Denise Toros-Marter, survivante de la Shoah, témoigne de son histoire
Âgée de 93 ans, la Marseillaise raconte l’arrestation, la déportation de sa famille, son internement à Drancy puis Auschwitz-Birkenau et la perte de ses proches
Ce dimanche, à l’occasion de la Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation, un témoignage de Denise Toros-Marter, 93 ans, survivante de la Shoah, a été repartagé par France 3 Régions.
Née à Marseille en 1928 dans une famille juive d’origine algérienne par sa mère et alsacienne par son père, Denise Toros-Marter expliquait dans l’interview, tournée en 2019, l’arrestation, la déportation de sa famille, son internement à Drancy puis Auschwitz-Birkenau et la perte de ses proches.
De ce camp, elle évoque notamment son arrivée : « Des hommes en costume rayé nous disent en français : ‘Que les femmes âgées prennent les enfants avec elles.’ Donc on se dit : ‘elles vont dans un camp familial…’ »
La mère et la grand-mère Marter ont en fait été gazées dès leur arrivée au camp de la mort, ainsi que son père, atteint d’une infection.
Contrainte de travailler dans le commando dédié à la vidange des latrines, elle raconte : « C’était le commando de la merde… On transportait une citerne pleine d’excréments qui venaient des WC en longueur, des trous où on faisait nos besoins, et on allait les verser dans un lac. »
Elle se remémore le jour où une femme est tombée dans le lac. « Alors que les kapos étaient là à se tenir le ventre et à se gondoler parce qu’elle était tombée dans le lac, il a fallu la rattraper, je ne vous dis pas dans quel état… Ça, ça faisait partie de la recherche d’indignité, du manque de dignité. On voulait d’abord nous faire perdre notre dignité avant de nous faire perdre notre vie. »
Denise Toros-Marter a témoigné de son histoire dans de nombreux établissements et a publié en 2008 l’ouvrage J’avais seize ans à Pitchipoï.
« Pitchipoï, un nom étrange qui sonnait mal à nos oreilles, nous Juifs provençaux bercés dès notre enfance par le patois méridional […]. C’est à Drancy, le camp de transit où notre famille fut internée, que nous avons découvert ce mot de Pitchipoï. Nous n’en connaissions pas l’origine : la culture yiddish polonaise dans laquelle il désigne un petit village imaginaire. Nous savions encore moins ce qu’allait être la réalité de cette destination inconnue des internés de Drancy. Lorsque nous la découvrîmes, tout espoir s’évanouit : c’était Auschwitz ! », écrivait-elle.
Elle a participé en 1992 avec Alain Chouraqui à la fondation du Site mémorial du Camp des Milles, l’un des rares camps d’internement et de déportation européen resté intact. Le camp sera finalement inauguré et ouvert au public en 2012.
Denise Toros-Marter est commandeur de la légion d’honneur depuis 2016.