour qui Jean-Marie Le Pen n’était « pas antisémite ».
« Dédiabolisation »
Les Ecologistes ont exhorté Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher à exclure les partis d’extrême droite, qui « font de cette marche une étape supplémentaire de leur stratégie de dédiabolisation ».
Le secrétaire général de Renaissance, Stéphane Séjourné, a également émis des réserves, invitant les organisateurs et les partis politiques « à ne pas être les complices de la banalisation d’un parti fondé par des antisémites ».
D’autres ont moins d’état d’âme: à droite, Eric Ciotti (LR), à l’extrême droite Eric Zemmour et Marion Maréchal (Reconquête!) ont immédiatement fait savoir qu’ils en seraient.
L’Eglise catholique sera elle représentée mais elle n’a pas donné de consigne aux fidèles, laissant « chaque citoyen (…) se déterminer », selon le président de la Conférence des évêques de France (CEF) Eric de Moulins-Beaufort.
Seule La France insoumise n’ira pas. « On ne lutte pas contre l’antisémitisme et le racisme dans la confusion », qui « permet les soutiens les plus insupportables », a-t-elle estimé.