« Quand la République est fragile, la situation des Juifs est compliquée »– Korsia
Afin de lutter contre l'antisémitisme, le grand-rabbin de France appelle à "renforcer la République", permettant ainsi de "renforcer le statut de chacun et chacune, dont les Juifs"
Invité par la radio RTL mercredi dernier à l’occasion de la sortie de son nouvel ouvrage, Réinventer les aurores (Fayard), le grand-rabbin de France Haïm Korsia s’est alarmé des divisions au sein de la société française et de la situation des Juifs de France.
« Quand nous avons tous marché dans les rues de France en janvier 2015, après les assassinats de Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher et de policiers, on s’est dit : ‘Il faut qu’on retrouve quelque chose de notre envie de vivre ensemble, tous ensemble, pour construire la société’ – c’est-à-dire construire la République. Et donc il faut réinventer les aurores, les espérances, donc la République », explique-t-il.
« Pour un Juif, la République, c’est l’espérance, dit-il. (…) Mais à chaque fois que la République est fragile, la situation des Juifs est compliquée, l’antisémitisme à visage ouvert se poursuit. »
Au sujet de l’antisémitisme, Haïm Korsia refuse de définir la France comme antisémite. « La France n’est pas antisémite. Mais quand la République tombe, comme en 1940, le statut des Juifs est catastrophique. »
Selon lui, la population juive française « constate que, malgré toute la volonté des pouvoirs publics, il y a une recrudescence des actes antisémites, parce qu’il y a une libération de la parole, parce que la haine sur Internet est dite quasiment sans contrôle ».
Afin d’y faire face, il appelle ainsi à « renforcer » la République : « Plus on renforce la République, plus on renforce le statut de chacun et chacune dans le pays, dont les Juifs. » Selon lui, afin de luter contre « ce virus mutant qu’est l’antisémitisme, il faut aussi muter les façons de lutter contre l’antisémitisme ».
Le grand-rabbin de France a également dénoncé les actes antisémites à travers l’Europe, et plus particulièrement ceux constatés lors du récent carnaval d’Alost, en Belgique.
Le responsable religieux dit comprendre les tensions et les désespoirs de la population française – notamment ceux des « Gilets jaunes », mouvement marqué par plusieurs méfaits antisémites liés à l’extrême gauche comme à l’extrême droite. « Tout sytème a tendance à faire qu’il y a des gens qui se trouvent au-dessus et d’autres en dessous. L’idée n’est pas de dire que tout le monde doit être au même niveau – ça s’appelle le fascisme. L’idée, c’est que chacun ait une marge de progression et une marge de construction. »
Dans son interview, Haïm Korsia est également revenu sur le port du voile par les femmes musulmanes et sur la polémique qui avait secoué la société française il y a quelques mois, quand une femme voilée avait accompagné une classe au conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, déclenchant les foudres d’un responsable du Rassemblement national. « Sans ces mamans musulmanes (…) qui portent le foulard, il n’y a pas de sortie scolaire. Il n’y a pas de prosélytisme avec ça. » Il reconnait néanmoins que le voile est « sorti de l’espace religieux pour entrer dans l’espace politique, mais quand ces braves mamans (…) viennent et veulent aider, c’est compliqué de lui mettre ces conditions ».
À l’occasion de la parution de Réinventer les aurores, Haïm Korsia sera en rencontre et dédicace le mercredi 18 mars 2020 à 18h à la Fnac Bercy Village (49/53 Cour Saint-Emilion, 75012 Paris). Le 16 mars, il sera présent à partir de 19h45 à l’espace Alfred Zemmour de Boulogne-Billancourt (43, rue des Abondances) pour un cocktail et une conférence (réservation obligatoire par mail : contactccj92@gmail.com).