Buenos Aires: 30 ans après l’attentat de l’AMIA, le centre juif dévoile sa nouvelle façade colorée
Un modèle en patchwork, constitué de triangles colorés, a été adopté pour témoigner de l'esprit et des activités diverses du centre communautaire après l'attentat-suicide du Hezbollah et de l'Iran qui, en 1995, avait tué 85 personnes, détruisant le bâtiment

BUENOS AIRES (JTA) — Le centre communautaire juif de l’AMIA, à Buenos Aires, a dévoilé sa nouvelle façade haute en couleurs trente ans après un attentat meurtrier qui l’avait transformé en symbole de destruction.
Cette nouvelle façade est composée de triangles colorés qui forment un modèle de patchwork, enveloppant de multiples parties du bâtiment de huit étages, situé dans le quartier Once. Un design qui veut représenter l’esprit et les activités diverses du centre, a déclaré vendredi son directeur, Daniel Pomerantz, lors de la cérémonie d’inauguration.
Pomerantz travaillait déjà à l’AMIA le 18 juillet 1994 – quand une voiture piégée avait explosé, anéantissant le bâtiment et faisant 85 morts. Des centaines de personnes avaient été blessées alors que l’AMIA se préparait à fêter son centenaire. L’attentat, qui avait été attribué au Hezbollah et à l’Iran, avait été l’attaque antisémite la plus meurtrière depuis la Shoah – et c’était resté le cas jusqu’au massacre commis, l’année dernière, par le groupe terroriste du Hamas dans le sud d’Israël, où les hommes armés ont tué près de 1 200 personnes, des civils en majorité, et où ils ont enlevé 252 personnes, prises en otage dans la bande de Gaza.
« Ces murs remis à neuf entrent dans le cadre du 130e anniversaire du centre », a commenté Pomerantz. « Nous vivons dorénavant deux dates déterminantes – 30 ans se sont écoulés depuis l’attentat à la bombe et le centre compte 130 années de vie. Cette façade artistique témoigne de la diversité de nos activités, de notre intensité et de nos couleurs ».
C’est Daniel Peroni, un artiste argentin, qui a créé « Les Couleurs de l’AMIA » pour combiner au mieux la nouvelle façade et les deux œuvres de premier plan qui avaient été commandées en hommage aux victimes de l’attentat. Quatre ans après l’attaque, l’artiste israélien Yaacov Agam avait dévoilé une statue colorée, installée dans la cour du centre communautaire et qui symbolisait à la fois l’attentat et les valeurs défendues par l’AMIA. Puis, en 2018, l’artiste Martin Ron avait peint une fresque appelée « Le Mur de la Mémoire » pour attirer à nouveau l’attention sur l’attaque alors même que la controverse ébranlait le système politique et judiciaire argentin concernant les commanditaires de cet attentat et les responsabilités qu’ils étaient amenés à assumer.
En 2015, Alberto Nisman, un procureur juif, avait été retrouvé mort dans son appartement. Ce décès était arrivé peu de temps avant qu’il ne soit amené à présenter des preuves laissant penser que la présidente du pays de l’époque, Cristina Fernández de Kirchner, avait couvert l’implication du rôle tenu par l’Iran dans l’attaque. Cela n’avait été qu’au mois d’avril – peu après l’investiture du nouveau président pro-israélien – qu’un tribunal argentin de premier plan avait émis un jugement historique qui attribuait la responsabilité de l’attaque à l’Iran et au Hezbollah.

Pomerantz a noté qu’il avait « une double sensation permanente » en raison de la relation qu’il entretient avec l’AMIA. Il a expliqué qu’il pensait constamment « d’un côté, aux souvenirs, à la douleur, à la soif de justice, à la mémoire de ceux qui avaient disparu ce matin-là et de l’autre, au travail vibrant qui est le nôtre au quotidien ».
Lancé pour apporter du soutien aux immigrants qui arrivent d’Europe, l’AMIA offre des services sociaux, supervise un cimetière juif et organise des activités sociales et pédagogiques (les archives qui se trouvaient dans le bâtiment, avant l’attentat, ont été déplacées ailleurs). C’est l’une des organisations les plus importantes au service de la communauté juive d’Argentine – elle compte à peu près 200 000 membres – et elle vient aussi en aide aux non-Juifs.