Antisémitisme : Les lacunes des manuels scolaires en France – étude d’IMPACT-se
Selon l'organisation, le programme n'aborde pas assez la contribution des Juifs à la société française et les liens des Juifs à la terre d'Israël avant la création de l'État en 1948

Un nouveau rapport de l’Institute for Monitoring Peace and Cultural Tolerance in School Education (IMPACT-se), ONG israélienne qui étudie la façon dont les Juifs, le judaïsme, Israël et la Shoah sont présentés dans les manuels scolaires à travers le monde, révèle des lacunes limitées mais existantes dans la manière dont est enseignée l’histoire juive.
L’organisation relève deux points principaux sur lesquels les manuels pourraient progresser : la contribution des Juifs à la société française à travers l’histoire, et les liens des Juifs à la terre d’Israël avant la fondation de l’État en 1948.
Pour réaliser son enquête, IMPACT-se s’est penchée sur les principaux manuels scolaires utilisés par les lycéens français, ainsi que sur les programmes d’histoire dispensés au collège. Ses découvertes sont ensuite mises à l’épreuve des standards définis par l’UNESCO en matière de tolérance et d’éducation à la paix.
Concernant l’histoire du judaïsme, l’organisation explique que les manuels scolaires reconnaissent implicitement le rôle précurseur du judaïsme dans l’émergence du christianisme et de l’islam en raison de leurs racines monothéistes communes. Toutefois, le programme n’explore pas les contributions plus larges des Juifs au paysage culturel méditerranéen.
L’enseignement des Croisades n’inclut pas non plus les massacres antisémites, persécutions et conversions forcées menés par les Croisés sur les Juifs.
IMPACT-se conclut également que les contributions de la communauté juive dans la vie publique française est largement absente du programme d’études. L’histoire juive est largement dépeinte comme une histoire de victimisation, avec peu de mention des contributions juives à l’art, à la science, à la philosophie et à la politique française, ou de figures juives significatives. La figure de Maïmonide, brièvement évoquée en classe de Première, fait exception.
L’affaire Dreyfus occupe, sans surprise, une place centrale dans les programmes d’histoire français. Un manuel de Terminale de l’option Histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques (HGGSP) met l’accent sur le lien historique entre la couverture de l’affaire Dreyfus par Théodore Herzl et la montée du sionisme, en montrant comment la nature antisémite de l’affaire a stimulé la mission de Herzl de fonder l’État d’Israël.

Mais certains manuels minimisent l’impact de l’antisémitisme dans l’affaire, préférant mettre la lumière sur la relation entre l’opinion publique et la presse au moment du scandale.
L’ONG salue l’enseignement de la Shoah dans les programmes scolaires français auquel elle ajouterait néanmoins un plus grand focus à la collaboration du régime de Vichy et à ses lois antisémites.
Le chapitre de Terminale concernant le conflit israélo-palestinien n’est pas parvenu à suffisamment établir les liens profonds et lointains entre les Juifs et la terre d’Israël. Le programme d’HGGSP enseigne que les efforts de paix n’ont pas permis d’établir « une véritable paix positive car ils ont exclu les extrémistes des deux camps », y compris le Hamas, qu’il ne présente pas explicitement comme terroriste.
L’antisémitisme, enfin, est abordé en Première comme l’une des « diverses formes » de racisme dans la société française en classe d’éducation civique, et est présenté comme étant en augmentation depuis 2015. IMPACT-se regrette cependant que des exemples récents d’actes antisémites meurtriers, tels que l’attentat de Mohamed Merah contre une école juive de Toulouse en 2012 ou l’attentat de l’Hypercacher de Vincennes en 2015, ne soient pas mis en avant.

En publiant son rapport, le directeur d’IMPACT-se, Marcus Sheff, a conclu que « le programme scolaire français est solide ».
« Toutefois, des améliorations sont possibles. En particulier, plus de contenu sur la Shoah sur le territoire français et sur l’antisémitisme contemporain dans le pays améliorerait grandement le programme et les valeurs de la République », a-t-il estimé.
« Alors que la communauté juive de France remonte à l’Antiquité et compte aujourd’hui près d’un demi-million de personnes, la montée de l’antisémitisme ces dernières années nous rappelle à quel point il est essentiel que les écoles françaises présentent aujourd’hui les Juifs, l’histoire juive, Israël et l’antisémitisme d’une manière précise et détaillée. »