Israël veut améliorer les conditions jugées « honteuses » des checkpoints de Cisjordanie
Le projet du ministère des Finances fait partie d'un projet plus large prévoyant d'accorder des milliers de permis travail aux Palestiniens. Les passages des checkpoints doivent donc devenir plus efficaces
Dov Lieber est le correspondant aux Affaires arabes du Times of Israël

Dans le cadre d’un large effort visant à renforcer les relations économiques israélo-palestiniennes, le ministère des Finances prévoit d’améliorer les conditions très critiquées aux checkpoints, que des dizaines de milliers de Palestiniens empruntent tous les jours, depuis la Cisjordanie pour se rendre en Israël, afin d’aller au travail, a déclaré un porte-parole du ministère au Times of Israel, jeudi.
Le plan visant à accroître les liens économiques bilatéraux prévoit dans un premier temps d’accorder des permis de travail à 7.800 nouveaux travailleurs palestiniens, dont certains seront employés dans des domaines spécialisés tels que la high-tech, la médecine ou la construction.
Afin de faciliter l’augmentation estimée des travailleurs qui se rendent en Israël, le plan alloue immédiatement 10 millions de shekels pour améliorer les passages, et appelle à « une modernisation et à une expansion » des checkpoints « convenable pour les travailleurs réguliers. »
Le plan du ministère des Finances alloue en outre un total de 100 millions de shekels en 2016 pour mettre en œuvre l’ensemble du plan, qui comprend également le renforcement des transports en commun en Cisjordanie et un programme de formation professionnelle pour les travailleurs palestiniens employés dans le domaine de la construction en Israël.
Une partie des fonds du total des 100 millions de shekels sera également utilisée pour améliorer les checkpoints, selon le porte-parole.

Les fonds seront transférés à l’Administration civile de Tsahal, l’organisme qui supervise l’activité civile en Cisjordanie. L’utilisation des fonds sera coordonnée avec le ministère de la Défense. Un porte-parole de l’Administration civile a déclaré que l’argent n’avait pas encore été transféré.
Le plan, qui a été adopté comme résolution le 8 mars, n’a pas encore pris effet. L’Administration civile sera tenue d’effectuer des rapports sur une base trimestrielle.
« Le travail administratif des ministères concernés est actuellement en cours de préparation afin d’élaborer le plan en question », a déclaré le ministère des Finances.
Les conditions difficiles aux checkpoints ont longtemps été un problème critiqué dans les médias israéliens traditionnels, mais le ministre de l’Agriculture d’extrême droite, Uri Ariel, a relancé le sujet, le 15 avril, lorsqu’il a critiqué la souffrance palestinienne aux checkpoints, estimant qu’elle était « honteuse et [constituait] un déshonneur pour l’Etat d’Israël et pour l’establishment sécuritaire ».
Quelques jours après la déclaration d’Ariel, la Deuxième chaîne a diffusé un reportage sur les difficultés palestiniennes au checkpoint de Qalandiya, qui connaît une plus grande affluence que tout autre checkpoint en raison de son emplacement entre Ramallah et Jérusalem.
Le reportage de la Deuxième chaîne (vidéo en hébreu), intitulé « Like animals » (« Comme des animaux »), montre des centaines d’hommes, jeunes et vieux, arrivant au checkpoint à 4 heures du matin, pour s’assurer d’arriver à l’heure sur leur lieu de travail en Israël.
Les journalistes ont suivi les hommes alors qu’ils passaient à travers un étroit passage de métal pour se rendre en Israël. Ce voyage qui devrait prendre une demi-heure peut parfois durer jusqu’à trois ou quatre heures en raison des procédures au checkpoint, selon le reportage.

Le ministère des Finances a déclaré que son plan n’était pas une réaction à la critique récente des conditions aux checkpoints. Au contraire, le plan est le résultat d’une série de réunions entre les hauts fonctionnaires des ministères des Finances israélien et palestinien depuis fin 2015 et jusqu’à début 2016, et qui s’est déroulée pendant ces derniers mois d’attaques palestiniennes contre les Israéliens.
L’establishment sécuritaire israélien considère que des liens économiques accrus entre les deux parties permettraient d’améliorer la situation sécuritaire sur le terrain. Les Palestiniens qui travaillent en Israël sont beaucoup moins susceptibles de commettre des attaques, maintiennent des responsables de la sécurité israéliens.
En plus de ce plan du ministère des Finances – et sans qu’il n’en fasse partie – le cabinet de sécurité israélien a approuvé début février les grandes lignes d’un plan d’attribution de permis de travail à 30.000 travailleurs palestiniens de Cisjordanie. Le plan, conçu comme un moyen visant à endiguer la violence palestinienne, n’en est encore qu’aux premières étapes des processus bureaucratiques, a déclaré un porte-parole de l’Administration civile.
Actuellement, 58.000 Palestiniens détiennent des permis de travail israéliens, bien que les experts évaluent que près de 120 000 Palestiniens de Cisjordanie sont en réalité employés – à la fois légalement et illégalement – par les résidents de l’Etat juif.
A minuit, jeudi, Israël a fermé la Cisjordanie et la bande de Gaza pour 48 heures, par peur d’attaques palestiniennes pendant la fête juive de Pessah, qui commence vendredi soir. Cette décision fait suite à l’attaque à la bombe par le Hamas sur un bus de Jérusalem, lundi dernier.
Les entrées et les sorties de Cisjordanie et de Gaza seront interdites aux Palestiniens au cours de ces deux jours, à l’exception des « cas humanitaires, médicaux et exceptionnels », selon une déclaration des Forces de défense israéliennes.
AFP et Times of Israel staff ont contribué à cet article