Des élections anticipées n’affecteront pas la procédure concernant Netanyahu
En réponse aux accusations de politisation du Premier ministre, Shai Nitzan se défend en utilisant les témoins de l'État, dit que "seules les preuves comptent"
Raoul Wootliff est le correspondant parlementaire du Times of Israël
Le procureur Shai Nitzan a lancé dimanche une vigoureuse campagne de défense de la justice, avertissant le Premier ministre Benjamin Netanyahu que la victoire aux urnes ne le disculperait pas des graves accusations de corruption.
« La question de savoir si le public est convaincu que telle ou telle personne soit innocente de quelque délit ou accusation que ce soit a certainement de l’importance dans la sphère publique », a déclaré M. Nitzan lors d’une conférence organisée conjointement par l’Israel Democracy Institute et Makor Rishon pour célébrer les « 70 ans de la démocratie israélienne ».
« Mais », a-t-il poursuivi, « la décision de juger quelqu’un et de statuer sur son cas n’est pas prise en fonction de l’opinion majoritaire ou d’un référendum public ».
Les élections anticipées semblaient presque inévitables dimanche soir, après que les chefs spirituels d’un grand parti ultra-orthodoxe ont rejeté un compromis sur un projet de loi sur la conscription qui a perturbé la coalition – depuis approuvé, malgré le refus du laïc Yisrael Beytenu.
Les partis ultra-orthodoxes de la coalition ont menacé la semaine dernière de voter contre le budget de 2019 à moins qu’une loi ne soit approuvée cette semaine, exemptant les membres de leurs communautés du service militaire, alors que le ministre des Finances Moshe Kahlon a menacé de démissionner – et, selon certains experts, peut-être même la fin de la coalition – si le budget n’est pas adopté cette semaine. Le ministre de la Défense Avigdor Liberman a également menacé de retirer son parti Yisrael Beytenu de la coalition si les ultra-orthodoxes obtenaient gain de cause.
Le Premier ministre est aux prises avec plusieurs accusations de corruption, et ses partenaires de la coalition ont laissé entendre qu’ils feraient probablement tomber le gouvernement s’il était inculpé. Des sources de la coalition ont laissé entendre que Netanyahu cherche à déclencher de nouvelles élections pour obtenir un plébiscite sur son gouvernement avant une possible inculpation pour corruption.
Répondant apparemment aux déclarations de Netanyahu selon lesquelles les enquêtes menées contre lui sont politiques et qu’elles résultent d’un échec continu à le destituer par voie électorale, M. Nitzan a déclaré qu’un système de justice basé sur la popularité détruirait l’État de droit.
« Une société où la culpabilité de quelqu’un est décidée en fonction de la sympathie qu’elle éprouve pour lui, de sa popularité ou de la haine qu’elle éprouve à son égard… est une société qui ne fonctionne pas selon les principes du droit et de la justice », a-t-il dit.
« Seules les preuves comptent. »
Dans un post sur Facebook la semaine dernière, Netanyahu s’en est pris aux responsables de l’application de la loi, les accusant de se livrer à une conspiration pour le faire tomber, notamment en encourageant les faux témoignages et en faisant pression illégalement sur les témoins. Les propos sont intervenus deux jours après qu’un ancien conseiller en communication de la famille Netanyahu, Nir Hefetz, a accepté de témoigner contre son ancien patron, le troisième ancien proche assistant du Premier ministre à accepter de coopérer avec la police.
Dans son discours, Nitzan a rejeté les accusations de Netanyahu contre le système judiciaire israélien, y compris contre l’utilisation de témoins de l’État. Il a dit que son bureau ne dirait jamais à un témoin d’État de mentir, comme Netanyahu l’avait prétendu.
« Nous n’engagerions jamais un témoin de l’État et nous ne lui dirions jamais de mentir pour accuser quelqu’un d’autre », a-t-il dit.
« La signature d’accords de témoins de l’État est un outil essentiel de la panoplie d’outils donnée aux organismes d’application de la loi pour lutter contre le crime organisé et la corruption publique. Cet outil n’a pas été inventé en Israël et est utilisé dans d’autres démocraties. Elle a été reconnue comme étant tout à fait légitime dans les jugements de la Cour suprême. Et ces accords ont fait leurs preuves », a insisté Nitzan.
De tels témoins sont vitaux, a-t-il dit, parce que « les délits de corruption, en particulier les pots-de-vin, ne sont pas commis publiquement ».
Dans le cadre de l’accord de témoin de l’État qu’il a signé, Hefetz, soupçonné de corruption dans cette affaire, a été informé qu’il ne purgerait pas de peine de prison ni ne paierait d’amende pour ses actes.
Il a promis de fournir à la police des messages SMS et des enregistrements compromettants de Netanyahu et de sa femme dans plusieurs affaires criminelles, y compris le cas Bezeq, connu sous le nom de l’affaire 4000, et le cas 1000, qui concerne des accusations selon lesquelles Netanyahu aurait reçu des cadeaux d’hommes d’affaires en échange de faveurs.
Hefetz rejoint Shlomo Filber, l’ancien directeur général du ministère des Communications et un confident de longue date de Netanyahu, qui a également signé un accord le mois dernier de témoin d’État et qui pourrait accuser le Premier ministre dans l’affaire Bezeq.
L’enquête sur l’affaire 4000 porte sur des soupçons selon lesquels l’actionnaire majoritaire de Bezeq, Shaul Elovitch, aurait ordonné au site d’informations Walla, qu’il possède également, d’accorder une couverture favorable à la famille Netanyahu en échange de l’avancement par le Premier ministre de la réglementation qui lui serait profitable financièrement.
Des officiels ont déclaré aux journaux télévisés de Hadashot que les soupçons à l’encontre de Netanyahu dans l’enquête sur l’affaire 4000 sont plus graves que les accusations portées dans deux affaires antérieures, 1000 et 2000, dans lesquelles la police a déjà recommandé qu’il soit inculpé pour fraude, abus de confiance et corruption.
Elovitch est soupçonné d’avoir donné et reçu des pots-de-vin et des avantages illicites d’une valeur de près « d’un milliard de shekels » – plus d’un quart de milliard de dollars – a déclaré la procureur Yehudit Tirosh de l’Autorité des titres israélienne la semaine dernière, lors d’une audience. Netanyahu et Elovitch ont démenti cette accusation.
L’an dernier, Ari Harow, le chef du personnel de Netanyahu pendant un an à partir du milieu de l’année 2014, est devenu témoin de l’État et a accepté de fournir des informations sur ces deux affaires en échange d’une peine plus légère pour des accusations distinctes portées contre lui relativement à un conflit d’intérêts présumé au sujet d’une entreprise qu’il dirigeait.
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