Un rabbin ultra-orthodoxe ordonne aux étudiants de yeshivot d’ignorer les ordres d’enrôlement

L’un des rabbins ultra-orthodoxes les plus influents d’Israël a publiquement appelé les étudiants de yeshivot à ignorer les ordres de conscription de l’armée israélienne, écrivant qu’ils « ne devraient pas se présenter du tout au bureau de recrutement » lorsqu’ils reçoivent des convocations.

Dans une lettre ouverte publiée vendredi en première page du porte-parole de Degel HaTorah, Yated Neeman, le rabbin Dov Lando, président du Conseil des Sages de la Torah, et l’un des plus éminents rabbins du courant dit « lituanien » de l’ultra-orthodoxie, a publié une série d’instructions visant à minimiser les contacts entre les membres de sa communauté et les forces armées.

Avec le parti hassidique Agoudat Israël, Degel Hatorah est l’une des deux factions qui composent le parti Yahadout HaTorah de la coalition.

Selon le rabbin Lando, il est interdit aux étudiants de yeshivot de parler aux représentants de l’armée. Ceux qui ont été déclarés réfractaires au service militaire et sont susceptibles d’être arrêtés doivent éviter tout contact avec les autorités et ceux qui cherchent à voyager à l’étranger doivent d’abord clarifier leur statut auprès du Vaad HaYeshivot (Comité des Yeshivot) – le principal organe de coordination de la communauté haredim entre les yeshivas ultra-orthodoxes et le ministère de la Défense en matière de reports de service.

Une récente enquête du Times of Israel a révélé que la commission, dont le rabbin Lando est membre, conseillait aux étudiants des yeshivot qui contactaient sa ligne d’assistance de « ne pas se présenter en aucun cas et de ne pas coopérer » avec les autorités.

En vertu de la loi israélienne, quiconque incite d’autres personnes à se soustraire au service en temps de guerre est passible d’une peine d’emprisonnement de 15 ans.

L’armée a déclaré qu’elle était confrontée à une pénurie de main-d’œuvre et qu’elle avait actuellement besoin de quelque 12 000 nouveaux soldats, dont 7 000 seraient des combattants.

La une du Yated Neeman, journal du parti Degel HaTorah, présentant une lettre du rabbin Dov Lando appelant les étudiants de la yeshiva à ignorer les ordres d’enrôlement, 28 mars 2025. (Capture d’écran)

Dans sa lettre, le rabbin Lando a ordonné aux réfractaires qui ne parviennent pas à éviter une rencontre avec la police de demander conseil à Shlomo Brilant, un homme politique de Degel HaTorah à la municipalité de Beit Shemesh dont la ligne d’assistance téléphonique « Lemneaakha » (littéralement ‘pour votre bien’) a été récemment mise en place sur ordre du rabbin Lando.

Dans un prospectus distribué le mois dernier dans les groupes WhatsApp haredim, Lemneaakha a également ordonné aux étudiants des yeshivot de ne pas se présenter au bureau de recrutement de l’armée israélienne « pour quelque raison que ce soit ».

Un porte-parole du dirigeant du Degel HaTorah, le député Moshe Gafni, n’a pas répondu à la question de savoir si son parti approuvait officiellement les instructions du rabbin Lando.

« Les déclarations effrontées et continues des dirigeants haredim sont la meilleure preuve qu’ils se considèrent au-dessus des lois, et vu la façon dont ils sont traités par Netanyahu et ses partenaires, on peut comprendre comment ils en sont arrivés à cette conclusion », a déclaré dimanche Uri Keidar, directeur exécutif du groupe de défense du pluralisme religieux Israel Hofsheet (Be Free Israel), au Times of Israel.

« Nous continuerons à nous battre pour un partage équitable du fardeau, aux côtés de la grande majorité des Israéliens patriotes », a-t-il ajouté.

La lettre du rabbin Lando fait écho à une précédente missive publiée en première page du Yated Neeman en juillet dernier, dans laquelle il écrivait également que les étudiants des yeshivot ne devraient « pas se présenter du tout aux bureaux de recrutement de l’armée israélienne ».

« La situation actuelle est la suivante : les tribunaux ont déclaré la guerre au monde de la Torah, et ce sont eux qui ont ouvert un front et sont venus changer un arrangement qui existe depuis des années, ordonnant à l’armée de commencer le processus de recrutement des membres des yeshivot », a-t-il affirmé, à la suite d’une décision historique de la Haute Cour de justice mettant fin à des décennies d’exemptions pour les ultra-orthodoxes.

En février, le site Internet ultra-orthodoxe Kikar HaShabbat a cité le rabbin Lando déclarant que le peuple juif était protégé par l’étude des étudiants des yeshivot et que les juifs nationalistes religieux qui tombaient au combat « étaient tués parce que nous n’étudions pas suffisamment ».

Un jeune ultra-orthodoxe arrêté par la police lors d’émeutes à un rassemblement contre la conscription des haredim dans Tsahal, à Jérusalem, le 27 mars 2025. (Crédit : Chaim Goldberg/Flash90)

« Ils sont tués parce que leurs rabbins leur enseignent une Torah déformée », a-t-il affirmé.

Les dirigeants de la communauté ultra-orthodoxes s’opposent avec véhémence à ce que les jeunes hommes haredim servent dans l’armée, craignant qu’ils ne soient sécularisés.

Depuis la décision de la Haute Cour de justice en juin dernier, de multiples initiatives affiliées à diverses factions haredim ont vu le jour pour les guider dans leur nouvelle réalité post-exemption – et les encourager à ignorer les ordres d’enrôlement dans l’armée israélienne.

Il s’agit notamment d’une ligne de conseil liée au ministre des Affaires de Jérusalem, Meir Porush, qui, selon une récente enquête du Times of Israel, conseillait aux appelants de « simplement ignorer » les convocations au bureau de recrutement de l’armée israélienne.