Pologne: Karol Nawrocki, un historien nationaliste élu président
Admirateur de Donald Trump, le président tout juste l'avait rencontré à la Maison Blanche peu avant le premier tour ; il affirme que le président américain lui avait dit: "Vous allez gagner"

Karol Nawrocki, vainqueur de l’élection présidentielle polonaise de dimanche, est un historien nationaliste spécialiste du monde criminel, qui a obtenu le soutien du principal parti d’opposition Droit et Justice (PiS, conservateur) et de l’administration Trump.
Selon les données de la commission électorale nationale, M. Nawrocki a remporté 50,89% des voix contre 49,11% pour le maire pro-européen de Varsovie Rafal Trzaskowski lors du second tour de l’élection.
Avec son slogan « La Pologne d’abord, les Polonais d’abord », il a ciblé le million de réfugiés ukrainiens vivant dans le pays, membre de l’Otan mais également de l’Union européenne, envers laquelle il se montre aussi critique.
S’il s’est engagé à maintenir le soutien de la Pologne à l’Ukraine, qui se bat contre l’armée russe depuis février 2022, Karol Nawrocki s’oppose à l’adhésion à l’Otan de ce pays voisin et dénonce les aides accordées aux réfugiés ukrainiens en Pologne.
Dans une vidéo, il a déclaré que les prestations sociales étaient « avant tout destinées aux Polonais » et que, « dans les files d’attente chez les médecins et dans les hôpitaux », les Polonais devraient « avoir la priorité ».
Il a de plus reproché à Kiev de ne pas avoir « fait preuve de gratitude pour ce que les Polonais ont fait », et accusé le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, d' »insolence » à l’égard de la Pologne.

Admirateur de Trump
Admirateur de Donald Trump, M. Nawrocki l’a rencontré à la Maison Blanche peu avant le premier tour. Il affirme que le président américain lui a dit: « Vous allez gagner ».
Cette rencontre a soulevé en Pologne des accusations d’ingérence américaine dans l’élection.
La ministre américaine de la Sécurité intérieure, Kristi Noem, a également apporté son soutien à M. Nawrocki lors d’un rassemblement conservateur fin mai en Pologne. « Il faut qu’il soit le prochain président », a-t-elle affirmé.
Pendant la campagne, Karol Nawrocki a prôné la mise en place de contrôles à la frontière avec l’Allemagne afin d’empêcher l’entrée de migrants, refoulés selon lui par ce pays, et réclamé que Berlin verse à la Pologne des réparations pour la Deuxième Guerre mondiale.
Dans l’espoir de séduire les électeurs d’extrême droite, M. Nawrocki a signé des engagements préparés par leur chef de file, Slawomir Mentzen.
Sa campagne a été éclaboussée par des révélations sur son passé.
Des médias ont divulgué qu’il avait acquis un appartement auprès d’un homme âgé à l’issue d’une transaction jugée opaque par des observateurs et ses opposants politiques.
Le site d’informations Onet.pl a pour sa part publié une enquête explosive, affirmant qu’il était impliqué dans l’introduction de travailleuses du sexe dans un hôtel à Sopot (nord) à l’époque où il y travaillait comme garde, il y a une vingtaine d’années.
Il a nié ces allégations et qualifié l’enquête de « tas de mensonges ».

Jeunesse à Gdansk
Karol Nawrocki est né dans la cité portuaire de Gdansk, où il a joué au football et pratiqué la boxe dans sa jeunesse, avant d’obtenir un doctorat en histoire et un MBA.
Il a été directeur du musée de la Deuxième Guerre mondiale de cette ville de 2017 à 2021.
Depuis 2021, il dirige l’Institut de la mémoire nationale (IPN) chargé d’enquêter sur les crimes nazis et communistes.
Ses recherches portent sur l’opposition anticommuniste polonaise, le crime organisé à l’époque communiste ou encore l’histoire du sport.
L’année dernière, Moscou a ajouté ce nationaliste sur sa liste de personnes recherchées en raison de ses démarches destinées à déboulonner des monuments de l’ère soviétique en Pologne.

Auteur sous pseudonyme
Karol Nawrocki est l’auteur de plusieurs livres, dont un sous un nom de plume, ce qui lui a valu des critiques.
En 2018, signant Tadeusz Batyr, il a publié un ouvrage consacré à un gangster de l’ère communiste, Nikodem Skotarczak.
La même année, l’auteur présenté comme Tadeusz Batyr est apparu à la télévision d’Etat, le visage flouté et la voix modifiée, déclarant que M. Nawrocki l’avait inspiré dans son travail.
Karol Nawrocki a à son tour écrit sur les réseaux sociaux que Tadeusz Batyr lui avait demandé des conseils. « Il m’a remercié en m’offrant un livre intéressant que je recommande », a-t-il ajouté.
Les médias ont découvert finalement que MM. Batyr et Nawrocki n’étaient qu’une seule et même personne.
Accusé également d’entretenir des liens avec des gangsters et des néonazis, il a qualifié ces allégations de « manipulation », évoquant des contacts rares et limités à des fins professionnelles.
« Personne n’a jamais entendu un mot positif de ma part sur le nazisme », a-t-il lancé.
Karol Nawrocki parle l’anglais et fait de la boxe à ses heures perdues. Il a deux enfants avec son épouse Marta.