Comment va se passer le vote de confiance au gouvernement à la Knesset ?
Après l'élection d'un nouveau président de l'assemblée, Bennett et Lapid feront part de la composition du gouvernement avant son approbation attendue, à 61 voix contre 59
Le vote de la Knesset établissant officiellement le 36e gouvernement d’Israël – une coalition improbable de huit partis et basée sur un accord de rotation du pouvoir au poste de Premier ministre qui a été conclu entre Naftali Bennett, qui sera chef de gouvernement en premier, et Yair Lapid, de Yesh Atid – aura lieu ce dimanche.
Cette alliance formée de partis de droite, de gauche, du centre et d’une formation islamiste écartera le Premier ministre Benjamin Netanyahu du pouvoir après 12 années. Il sera remplacé par Bennett puis par Lapid, deux ans plus tard.
La commission des Arrangements de la Knesset a approuvé mercredi la session du Parlement qui confirmera la nouvelle coalition. Les procédures doivent commencer à 16 heures.
Il y aura tout d’abord un vote qui visera à remplacer Yariv Levin, député du parti du Likud de Netanyahu, actuel président de la Knesset. Le parti du Likud siègera dorénavant dans l’opposition et le responsable devrait céder sa place à la tête du Parlement israélien à Mickey Levy, de Yesh Atid.
Bennett montera alors à la tribune et présentera le Premier ministre désigné, le Premier ministre d’alternance, les principes qui orienteront son gouvernement, sa composition, ses ministres, les dates de changement de rôle programmées et l’affinité de chacun des ministres avec, au choix, le bloc de droite de Bennett ou le bloc de centre-gauche de Lapid au sein de ce gouvernement de partage du pouvoir.
Ces affiliations détermineront qui sera en droit de limoger les membres du gouvernement. Dans le bloc de Bennett – en plus de son parti Yamina – la formation Tikva Hadasha, de Gideon Saar. Toutes les autres factions appartiennent au bloc de Lapid.
Même si Lapid est aussi en droit de prendre la parole devant la Knesset, une éventuelle allocution de sa part reste indéterminée. Les leaders du futur gouvernement disposeront d’un délai limité pour présenter toutes les informations relatives à la coalition.
Le chef du plus grand parti n’appartenant pas à la coalition – Netanyahu, dont le Likud a trente sièges – sera alors autorisé à s’exprimer devant le Parlement.
Un droit que Netanyahu a bien l’intention d’utiliser, a indiqué la Douzième chaîne mercredi. (Elle a fait savoir que le bureau de Netanyahu n’avait pas indiqué si Netanyahu – qui s’est battu jusqu’au bout pour courtiser d’éventuels transfuges, déjouant ainsi la formation du gouvernement Bennett-Lapid – assisterait à la cérémonie consécutive et traditionnelle de transmission du pouvoir aux côtés du Premier ministre Bennett, une cérémonie organisée au bureau du Premier ministre. La Douzième chaîne a noté que Bennett n’avait pas demandé à rencontrer le chef du Likud pour une rencontre en tête à tête lors du transfert du pouvoir et que Netanyahu, pour sa part, n’avait pas offert la possibilité d’un tel entretien, ajoutant qu’il n’y avait pas eu de coordination officieuse entre les deux hommes en amont du changement.)
Après les discours qui seront prononcés à la Knesset, ce dimanche, tous les autres partis au Parlement disposeront de neuf minutes pour prendre la parole par le biais de l’un de leurs représentants. Alors que Netanyahu quittera son poste après plus de douze années au pouvoir – sans compter une brève apparition au poste de Premier ministre entre 1996 et 1999 – ces discours devraient être animés. Le Likud et ses alliés accusent Bennett et Saar, qui sont tous les deux à la tête de partis de droite, d’avoir changé de camp pour former le prochain gouvernement – qu’ils ont qualifié de manière répétée et méprisante de « dangereux » et de « gauchiste ».
Le Parlement votera alors l’approbation du gouvernement qui devrait être confirmé avec la mince majorité de 61 législateurs sur 120.
Le Premier ministre, le Premier ministre d’alternance et ses ministres feront alors leur prestation de serment dans le cadre de leurs nouvelles fonctions respectives, prêtant « allégeance à l’État d’Israël et à ses lois », jurant de faire leur devoir avec loyauté et de soutenir les résolutions de la Knesset.
Ensuite, les membres du nouveau gouvernement se rendront à la résidence du président pour la traditionnelle photographie de groupe. Les ministres prendront la pose aux côtés du président sortant Reuven Rivlin, qui terminera son mandat de sept ans en date du 9 juillet.
Le nouveau gouvernement comprendra 28 ministres et six vice-ministres – ce sera l’un des plus larges cabinets de toute l’Histoire d’Israël même s’il reste plus modeste en taille que le précédent. Il s’agira du tout premier gouvernement israélien dans lequel un parti arabe, Raam, aura été un membre de la coalition – un membre vital pour que le gouvernement obtienne la majorité au Parlement.
En ce qui concerne les hautes-fonctions ministérielles, l’accord de coalition prévoit que Lapid occupe la fonction de ministre des Affaires étrangères dans les deux premières années du gouvernement et que le leader de Kakhol lavan, Benny Gantz, conservera son poste à la tête du ministère de la Défense. Le Trésor sera confié au chef du parti Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman. Gideon Saar, dirigeant de Tikva Hadasha, sera ministre de la Justice et Ayelet Shaked, de Yamina, ministre de l’Intérieur. La Travailliste Merav Michaeli sera ministre des Transports et Omer Barley, lui aussi issu des rangs travaillistes, recevra le portefeuille de la Sécurité intérieure. Le leader du Meretz, Nitzan Horowitz, sera nommé ministre de la Santé et Tamar Zandberg, elle aussi du parti du Meretz, sera ministre de la Protection environnementale.
Netanyahu a été encore samedi soir la cible d’une nouvelle manifestation de protestation.
Devant sa résidence officielle à Jérusalem, des manifestants n’ont pas attendu le vote pour célébrer la « chute » du « roi Bibi », surnom de M. Netanyahu qui a été le visage d’Israël depuis son retour au pouvoir en 2009, après trois ans à la tête du gouvernement de 1996 à 1999.
A une vingtaine de mètres de la résidence officielle hautement sécurisée du Premier ministre, Ofir Robinsky, un père de famille rompu aux manifestations contre M. Netanyahu, surnommé « Bibi », n’arrive pas à cacher sa joie.
« Pour nous, c’est une grande soirée et demain sera un jour encore plus grand. J’en pleure presque. Nous nous sommes battus pacifiquement pour ça et ce jour arrive », lance-t-il, drapeau israélien, bleu et blanc, à la main.
« Netanyahu n’a cherché qu’à nous diviser, une partie de la société contre l’autre, mais demain nous serons unis, droite, gauche, juifs, arabes », ajoute M. Robinsky, pour qui le futur Premier ministre, sauf renversement de dernière minute, Naftali Bennett, a « fait le bon choix » en rejoignant la coalition du « changement ».
« C’est notre dernier samedi sur la place Balfour. Nous avons gagné. Demain, la Knesset (Parlement) va tenir son vote et ce Premier ministre s’en ira. Je ne suis pas stressée ! C’est bon, c’est fini, il s’en va », lance Gali Israel Tal, une manifestante de 62 ans.
Chantant « Bibi ciao » sur l’air connu de la chanson révolutionnaire italienne Bella Ciao, vuvuzelas stridents, tambours battants, t-shirt signé en hébreu « Bibi Lekh » (« Netanyahu dégage »), environ 2 000 manifestants, y compris l’ancien chef de l’armée Moshe Yaalon, ont participé à la manifestation samedi soir à Jérusalem pour célébrer la « victoire ».
Mais d’autres habitués des manifestations anti-Netanyahu disent craindre que le Premier ministre, qualifié par certains de « magicien de la politique », sorte un lapin de son chapeau pour rester au pouvoir in extremis.
« Nous sommes sur le point d’en finir avec une ère sombre pour Israël », note Ram Shamir, un manifestant pour qui l’année de manifestations contre Benjamin Netanyahu a « sûrement » contribué à la fin de son règne. Et d’ajouter: « nous dormirons avec nos chaussures et un oeil ouvert (…) ».
Tal Schneider a contribué à cet article.