Rencontre entre le ministre turc des Affaires étrangères et Mahmoud Abbas
Selon Mevlut Cavusoglu, le soutien apporté par la Turquie aux Palestiniens ne sera pas touché par les liens avec Israël et ils n'affectent en rien le positionnement turc
Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a accueilli le ministre turc des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu, mardi soir à Ramallah, pour une rare visite avant des rencontres prévues entre le diplomate en déplacement et de hauts-responsables israéliens, mercredi.
Le ministre turc est actuellement en déplacement pour quarante-huit heures en Israël et en Cisjordanie. La visite de Cavusoglu est la toute première de la part d’un ministre turc des Affaires étrangères en l’espace de quinze ans, dans le cadre d’une initiative prise par le président Recep Tayyip Erdogan de réparer les liens avec l’État juif.
Au cours d’une conférence de presse qui a eu lieu mardi matin à Ramallah, Cavusoglu a souligné que la relation d’Ankara avec Jérusalem n’aurait aucun impact sur son positionnement en faveur de la cause palestinienne.
« Notre coordination avec la partie palestinienne est distincte de notre relation avec Israël. Notre politique à l’égard des Palestiniens ne changera pas », a dit Cavusoglu.
Cavusoglu s’est rendu directement à Ramallah pour présider une commission consacrée aux relations bilatérales conjointes et pour rencontrer le ministre des Affaires étrangères de l’AP, Riyad Al-Maliki.
Le chef de la diplomatie turque a annoncé mardi à Ramallah une série de nouveaux accords pour soutenir l’économie palestinienne en difficulté et a signé neuf nouveaux accords avec l’Autorité palestinienne, notamment dans les domaines de l’agriculture, de l’éducation et du commerce. Cavusoglu a souligné le soutien apporté par Ankara à la construction d’une zone industrielle prévue à Jénine.
« Les instructions ont été données et il n’y a pas de raison de reporter ce projet », a-t-il déclaré, annonçant également comme objectif des échanges bilatéraux annuels de 2 milliards de dollars et promettant davantage de bourses aux Palestiniens pour étudier en Turquie.
La Banque mondiale a appelé au début du mois la communauté internationale à accroître son aide à l’Autorité palestinienne, confrontée à une crise budgétaire.
Le ministre palestinien des Affaires étrangères a qualifié « d’historique » la visite de son homologue turc, mettant en avant la « relation particulière entre les deux pays ».
La Turquie et Israël ont initié un rapprochement, ces derniers mois, Ankara cherchant à rompre son isolement régional croissant. Le président israélien Isaac Herzog s’est rendu en Turquie au mois de mars et il s’y est entretenu avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.
Si Ramallah a fustigé les États de la région en quête de relations plus étroites avec Israël, l’Autorité palestinienne a adopté une approche plus mesurée face à la Turquie.
« Je ne pense pas que les relations entre les Turcs et les Israéliens auront un impact négatif sur les Palestiniens. C’est complètement le contraire : le positionnement turc en faveur des Palestiniens aura un effet positif », a commenté Ahmad al-Deek, diplomate de l’Autorité palestinienne.
Al-Deek a ajouté qu’Abbas et les autres responsables palestiniens demanderaient au ministre en visite d’exercer des pressions sur Israël de manière à « cesser de se livrer à tout incident susceptible d’entraîner une forme d’escalade ».
Les tensions entre Israël et les Palestiniens se sont encore accrues, ces derniers mois. Une vague terroriste meurtrière en Israël a fait 19 morts dans les villes israéliennes. Les Palestiniens et la police israélienne se sont affrontés de manière répétée sur le lieu saint du mont du Temple à Jérusalem, au mois d’avril, attisant les craintes d’une possible escalade.
De plus, une marche organisée par les Juifs nationalistes dans la Vieille Ville de Jérusalem, dimanche, laisse craindre un nouveau pic des tensions. La dite « marche des drapeaux » a lieu, chaque année, à la date-anniversaire de la capture par Israël de Jérusalem-Est à la Jordanie, pendant la guerre de 1967.
« Le message transmis à Israël sera le suivant : cessez toute forme d’escalade dans le conflit, qu’il s’agisse des incursions de l’armée ou des fusillades, des attaques de la part des partisans du mouvement pro-implantation, des raids à Al-Aqsa ou de la marche des drapeaux », a indiqué al-Deek, qui est un conseiller politique d’al-Maliki, au Times of Israel.
Mercredi, Cavusoglu doit rencontrer le ministre des Affaires étrangères Yair Lapid. Les deux hommes prendront publiquement la parole peu avant midi.
Cavusoglu déjeunera ensuite avec le ministre du Tourisme Yoel Razvozov, puis il se dirigera vers la Vieille Ville de Jérusalem pour une visite privée et pour un déplacement sur le mont du Temple.
Le président Isaac Herzog et Cavusoglu avaient annoncé le voyage du chef de la diplomatie turc en Israël au mois de mars, quand Herzog se trouvait à Ankara.
Alliés régionaux solides dans le passé, l’État juif et la Turquie avaient vu leurs liens s’effilocher pendant le long mandat d’Erdogan. Le président turc est depuis longtemps un critique fervent des politiques appliquées par Israël à l’égard des Palestiniens.
Israël, pour sa part, fustige depuis longtemps les relations chaleureuses qui unissent Erdogan et le Hamas, le groupe terroriste qui contrôle la bande de Gaza. La Turquie accueille des responsables du Hamas et elle soutient financièrement l’organisation.