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Résultats des législatives : Réactions des personnalités juives de France

À l'issue du second tour des élections législatives, Yonathan Arfi a redit avec force que LFI n'avait pas sa place au gouvernement

Des gens brandissent les drapeaux tricolores français alors que des feux d'artifice illuminent le ciel lors d'un rassemblement nocturne après les premiers résultats du deuxième tour des élections législatives françaises, place de la République à Paris, le 7 juillet 2024. (Crédit : Emmanuel Dunand/AFP)
Des gens brandissent les drapeaux tricolores français alors que des feux d'artifice illuminent le ciel lors d'un rassemblement nocturne après les premiers résultats du deuxième tour des élections législatives françaises, place de la République à Paris, le 7 juillet 2024. (Crédit : Emmanuel Dunand/AFP)

Si les résultats du second tour des législatives ont défié tous les pronostics, ils ont d’abord apporté un soulagement aux organisations et personnalités juives de France, pour qui la perspective d’une majorité absolue de députés du Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen à l’Assemblée représentait un véritable scénario catastrophe.

Néanmoins, leur soulagement a été de courte durée. L’écrasante majorité d’entre eux avait adopté une posture de « ni-RN ni-LFI », or la victoire du Nouveau Front populaire (NFP) controversé, au sein duquel la France insoumise avec ses 74 sièges est devenue la première force d’extrême-gauche, inquiète.

Aucun parti n’a obtenu la majorité absolue lors du second tour des élections législatives en France dimanche, où les 577 sièges de l’Assemblée nationale étaient en jeu. Le NFP a remporté 180 sièges avec 7 millions de voix, tandis que la majorité présidentielle en a obtenu 159 avec 6,6 millions de voix. Le RN qui a certes remporté le plus de voix (plus de 10,1 millions de votes) a remporté « seulement » 143 sièges en raison du mode de scrutin et des triangulaires.

« Nous aurons un Premier ministre du Nouveau Front populaire », a posté Jean-Luc Mélenchon, le chef de la France insoumise (LFI) sur X dans la nuit de dimanche à lundi. « Nous pourrons décider de beaucoup de choses par décret. Sur le plan international, nous devrons accepter de reconnaître l’État de Palestine ».

Jean-Luc Mélenchon (au centre), leader du parti de gauche La France Insoumise (LFI), membre de la coalition de gauche Nouveau Front populaire (NFP), entouré de l’avocate franco-palestinienne et députée européenne Rima Hassan (centre-droite) et du député LFI Manuel Bompard (centre-gauche) prononçant un discours après l’annonce des résultats du premier tour des élections législatives, à La Faïencerie, à Paris, le 30 juin 2024. (Crédit : Dimitar Dilkoff/AFP)

Mélenchon avait qualifié dans un discours de 2017 les Juifs français de « minorité arrogante qui fait la morale aux autres. » Dans un autre discours, il avait célébré les manifestants anti-israéliens quelques jours après que certains d’entre eux eurent pris d’assaut une synagogue, condamnant dans ce discours uniquement les Juifs français qui avaient manifesté leur solidarité avec Israël.

Tout au long de la campagne pour les élections législatives, le président du Crif a réaffirmé la position de l’institution : « Ni RN, ni LFI : le front républicain doit battre le RN sans compromission avec LFI ». À l’issue du second tour des élections législatives, Yonathan Arfi a redit avec force que LFI n’avait pas sa place au gouvernement.

Arfi a souligné au micro de RCJ, la nécessité pour les démocrates et républicains d’apprendre à travailler ensemble pour ne pas laisser LFI obtenir « la victoire après les urnes, qu’il n’ont pas eu dans les urnes ». « Je comprends les inquiétudes des Français juifs et je les partage […] chaque député de LFI est un député élu de trop. […] Mais la majorité des députés élus hier soir n’appartient ni au RN ni à LFI. […] Jean-Luc Mélenchon n’a pas de majorité et n’est pas en mesure de former un gouvernement. »

Le RN a lui été fondé en 1972 par Jean-Marie Le Pen, condamné à plusieurs reprises pour discours de haine antisémite et négationnisme, et par Pierre Bousquet, ancien commandant de la Waffen-SS du parti nazi.

L’ancienne présidente du groupe parlementaire français d’extrême droite du Rassemblement national, Marine Le Pen, prononçant un discours lors de la soirée de résultats du premier tour des élections législatives, à Henin-Beaumont, dans le nord de la France, le 30 juin 2024. (Crédit : Crédit : François Lo Presti/AFP)

Depuis que Marine Le Pen, la fille de Jean-Marie Le Pen, a pris la tête du parti en 2011, elle a entrepris une tentative de dédiabolisation du parti pour gagner le soutien du grand public. Elle a assuré avoir pris ses distances avec la rhétorique antisémite de son père et l’a exclu du parti en 2015. Elle s’est ensuite focalisée sur les musulmans, qui représentent 11 % de la population française, et qu’elle considère comme une menace pour le pays.

Cependant, bien que Marine Le Pen ait publiquement dénoncé l’antisémitisme, son proche entourage et nombre de ses partisans sont largement accusés de défendre des positions antisémites, homophobes et xénophobes de manière disproportionnée, selon les experts.

De son côté, l’extrême-gauche de Mélenchon a fait de la cause palestinienne un élément central de sa campagne. Peu après les premiers résultats du premier tour des élections législatives anticipées, plaçant largement en tête le RN (34 % des voix), Mélenchon, avait été l’un des premiers responsables politiques à intervenir et à prononcer son discours. Derrière lui, sur sa droite, se tenait son premier lieutenant, Manuel Bompard, qui avait été réélu député des Bouches-du-Rhône. Plus étonnante était la présence de Rima Hassan, députée européenne, sur sa gauche, qui n’était ni candidate aux législatives et qui n’assume aucune responsabilité au sein de LFI. La présence de l’activiste anti-Israël s’expliquait plutôt par sa notoriété dans la galaxie insoumise. Elle est l’égérie d’une stratégie controversée basée sur l’idée de transformer les différents scrutins en un référendum sur Gaza et en important encore plus le conflit en France.

De son côté, la Licra, affirme que « la France a dit non au populisme d’extrême-droite. Elle devra affaiblir le populisme d’extrême-gauche », avant de conclure par « ni Duce, ni Lider Maximo », en référence au dictateur fasciste italien et à un titre porté par des leaders de gauche radicale en Amérique latine, dont Fidel Castro.

Des partisans du parti socialiste français de gauche (PS) regardant un écran affichant les premiers résultats du second tour des élections législatives françaises lors de la soirée électorale du parti, à Paris, le 7 juillet 2024. (Crédit : Stephane De Sakutin/AFP)

Le collectif « Nous vivrons », né au lendemain du pogrom du 7 octobre, a lui aussi nuancé son propos en déclarant que « le front républicain a gagné. […] Victoire ! Oui, mais pas à n’importe quel prix. Et certainement pas à celui du sacrifice des Français juifs. Au Nouveau Front populaire, prenez vos responsabilités républicaines ! Sortez la France insoumise et redonnez-nous de l’espoir ».

« Le Rassemblement national a perdu. La France insoumise aussi et obtient moins de députés qu’en 2022, » a déclaré l’Union des étudiants juifs de France.
« Aucune coalition ne peut ni ne doit se faire avec ceux qui n’ont cessé de propager l’antisémitisme depuis des mois ». « Si la gauche républicaine persiste à s’associer avec LFI, ce serait trahir ses engagements et le vote des Français ». « Nous continuons à nous battre contre toutes formes de racisme et d’antisémitisme, sans aucune tolérance ni hiérarchisation ».

Arno Klarsfeld, le fils du célèbre couple de chasseurs de nazis Serge et Beate Klarsfeld, s’était exprimé pendant l’entre-deux-tours en expliquant que « l’antisémitisme mute ». « Aujourd’hui, il est à l’extrême-gauche » avait-il conclu. Son père, Serge Klarsfeld, avait créé la polémique en affirmant qu’en cas de duel au second tour entre LFI et le RN, il choisirait le parti de Marine Le Pen.

Le philosophe Raphaël Enthoven, très actif depuis le début de la campagne pour dénoncer l’antisémitisme de tout bord, estime qu’il « existe une majorité, de la droite de Glucksmann à la gauche de Ciotti ». « C’est le seul consensus qui permette d’éviter les fous ».

« La gauche à nouveau kidnappée par l’infâme Mélenchon. Accents factieux. Haine de la République aux lèvres. Autour de lui, à cet instant, quelques unes des incarnations du nouvel antisémitisme. Moment glaçant. Une tâche : continuer le combat contre ces gens », a recommandé le philosophe juif français Bernard-Henri Lévy sur X.

Le politologue Jean-Yves Camus avait déclaré avant le vote qu’il se sentait « piégé » par l’extrême gauche, d’autant plus que les socialistes, plus modérés, ont formé une coalition avec le parti de Mélenchon. « Nous sommes très en colère et déçus », a déclaré Camus. « En tant que Juifs, nous nous sentons trahis et nous pensons qu’il aurait été préférable que le parti socialiste ne conclue pas ce type d’alliance avec l’extrême gauche. » « Que faire si vous êtes dans une circonscription où il n’y a pas de candidat modéré et que vous avez le choix entre le parti de Mélenchon et le Rassemblement national », a déclaré Camus avant le vote. « Que faites-vous ? Vous restez à la maison ? Et vous dites simplement que cela ne vous regarde pas ? »

« On ne peut pas être soulagé avec le Front national qui a augmenté, avec LFI qui est présent même s’il a baissé. C’est l’une des grandes escroqueries de ce scrutin où LFI crie victoire alors qu’ils ont moins de députés qu’à la législature précédente, » a déclaré le grand rabbin de France, Haïm Korsia. « Il n’y a aucune raison de désespérer, de paniquer parce que forcément, le gouvernement, quel qu’il soit, sera construit avec des gens raisonnables qui ont à cœur de défendre les valeurs de la République ». « Il y a des députés antisémites ». « Tant qu’on ne reconnaît pas la pulsion génocidaire du Hamas, on ne reconnaît pas un crime antisémite et c’est donc de l’antisémitisme ». « Il faut expliquer pourquoi on en est arrivé là […], pourquoi une campagne a pu se focaliser sur l’antisémitisme et, pour les européennes, sur la situation à Gaza, ce qui était un vol de démocratie ». « Je pense qu’on a compris qu’il ne peut pas y avoir de gouvernement en France avec LFI. C’est dangereux. Il n’y aura pas de Front national non plus, » a-t-il poursuivi.

Moshe Sebbag, rabbin de la synagogue de la Victoire, a déclaré au Times of Israel que « la France ne semble pas avoir d’avenir pour les Juifs » et qu’il conseillait aux jeunes Juifs français de partir en Israël. « Mais les gens de mon âge, qui ont 50 ou 60 ans, ont fait leur vie ici et craignent pour l’avenir de leurs enfants », a-t-il déclaré. Il a précisé que cette évaluation n’était pas due uniquement au succès du bloc de gauche, mais à la banalisation de l’antisémitisme en général en France.

Le président d’Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman, a appelé lundi les Juifs de France à « quitter la France et à immigrer en Israël », précisant qu’il n’y avait « pas de temps à perdre ».

A LIRE : Élection de Raphaël Arnault qui avait salué « la résistance palestinienne » le 7 octobre

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