À Tel Lakish, un randonneur découvre un fragment de céramique vieux de 2 500 ans
Eylon Levy, conseiller média du président Herzog, a trouvé le fragment, revêtu de la toute première mention en Israël du nom du roi perse Darius I
Un randonneur de passage dans la région des basses terres de Judée, en Israël, a récemment découvert un fragment de céramique vieux de 2 500 ans revêtu du nom du roi perse Darius le Grand, le père du roi Assuérus.
C’est la première fois qu’est découvert en Israël un artefact portant le nom de Darius Ier, a annoncé mercredi l’Autorité des antiquités d’Israël.
Le roi Assuérus serait l’Achashverosh biblique de l’histoire de Pourim, que les Juifs célébreront la semaine prochaine.
La découverte a eu lieu sur le site de l’ancienne ville de Lakish, ville prospère et centre administratif de toute première importance il y a de celà 2 500 ans.
L’inscription, sur le fragment, est une sorte de reçu pour des marchandises reçues ou expédiées.
La céramique est en effet revêtue d’une inscription en araméen disant « Année 24 de Darius », ce qui le situe en 498 avant notre ère.
Darius Ier régna de 522 à 486 avant notre ère, période au cours de laquelle l’Empire perse achéménide se développa rapidement pour englober une grande partie du monde antique.
Mais aucune preuve écrite du règne de Darius n’avait encore été trouvée en Israël.
Le randonneur à l’origine de la découverte n’est autre qu’Eylon Levy, conseiller média international du président Herzog. Il se promenait à Tel Lachish, dans le centre d’Israël, en décembre dernier, lorsqu’il a remarqué une pierre qui semblait porter d’étranges marques.
En y regardant de plus près, il s’aperçoit qu’il s’agissait d’un fragment de poterie portant des sortes d’égratignures ressemblant à des écrits.
« Soudain, mon cœur s’est arrêté », a déclaré Levy au Times of Israel cette semaine.
« De prime abord, j’ai pensé à une blague. Je me suis dit que ce n’était pas possible, que ce n’était pas le genre de choses supposé arriver aux gens qui font de la randonnée », a-t-il expliqué.
Levy dit même avoir regardé autour de lui pour voir s’il n’y avait pas les caméras d’une émission de télé-réalité.
https://www.youtube.com/watch?v=NRxilOHDS3o
En y regardant de plus près, il remarque que l’inscription est profonde, ce qui lui paraît trop élaboré pour être en présence d’un faux.
« Je l’ai immédiatement signalé à l’Autorité des antiquités d’Israël », explique Levy.
« Ils m’ont tout de suite dit que cela avait l’air authentique et intéressant. »
Saar Ganor, de l’AIA, en charge des fouilles à Tel Lakish, s’est entretenu avec Levy à la résidence du président et a pris le fragment en vue d’effectuer des tests.
« J’étais encore un peu méfiant. Je pensais que c’était trop beau pour être vrai », confie Levy.
« Cela paraissait tellement fortuit de trouver cette pièce extraordinaire, qui était à la vue de tous. »
Quelques semaines plus tard, après de multiples analyses de laboratoire, notamment au laboratoire des manuscrits de la mer Morte, Ganor appelle Levy pour lui confirmer que le fragment est authentique.
Un article sur ce fragment sera publié dans la revue de l’Autorité des antiquités d’Israël « Atiqot, vol. 110: The Ancient Written Wor(l)d [Mondes et langues anciens] ».
Voulez-vous un reçu ?
Le fils de Darius Ier, le roi Hishrash (Assuérus, également connu sous le nom de Xerxès en grec), a suivi l’exemple de son père en développant l’empire, au point de régner sur la majeure partie du monde antique « de l’Inde à Coush [l’Éthiopie moderne] », comme le dit le Livre d’Esther.
Le Livre d’Esther, que les Juifs lisent le jour de la fête de Pourim, raconte l’histoire de la cour d’Achashverosh lorsque les Juifs de Perse sont menacés par les projets funestes du conseiller principal d’Achashverosh, Haman.
La reine Esther et son oncle Mordekhaï utilisent alors leur influence auprès du roi pour déjouer le complot d’Haman et sauver le peuple juif.
De nos jours, cette fête est souvent célébrée à grands renforts de costumes et d’alcool.
Levy a trouvé le fragment dans ce qu’il reste du bâtiment de l’administration royale perse à Tel Lakish, qui a fait l’objet de fouilles en 1930 et accueilli depuis des centaines d’archéologues.
Pour les archéologues, ce fragment pourrait avoir été une sorte de note administrative, un reçu établi pour des marchandises ou expédiées.
Lakish se trouvait dans la province d’Edom ou Idumea, dans ce qu’Esdras 4:20 et le Deutéronome 1:7 décrivent comme la province « Au-delà du fleuve » de l’ancien empire perse.
Cette région payait des impôts, parfois sous forme de produits agricoles, au système administratif persan.
« L’expédition archéologique britannique qui a effectué des fouilles à Tel Lachish dans les années 1930 a découvert un bâtiment administratif élaboré de la période perse, construit au sommet du podium de ce qui avait été le palais fortifié des rois de Judée », explique l’épigraphiste [NDLT : Spécialiste des inscriptions gravées] Haggai Misgav, de l’Université hébraïque de Jérusalem, l’un des principaux chercheurs de Lakish.
Le bâtiment administratif comportait à l’origine des salles et des cours, en plus d’une entrée majestueuse dotée de portique à colonnes.
Lakish était une ville cananéenne florissante au deuxième millénaire avant notre ère, et la deuxième ville la plus importante du royaume de Juda après Jérusalem.
La ville figure en bonne place dans l’Ancien et le Nouveau Testament, comme site de batailles avec Josué, Sennachérib et Nabuchodonosor.
En l’an 701 de notre ère, l’armée assyrienne construit une rampe de grande taille de manière à pénétrer et prendre la ville… rampe qui peut aujourd’hui encore être empruntée.
Les experts estiment que l’armée a dû faire venir pas moins de 3 millions de pierres pour bâtir cette rampe.
« Aujourd’hui, seules les bases de piliers sont visibles sur le monticule, car l’expédition britannique a démantelé les restes du bâtiment persan afin de fouiller le palais judéen qui se trouvait en-dessous », ajoute Misgav.
« Curieusement, [le fragment] se trouvait là, à côté de la pergola en bois construite pour les visiteurs », précise Levy.
« C’était là, à la vue de tous depuis tout ce temps. »
Les petits objets peuvent parfois être déterrés et emportés par la pluie, même dans les sites les plus fouillés.
Tel Lakish accueille des dizaines de milliers de visiteurs chaque année, et un nouveau centre devrait ouvrir ses portes dans les mois à venir.
Ce n’est pas la première fois que Lakish abrite une découverte importante.
En effet, en 2015, des chercheurs avaient annoncé la découverte des premières lettres sémitiques écrites connues, datant d’environ 1130 avant notre ère.
« La ville cananéenne de Lakish était l’un des centres les plus importants au monde pour l’utilisation de l’alphabet » et elle a conservé un système d’écriture égalitaire, déclarait alors le professeur Yosef Garfinkel de l’Université hébraïque.
L’an dernier, les archéologues annonçaient la découverte d’une inscription plus ancienne encore – l’une des premières phrases cananéennes jamais mises à jour – sur un peigne à poux en ivoire de l’âge du bronze moyen, datant d’environ 17e siècle avant notre ère.
Des vestiges partout autour de nous
Levy explique que, lorsqu’il fait de la randonnée sur des sites archéologiques en Israël, il aime ramasser des objets, dans l’espoir que ce soit des fragments de poterie ou des vestiges anciens.
Mais jamais il n’avait jusqu’à présent trouvé quelque chose d’unique.
Levy a ajouté que l’ami avec lequel il randonne habituellement, Yakov Ashkenazi, s’était lancé dans une compétition amicale avec lui depuis sa découverte du fragment.
Mais Levy a l’honnêteté de dire que, sans Ashkenazi, il ne serait pas allé à Lakish.
« C’est incroyablement passionnant d’avoir pris part à cette découverte », a déclaré Ashkenazi à l’AIA.
« C’est vraiment spécial, surtout pour quelqu’un comme moi qui suis passionné d’histoire. »
Pour Pourim, Levy envisageait de se déguiser en Indiana Jones, mais il a finalement opté pour Darius Ier.
Se déguiser en fragment de céramique serait beaucoup trop difficile, a-t-il concédé.
Il a hâte de reprendre la randonnée avec Ashkenazi et d’explorer d’autres sites archéologiques.
« Les vestiges de l’histoire juive ancienne et de l’histoire des civilisations mondiales sont partout autour de nous, non seulement dans des sites inexplorés, mais aussi dans les endroits que les gens visitent régulièrement », a ajouté Levy.
« Cela fait partie du plaisir de visiter un site archéologique : vous pourriez bien vous aussi y faire une grande découverte. La prochaine fois que j’irai, je serai certainement beaucoup plus attentif à ce qui se trouve à mes pieds et je garderai les yeux rivés sur le sol. »
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.
Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel