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Analyse

Pour les alliés arabes de Washington, aucun intérêt à critiquer le plan de paix

Selon un expert israélien, plusieurs pays arabes n'ont pas cru bon de critiquer l'initiative ; selon un analyste palestinien, il est trop tôt pour se prononcer sur les réactions

Le président américain Donald Trump, le roi Salman bin Abdulaziz al-Saud d'Arabie saoudite, le roi de Jordanie Abdallah II, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et d'autres responsables prennent la pose pour une photo durant le sommet entre les Etats-Unis et le monde musulman au centre de conférences du roi Abdulaziz à Riyadh, le 21 mai 2017. (Crédit : Mandel NGAN/AFP)
Le président américain Donald Trump, le roi Salman bin Abdulaziz al-Saud d'Arabie saoudite, le roi de Jordanie Abdallah II, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et d'autres responsables prennent la pose pour une photo durant le sommet entre les Etats-Unis et le monde musulman au centre de conférences du roi Abdulaziz à Riyadh, le 21 mai 2017. (Crédit : Mandel NGAN/AFP)

Lorsque le Premier ministre Benjamin Netanyahu s’est engagé à annexer la vallée du Jourdain en septembre dernier, s’il était reconduit dans ses fonctions, les gouvernements arabes alliés aux Etats-Unis se sont immédiatement joints aux Palestiniens pour – vivement – dénoncer cette déclaration.

La cour royale d’Arabie Saoudite avait qualifié la déclaration de Netanyahu d’“escalade très dangereuse aux dépens du peuple palestinien”, ajoutant qu’elle représenterait « une violation claire de la Charte des Nations unies et des normes internationales ».

Le ministère des Affaires étrangères du Bahrein avait lui qualifié la remarque du Premier ministre de « violation flagrante et inacceptable des droits du peuple palestinien ».

Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman Safadi, avait déclaré qu’elle visait à « faire voler en éclats les fondements du processus de paix ».

Et le ministère des Affaires étrangères du Qatar avait affirmé qu’elle constituait « une extension de la politique de l’occupation consistant à violer les lois internationales et à employer des méthodes méprisables pour déloger le peuple palestinien frère ».

Mais mardi et mercredi, une fois que l’administration américaine eut enfin  dévoilé son plan pour tenter de résoudre le conflit israélo-palestinien, qui prévoit aussi de placer la vallée du Jourdain sous souveraineté israélienne, la plupart des gouvernements arabes ont clairement adopté un ton sensiblement différent.

Bien que leurs déclarations n’aient pas exprimé un soutien à part entière au plan, ils ne l’ont pas non plus rejeté d’emblée ni formulé de critiques directes à son égard.

En revanche, les Palestiniens ont vivement critiqué l’initiative américaine, le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas l’ayant qualifiée de « gifle du siècle » et ayant promis que le peuple palestinien « l’enverra aux poubelles de l’histoire ».

Le ministère saoudien des Affaires étrangères a déclaré que Ryad « réitère son soutien à tous les efforts visant à parvenir à un règlement juste et global de la cause palestinienne » et « apprécie les efforts de l’administration du président [Donald] Trump pour élaborer un plan de paix global ». Il a également déclaré que le royaume du Golfe « encourage l’ouverture de négociations de paix directes entre les parties palestinienne et israélienne, sous les auspices des États-Unis, et à résoudre les désaccords avec certains aspects du plan à travers la négociation ».

Un berger palestinien rassemble son troupeau près de l’implantation israélienne d’Argaman, dans la vallée du Jourdain, une bande de terre en Cisjordanie le long de la frontière avec la Jordanie, 26 décembre 2016. (AP Photo/Oded Balilty)

Le ministère des Affaires étrangères du Bahreïn a déclaré que Manama « affirme … son soutien à tous les efforts visant à parvenir à une solution juste et globale du conflit, qui conduise à la restauration de tous les droits légitimes du peuple palestinien et à la création d’un État palestinien indépendant ».

Les Émirats arabes unis ont apparemment publié la déclaration la plus élogieuse, qualifiant le plan d’“initiative sérieuse”, précisant qu’il « offre un point de départ important pour un retour aux négociations dans un cadre international dirigé par les États-Unis ».

Entre-temps, le Qatar et la Jordanie ont fait des déclarations plus fermes, mais ils se sont également abstenus de réprimander spécifiquement le plan.

Le Qatar a déclaré qu’il saluait « tous les efforts visant à une paix durable et juste » et « apprécie les efforts du président Trump et de l’actuelle administration américaine pour trouver des solutions au conflit israélo-palestinien ». L’émirat du Golfe a également déclaré que « la paix ne peut être durable si les droits des Palestiniens dans leur État souverain à l’intérieur des frontières de 1967, y compris Jérusalem-Est, et le droit au retour, ne sont pas préservés ».

Safadi, le ministre jordanien des Affaires étrangères, a exprimé son soutien à la création d’un État palestinien sur les lignes de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale et a mis en garde contre « les conséquences dangereuses des mesures israéliennes unilatérales, telles que l’annexion de terres palestiniennes, la construction et l’expansion de sites israéliens illégaux… et les empiètements sur les lieux saints à Jérusalem ».

Aucun intérêt à critiquer

Eldad Shavit, chercheur principal au sein du groupe de réflexion de l’Institute for National Security Studies à Tel Aviv, a déclaré que de nombreux États arabes ont choisi de ne pas critiquer directement le plan parce qu’ils n’y trouvaient aucun intérêt à le faire.

« Ils veulent certainement maintenir de bonnes relations avec les États-Unis », a déclaré M. Shavit, qui était à la fois un haut fonctionnaire des services de renseignements militaires de l’armée israélienne et du bureau du Premier ministre. « Ils savent aussi que ce plan pourrait rester sur les tablettes et ne jamais être mis en œuvre. Ils pensent donc qu’ils n’ont pas beaucoup à gagner à le critiquer explicitement maintenant ».

En plus de placer la vallée du Jourdain sous souveraineté israélienne, le plan prévoit la création d’un État palestinien dans environ 70 % de la Cisjordanie, une petite poignée de quartiers à Jérusalem-Est, la majeure partie de la bande de Gaza et certaines zones du sud d’Israël – à condition que les Palestiniens reconnaissent Israël comme un État juif et que le Hamas et les autres groupes terroristes de la bande de Gaza déposent les armes.

Le président américain Donald Trump et le premier ministre Benjamin Netanyahu (à droite) assistent à une conférence de presse dans la salle Est de la Maison Blanche, le 28 janvier 2020. (Alex Wong/Getty Images/AFP)

Il prévoit également d’autoriser Israël à annexer des implantations, d’accorder à l’État juif un contrôle de sécurité prioritaire à l’ouest du Jourdain et d’interdire aux Palestiniens d’entrer en Israël en tant que réfugiés.

Shavit, cependant, a noté qu’il pense que plusieurs pays arabes changeraient leur discours sur le plan, si Israël venait à l’utiliser pour annexer unilatéralement des parties de la Cisjordanie.

« Je crois que les États-Unis ont promis à ces pays qu’Israël ne prendrait pas de mesures unilatérales et qu’il y aurait des négociations », a-t-il déclaré. « Si cela change et qu’Israël opte pour l’annexion, par exemple, je pense que nous verrons ces pays adopter une ligne différente ».

M. Netanyahu avait initialement déclaré mardi qu’il voulait soumettre au vote dimanche prochain une proposition visant à annexer certaines parties de la Cisjordanie, mais le ministre du Tourisme, Yariv Levin, a laissé entendre mercredi que cela ne se ferait pas.

Levin a déclaré qu’il y avait encore plusieurs obstacles bureaucratiques à franchir, notamment « soumettre la proposition au procureur général et le laisser examiner le dossier ».

Interrogé sur la perspective de l’annexion imminente par Israël de territoires en Cisjordanie, Jared Kushner, conseiller principal de Trump, a déclaré mercredi : « L’espoir est qu’ils attendent jusqu’après l’élection, et nous travaillerons avec eux pour essayer de trouver une solution. »

L’Iran l’emporte sur la Palestine

Uzi Rabi, le directeur du Centre Moshe Dayan pour les études du Moyen Orient à l’Université de Tel Aviv, a déclaré qu’il pensait que de nombreux pays arabes n’avaient pas explicitement rejeté le plan parce que les États-Unis les avaient consultés à ce sujet.

« Ils savent qu’ils ne peuvent pas s’opposer de manière virulente à un plan que les Américains ont discuté et élaboré avec eux », a-t-il déclaré. « S’ils le faisaient, ils provoqueraient des tensions avec les Américains et ils ne le souhaitent pas du tout ».

Depuis l’entrée en fonction de M. Trump en 2016, M. Kushner et d’autres hauts responsables américains ont souvent rencontré des responsables arabes pour discuter du conflit israélo-palestinien. Le Bahreïn a même accueilli le lancement de la partie économique du plan en juin.

Les Palestiniens protestent contre le plan de paix au Moyen-Orient annoncé mardi par le président américain Donald Trump, à Bethléem, en Cisjordanie, le mercredi 29 janvier 2020. (Crédit : AP / Mahmoud Illean)

M. Rabi a également fait valoir que la plupart des réponses des pays arabes du Golfe persique indiquent qu’ils estiment que les activités régionales de l’Iran priment sur le conflit israélo-palestinien.

« Leurs réactions montrent clairement que leur première priorité dans la région est l’Iran. Ils ne veulent pas prendre de mesures qui pourraient contrarier les États-Unis et compromettre leurs chances de faire face aux menaces iraniennes », a-t-il déclaré. « Ils ne croient tout simplement pas qu’il y ait une grande valeur stratégique à investir des efforts dans la question palestinienne ».

Les pays arabes du Golfe, en particulier l’Arabie Saoudite, les EAU et le Bahreïn, considèrent l’Iran comme un ennemi régional majeur et s’opposent fermement à son soutien aux groupes armés dans tout le Moyen Orient.

Daoud Kuttab, un analyste palestinien basé à Amman qui écrit pour Al-Monitor et dirige une station de radio locale, a déclaré qu’il était d’accord avec le fait qu’un grand nombre d’États arabes souhaitent maintenir des relations positives avec les États-Unis, mais a averti qu’il était peut-être trop tôt pour juger pleinement de leur réaction au plan.

« Ce sont des réponses très diplomatiques. Ils comprennent le fonctionnement de Trump et ne veulent pas le mettre en colère », a-t-il déclaré. « Mais je pense qu’il est trop tôt pour dire que nous avons vu leur réponse complète. Il sera important de voir ce qu’ils diront à la Ligue arabe ce week-end ».

La Ligue arabe doit se réunir en présence d’Abbas pour discuter de ce plan.

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