Englman avait averti des lacunes de la défense à la frontière nord des mois avant le 7 octobre
Suite à son inspection surprise en juillet 2023 le long de la frontière libanaise, le contrôleur de l'État avait rapporté le manque d'équipement et d'infrastructures ce qui, selon lui "aurait dû servir d'avertissement urgent"

Selon un rapport du contrôleur de l’État publié mardi, l’armée israélienne avait été avertie avant les massacres du 7 octobre 2023 que les défenses de la frontière nord du pays présentaient de graves lacunes.
Dans son rapport, le contrôleur de l’État, Matanyahu Englman, a déclaré qu’en juillet 2023, il avait constaté que de nombreux postes de Tsahal à la frontière nord manquaient d’équipement et d’infrastructures, et que les soldats n’étaient pas suffisamment entraînés.
Lorsque l’armée a répondu à ce rapport, elle a reconnu l’utilité de la surveillance, mais a souligné que les conclusions du contrôleur de l’État étaient tirées d’une inspection d’avant-guerre et ne reflétaient pas précisément la réalité actuelle sur le terrain.
« Reconnaissant l’importance d’une présence sécuritaire continue, Tsahal a alloué des ressources et des armes supplémentaires aux troupes de première ligne », a indiqué l’armée dans un communiqué mardi, précisant que des efforts ont depuis été déployés pour renforcer la sécurité aux frontières.
Selon Englman, Tsahal a initialement répondu à son rapport une semaine et demie avant que le groupe terroriste palestinien du Hamas n’envahisse le sud d’Israël le 7 octobre 2023. L’armée a confirmé cette affirmation dans sa déclaration de mardi.
Le lendemain du pogrom perpétré par le Hamas au départ de Gaza, le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah a ouvert le feu depuis le Liban sur le nord d’Israël, sans provocation, ouvrant ainsi un deuxième front toujours actif. Un an après le déclenchement de la guerre en cours, l’armée a révélé que le Hezbollah avait prévu d’envoyer des milliers de terroristes envahir le nord d’Israël quelques jours après l’assaut du Hamas.

L’inspection surprise d’Englman s’est concentrée sur les défenses de la frontière nord d’Israël, en réponse à l’activité accrue du Hezbollah au cours du premier semestre 2023. Le contrôleur a précisé que cela reflétait la situation générale de toutes les frontières d’Israël.
Selon lui, si le Hamas a réussi à envahir Israël depuis Gaza le 7 octobre, c’est en raison des « nombreux échecs importants dans la défense des frontières du pays ».
Plusieurs découvertes alarmantes ont été faites lors de l’inspection menée dans huit avant-postes israéliens, selon le rapport.
Englman a constaté que de nombreux avant-postes de Tsahal ne disposaient pas de ressources suffisantes pour assurer une défense efficace, malgré l’intensification des activités du Hezbollah. Dans certaines régions, les patrouilles militaires étaient effectuées dans des véhicules non blindés et les soldats n’étaient pas équipés d’armes adéquates.

En outre, l’inspection a révélé des lacunes dans les capacités de collecte de renseignements, un manque de formation adéquate des réservistes et des soldats de l’armée régulière, ainsi que des insuffisances dans les infrastructures et les mesures de sécurité aux avant-postes et le long de la frontière.
Par ailleurs, le rapport indiquait que la construction d’une barrière améliorée à la frontière nord, qui avait débuté début 2018, n’était pas encore terminée au moment de l’inspection, ce qui augmentait le risque d’infiltration à certains endroits de la frontière.
Englman a déclaré que ce rapport « aurait dû servir d’avertissement urgent concernant ces failles de sécurité critiques », car une version préliminaire avait été présentée au Premier ministre Benjamin Netanyahu, au ministre de la Défense de l’époque Yoav Gallant et au chef d’état-major de l’armée de l’époque, le lieutenant-général Herzl Halevi, et ce avant le 7 octobre.
La commission de Contrôle de l’État de la Knesset a décidé de retarder la publication du rapport jusqu’à présent, a déclaré Englman.

Le rapport cite plusieurs incidents comme preuves de l’escalade du Hezbollah au cours du premier semestre 2023, notamment une invasion et un attentat à la bombe au carrefour de Megiddo en mars, qui avaient blessé un civil israélien, une salve de roquettes tirées depuis le sud du Liban sur Israël pendant les fêtes de Pessah en avril et le tir d’un missile antichar sur un véhicule de patrouille de Tsahal depuis le mont Dov en juillet.
Le rapport recommandait de prendre des mesures immédiates pour remédier à ces graves lacunes en 2023, bien avant qu’Israël n’élimine les dirigeants du Hezbollah et que les troupes de Tsahal ne pénètrent dans le sud du Liban fin 2024.
Parmi les mesures suggérées, Englman avait appelé le Premier ministre et le cabinet de sécurité à réévaluer les politiques de défense concernant le Liban, en particulier compte tenu des activités en cours du Hezbollah. Il avait également exhorté l’armée à ajuster son état de préparation opérationnelle dans la région nord afin de mieux se préparer à des menaces similaires à l’avenir.
Le Hezbollah a commencé à mener des attaques transfrontalières quasi-quotidiennes contre le nord d’Israël le lendemain du pogrom perpétré par par son allié, le groupe terroriste palestinien du Hamas, le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza. Un an après le pogrom, Tsahal a révélé qu’environ 3 000 terroristes étaient stationnés près de la frontière libanaise dans le cadre d’un plan du Hezbollah visant à avancer en Galilée et à reproduire la dévastation causée dans le sud dans les jours qui avaient suivi l’assaut du Hamas.

Au cours d’une opération terrestre israélienne dans le sud du Liban à la fin de l’année dernière, Tsahal a saisi une quantité massive d’armes et d’équipements appartenant au Hezbollah, soit environ 85 170 pièces, qui auraient pu être utilisées dans une telle attaque.
La situation à la frontière nord est toujours instable, Israël cherchant à normaliser ses relations avec le Liban, avait déclaré un responsable israélien le mois dernier. Selon le bureau du Premier ministre, Israël et le Liban ont convenu d’ouvrir des négociations pour délimiter la frontière entre les deux pays.
En février, Israël a retiré toutes ses troupes du sud du Liban, à l’exception de cinq points stratégiques, affirmant avoir reçu le feu vert des États-Unis pour rester à ces postes et invoquant la nécessité d’empêcher le Hezbollah de revenir dans la région et de menacer Israël.
Outre les lacunes constatées dans la position militaire le long de la frontière libanaise, le rapport d’Englman a également mis en évidence les faiblesses des mesures de cybersécurité du Commandement du Front intérieur.

Le rapport affirmait que les failles de sécurité se sont multipliées, indiquant que le Commandement du Front intérieur n’a pas réussi à corriger les vulnérabilités précédemment identifiées.
« Le Commandement du Front intérieur ne documente pas de manière exhaustive ces lacunes et ne suit que partiellement leur résolution, contrairement à son propre cadre de défense en matière de cybersécurité », indiquait le rapport.
Englman a souligné que le rapport « ne remplace pas une commission d’enquête nationale sur les défaillances du 7 octobre », qui examinerait toutes les parties concernées, y compris les dirigeants politiques, militaires et civils.
En mars, les députés de la coalition ont bloqué un projet de loi visant à créer une telle commission, la Knesset votant 39 voix contre 51 contre le texte proposé par la députée Orit Farkash HaCohen (HaMahane HaMamlahti). Netanyahu a publiquement fait campagne contre la formation d’une telle commission, affirmant qu’une grande partie de la population aurait peu confiance, bien que les sondages d’opinion montrent constamment un soutien massif à une enquête d’État. Netanyahu n’a pas précisé quel type d’enquête il serait prêt à soutenir.