Le Turkménistan veut ouvrir une ambassade en Israël, dit son président à Eli Cohen
Le président Berdimuhamedov a dit vouloir élargir les liens bilatéraux avant l'inauguration de l'ambassade d'Israël à Ashgabat, à quelques kilomètres de la frontière iranienne
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël

Le Turkménistan envisage d’ouvrir une ambassade en Israël, a confié jeudi le dirigeant de ce pays d’Asie Centrale au ministre des Affaires étrangères Eli Cohen qui se trouve actuellement en déplacement à Ashgabat.
Selon le ministère des Affaires étrangères, le chef de la diplomatie israélienne et le président Serdar Berdimuhamedov ont évoqué l’élargissement de leurs relations dans les technologies de la cybersécurité, de l’agriculture et de l’eau.
« L’ouverture d’une ambassade renforcera les liens tissés entre nos deux pays et encouragera la coopération entre nos gouvernements et entre nos économies dans les domaines des hautes technologies, de l’agriculture et de la sécurité régionale », a déclaré Cohen à l’issue de sa rencontre avec Berdimuhamedov.
Des images de la réunion entre les deux hommes révèlent des entretiens plutôt difficiles, les deux hommes communiquant par le biais d’un interprète qui s’adressait à Cohen en anglais, même si Berdimuhamedov, connu pour sa froideur, a lu un discours écrit en anglais.
Le ministre des Affaires étrangères, Eli Cohen, s’était embarqué mercredi dans un voyage rare au Turkménistan, où il doit inaugurer une nouvelle ambassade à seulement quelques kilomètres de la frontière avec l’Iran, ennemi juré d’Israël, alors que l’État juif cherche à renforcer les liens avec ses alliés dont la situation géographique est stratégique en Asie Centrale.
Cohen a publié sur Twitter une photo à son arrivée dans la capitale Ashgabat où il se tient aux côtés du vice-ministre des Affaires étrangères Berdyniyaz Myatiev, mercredi soir. Il est le premier ministre israélien à s’être rendu dans cet État répressif en presque 30 ans.
Il devrait ouvrir, jeudi, la toute première ambassade dans le pays, qui sera située à 17 kilomètres de la frontière avec l’Iran, a-t-il ajouté.
« Les relations avec le Turkménistan ont une grande importance pour la sécurité et la diplomatie et cette visite va renforcer la place d’Israël dans la région », a écrit Cohen dans sa publication sur Twitter.
Après ses rencontres avec le ministre des Affaires étrangères Rachid Meredov ainsi qu’avec le ministre de l’Agriculture et avec la communauté juive locale, Cohen retournera en Israël vendredi.
La frontière du Turkménistan avec l’Iran s’étend sur 1 148 kilomètres, offrant à Israël un moyen d’entrée séduisant dans la République islamique, alors que l’État hébreu est déterminé à arrêter le programme nucléaire de Téhéran.
Mais les autorités turkmènes entretient également des liens diplomatiques et commerciaux étroits avec la république islamique, et elles ont exprimé leur désir d’élargir encore cette relation.

La capitale se trouve sur un versant de la chaîne de montagnes sauvages du Kopet-Dag. Sur l’autre se trouvent les frontières iraniennes. Un grand nombre des ambassades, à Ashgabat, sont installées au sud de la ville, à l’endroit le plus proche de ces frontières.
Israël a un ambassadeur à Ashgabat depuis une décennie, mais l’envoyé a travaillé depuis des chambres d’hôtel et dans un bureau temporaire. La nouvelle ambassade sera la mission officielle la plus proche du territoire placé sous l’autorité du régime de Téhéran.

Cette visite de Cohen a été la première depuis que le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Shimon Peres, s’était rendu dans cette dictature riche en pétrole en 1994, trois ans après l’effondrement de l’Union soviétique, qui régnait sur la région.
Cet État autoritaire est cité de manière constante pour ses politiques répressives, pour ses antécédents médiocres en matière de droits de l’Homme et pour sa corruption systémique. Dans son dernier rapport, l’ONG Freedom House a fait figurer le Turkménistan dans sa liste des pays les moins libres, avec une note inférieure à celle de la Corée du nord.
Cohen est arrivé dans le pays après avoir eu des discussions de haut-rang dans l’Azerbaïdjan voisine, où Israël tente de manière plus forte encore d’ancrer une alliance avant une possible épreuve de force avec l’Iran.
Avant le décollage de son avion à Tel Aviv, Cohen avait indiqué dans un communiqué que la situation géographique de l’Azerbaïdjan – qui se trouve à la frontière de l’Iran – « rend nos relations d’autant plus importantes, leur donnant un potentiel formidable ».
Cohen avait ajouté que l’objectif de son déplacement était « de continuer à construire, avec nos amis de Bakou, un front uni et résolu face aux défis communs que nous devons relever », ajoutant qu’il souhaitait également approfondir la coopération en matière d’économie, de commerce, de défense, d’énergie et d’innovation.

L’alliance entre l’Azerbaïdjan et Israël a fleuri suite au soutien apporté au pays par l’État hébreu au cours du conflit avec l’Arménie, en 2020.
Cohen avait annoncé qu’il se rendrait à Bakou au mois de mars, lorsque Beymarov était venu lors de l’inauguration d’une ambassade en Israël.
Des informations transmises par les médias étrangers ont indiqué que l’Azerbaïdjan laisserait probablement l’État juif utiliser des bases sur son sol pour lancer des vols de reconnaissance au-dessus de l’Iran et pour envoyer des agents des renseignements dans le pays dans le cadre de la lutte contre le programme nucléaire actuellement mis en œuvre par la république islamique. Si Israël devait prendre la décision de frapper les réacteurs et les usines nucléaires de l’Iran, l’accès aux bases de l’Azerbaïdjan faciliterait grandement la réalisation de cette mission.

Les tensions avec l’Iran avaient atteint leur paroxysme à l’issue du conflit avec l’Arménie, Téhéran réalisant des exercices militaires majeurs sur sa frontière avec l’Azerbaïdjan et durcissant encore davantage sa rhétorique à l’encontre de cette dernière.
Israël est l’un des principaux fournisseurs d’armes de l’Azerbaïdjan. Selon l’Institut de recherche sur la paix internationale de Stockholm, l’État juif a assuré 69 % des importations d’armes pour Bakou entre 2016 et 20220 – représentant 17 % des exportations israéliennes dans le domaine de l’armement pendant la même période.
L’Iran, qui accueille des millions d’Azéris ethniques, accuse depuis longtemps son voisin du nord, au territoire beaucoup plus modeste en taille, de nourrir le mouvement séparatiste au sein de la république islamique.
Israël avait été l’un des premiers pays à reconnaître l’indépendance azérie en 2011. Le pays a une ambassade à Bakou depuis 1992.
En octobre, Benny Gantz, ministre de la Défense à l’époque, avait fait une visite officielle en Azerbaïdjan où il avait rencontré son homologue Zakir Hasanov et le président Aliyev.