Deux émeutiers haredim arrêtés lors d’une manifestation contre le service militaire
Des pompiers et un journaliste agressés à Jérusalem ; Tsahal craint que la dispense d'armée des Haredim contribue à l'augmentation de réservistes qui refusent de se présenter
Deux émeutiers ont été arrêtés pour avoir agressé les forces de l’ordre après que des affrontements ont éclaté jeudi à Jérusalem, lors d’une manifestation ultra-orthodoxe contre la conscription militaire, a indiqué la police, précisant qu’un manifestant avait nécessité des soins médicaux après avoir violemment résisté à son arrestation.
Selon la police, des dizaines de manifestants ont bloqué la rue Shmuel HaNavi dans la capitale après avoir reçu l’ordre de dégager la voie. Ils ont défié les agents, lancé des pierres et d’autres objets, brisé les vitres de bus ainsi que la visière du casque d’un policier. La police a fait état de six officiers blessés lors de l’intervention dans les émeutes.
Le service israélien d’incendie et de secours a déclaré que les manifestants haredim ont également attaqué les pompiers qui tentaient d’éteindre des feux allumés au cours de la manifestation. Selon les pompiers, les émeutiers ont poussé cinq bennes à ordures en flammes en direction des équipes d’intervention, tout en leur lançant des objets.
Le journaliste Yoeli Brim, de la radio de l’armée, a lui aussi été agressé, comme en témoignent des images diffusées sur les réseaux sociaux. Présent sur place pour couvrir l’événement, il a partagé des vidéos montrant des manifestants ultra-orthodoxes en train de démonter des barrières métalliques et de les jeter sur la chaussée.
Cette manifestation intervient dans un contexte de tension accrue au sein de l’armée, qui craint une vague de refus de la part de réservistes, alors qu’Israël intensifie ses opérations dans la bande de Gaza. Selon Haaretz, des responsables militaires estiment que ce phénomène s’explique en partie par l’absence de conscription des étudiants ultra-orthodoxes des yeshivot.
Le porte-parole sortant de Tsahal, le contre-amiral Daniel Hagari, a souligné cet enjeu dans son discours d’adieu prononcé jeudi. Il a déclaré avoir rencontré des dizaines de soldats et « les avoir vus lutter sous le poids de la guerre ».

« Tous les pans de la société doivent contribuer à porter ce fardeau », a-t-il affirmé. « Nous avons besoin de davantage de soldats dans Tsahal dès maintenant. Pas dans quelques années. C’est maintenant que la guerre se déroule. »
Israël a promis d’intensifier la guerre à Gaza depuis la reprise des hostilités le 18 mars, après un cessez-le-feu de deux mois et un accord de prise d’otages avec le Hamas.
Des dizaines de milliers de réservistes devaient être appelés, mais des responsables de Tsahal cités jeudi par Haaretz ont signalé une hausse du nombre de non-présentations prévues, en raison de la fatigue, de la colère envers les politiques gouvernementales et du flou entourant les objectifs de la reprise des combats.

Un haut commandant réserviste a déclaré à Haaretz que les chefs de brigade et de bataillon étaient confrontés à de nombreux cas de refus de mobilisation. La raison principale invoquée, selon lui, est le sentiment que le gouvernement n’en fait pas assez pour obtenir la libération des 59 otages encore aux mains du groupe terroriste palestinien du Hamas à Gaza.
D’autres motifs sont fréquemment évoqués, notamment l’inquiétude suscitée par les projets du gouvernement visant à affaiblir le système judiciaire et à inscrire dans la loi l’exemption du service militaire pour la communauté ultra-orthodoxe, a ajouté le commandant.
Un officier de réserve cité par Haaretz a également mis en avant l’épuisement pur et simple, tant chez les combattants que chez les commandants, comme facteur important dans la décision de certains de ne pas se présenter, après des centaines de jours de service au cours de l’année écoulée.
La police se heurte à des manifestants ultra-orthodoxes lors d’une manifestation contre le service militaire à Jérusalem, le 27 mars 2025. (Crédit : porte-parole de la police)
Parmi ceux qui refusent de servir figure le navigateur de combat Alon Gur, qui a annoncé publiquement son départ de l’armée de l’air la semaine dernière, après 16 ans de service. « La ligne rouge a été franchie », a-t-il écrit en ligne, accusant le gouvernement de faire passer la politique avant les vies humaines. Le renvoi de Tsahal qui s’en est suivi a incité d’autres réservistes à suivre son exemple, provoquant une vive inquiétude dans les rangs du commandement militaire.
En février, 85 % des réservistes convoqués se sont présentés au service, selon Tsahal, contre plus de 100 % à répondre à l’appel lorsque la guerre a été déclenchée le 7 octobre 2023 par le pogrom perpétré par le Hamas dans le sud d’Israël. Ce jour-là, les terroristes du groupe ont assassiné plus de 1 200 personnes et pris 251 otages. Il s’agissait alors de la plus vaste mobilisation de réservistes de l’histoire du pays.

Le conflit, qui a coûté la vie à des centaines de soldats et mobilisé plusieurs centaines de milliers de réservistes, a ravivé le débat déjà sensible sur l’exemption des ultra-orthodoxes.
De nombreux membres de cette communauté estiment que le service militaire est incompatible avec leur mode de vie, et craignent qu’un enrôlement n’entraîne une sécularisation.
L’an dernier, la Haute Cour de justice a statué qu’il n’existait aucune base légale pour l’exemption généralisée de service militaire dont bénéficient les étudiants des yeshivot du milieu haredi depuis des décennies. Les partis ultra-orthodoxes, principaux alliés de la coalition du Premier ministre Benjamin Netanyahu, réclament depuis lors une loi officialisant une forme d’exemption.

La colère a atteint son paroxysme dimanche après la diffusion d’images montrant le ministre du Logement, Yitzhak Goldknopf (Yahadout HaTorah), dansant lors d’un mariage sur une chanson appelant à refuser de servir dans l’armée de « l’État impie ». Goldknopf a ensuite présenté ses excuses.
Sam Sokol a contribué à cet article.