Israël en guerre - Jour 426

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A Cannes, un film sur la Shoah ou la banalité du mal

"The Zone of Interest" se focalise sur des scènes de vie ordinaire qui rendent encore plus terrifiante la réalité de l'autre côté du mur

Le réalisateur britannique Jonathan Glazer. (Crédit : Capture d’asana YouTube / Film4)
Le réalisateur britannique Jonathan Glazer. (Crédit : Capture d’asana YouTube / Film4)

Auschwitz, vu de l’autre côté du mur : l’horreur de la Shoah tient au fait qu’elle a été perpétrée « non pas par des monstres, mais par des gens comme les autres », selon Jonathan Glazer, qui a présenté vendredi « The Zone of Interest » à Cannes.

Le réalisateur britannique fait son retour avec un quatrième long-métrage, portrait glaçant du commandant d’Auschwitz Rudolf Höss et sa famille, goûtant aux plaisirs de la vie dans leur maison jouxtant le camp de la mort.

Ce personnage – qui a réellement dirigé le camp pendant plus de trois ans et pris l’initiative d’en augmenter les capacités exterminatrices – tente dans le film, aux côtés de sa femme Hedwig, surnommée « la reine d’Auschwitz », de construire une vie de rêve dans cette maison, dotée d’un jardin fleuri et même d’une piscine, non loin d’une rivière où ils s’amusent parfois avec leurs enfants.

Contrairement à d’autres films sur la Shoah portant sur des actions héroïques ou de survie dans les camps de la mort, ce long-métrage se focalise sur des scènes de vie ordinaire qui rendent encore plus terrifiante la réalité de l’autre côté du mur : le bruit des tirs, celui de l’arrivée des convois de la mort, les cris de détenus.

Rudolf Höss, le commandant d’Auschwitz (Crédit : domaine public)

Tout est deviné, rien n’est montré, sauf la fumée qui se dégage des chambres à gaz.

« Tout a été très bien calibré pour qu’on sente qu’elle est toujours là, cette machine monstrueuse », affirme Jonathan Glazer à l’AFP.

« Des gens ordinaires »

Comment des gens ont-ils pu être aussi impassibles face à l’horreur ?

L’auteur Martin Amis se prépare à prononcer un discours au Texas Book Festival au Capitol à Austin, Texas, le samedi 25 octobre 2014. (Crédit : Jay Janner/Austin American-Statesman via AP)

S’inspirant du roman du même nom de son compatriote Martin Amis et ayant fait des recherches pendant deux ans, Jonathan Glazer s’est rendu compte que les gens derrière l’extermination « étaient juste un groupe de gens du type bourgeois, provincial, ambitieux, des gens ordinaires ».

Ils aiment « avoir une jolie maison, un joli jardin, des enfants en bonne santé, de l’air frais », explique le réalisateur, qui s’est documenté sur la manière de vivre des SS qui régissaient les camps, sur leurs habitudes, pour « comprendre » l’incompréhensible.

« Ça laisse à penser que l’horreur, c’est que ces gens soient non pas des monstres mais des gens comme les autres. Comment des gens comme les autres peuvent-ils agir de la sorte ? » demande-t-il.

La « zone d’intérêt » était l’appellation utilisée par les nazis pour décrire la zone de 40 kilomètres carrés entourant le camp de concentration d’Auschwitz.

« Les Juifs, ils sont de l’autre côté », commente l’un des personnages du film. Des servantes allemandes utilisent des vêtements spoliés, tandis que les enfants du commandant examinent des dents en or.

Seule lueur d’humanité : la résistance incarnée par une fillette polonaise du coin qui, chaque nuit, va semer de la nourriture pour les détenus. Glazer s’est inspiré d’une femme de 90 ans qu’il a rencontrée et qui avait fait exactement la même chose.

Jonathan Glazer, dont le film « Under the Skin » (2013) sur une extra-terrestre venue sur Terre pour faire disparaître des hommes avait été salué par la critique, s’est intéressé au sujet de la Shoah bien avant le roman de Martin Amis, qui a toutefois été un « catalyseur ».

« J’ai grandi dans une famille juive, j’étais entouré de proches et d’amis juifs. On apprend cela dès notre plus jeune âge. C’est comme un livre que vous retirez d’une étagère avec une curiosité d’enfant… Vous commencez à regarder les images et vous vous dites : ils me ressemblent, ils ressemblent à mon oncle, à ma mère. Qui sont-ils ? Pourquoi leur a-t-on fait ça ? », dit-il.

Plus terrifiant encore pour lui est de se demander « comment se serait-on comporté à leur place ? A quel point leur ressemble-t-on ? »

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