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Lapid : Varsovie a été complice de la Shoah et la loi « ne change pas l’Histoire »

Le leader de Yesh Atid, fils d'un survivant, a condamné la loi prévoyant des peines de prison pour l'usage de phrases comme "camps de la mort polonais"

Le député Yair Lapid dirige une réunion de la faction Yesh Atid à la Knesset, le 8 janvier 2018. (Miriam Alster / Flash90)
Le député Yair Lapid dirige une réunion de la faction Yesh Atid à la Knesset, le 8 janvier 2018. (Miriam Alster / Flash90)

Le président du parti Yesh Atid, Yair Lapid, a critiqué samedi un projet de loi controversé adopté par la chambre basse du Parlement polonais qui a pour objectif de criminaliser les individus ou les organisations qui soulignent l’implication du pays européens dans les atrocités qui ont été commises durant l’Holocauste.

Le membre israélien de la Knesset, fils d’un survivant de l’Holocauste, a qualifié le projet de loi – qui devrait être approuvé en Pologne dans peu de temps – d’initiative visant à réécrire l’Histoire.

« Je condamne fortement la nouvelle loi qui a été adoptée en Pologne, qui tente de nier l’implication de nombreux citoyens polonais durant la Shoah », a écrit Lapid dans un tweet en hébreu samedi.

« Aucune loi polonaise ne changera l’histoire, la Pologne a été complice durant la Shoah. Des centaines de milliers de Juifs ont été assassinés sur son sol sans qu’ils n’aient rencontré un seul officier allemand ».

Il a également tweeté en anglais.

Le nouveau projet de loi prévoit des sanctions judiciaires pour les individus ou les organisations qui calomnieraient la « nation polonaise » en assignant une responsabilité aux Polonais pour les crimes commis sur leur sol.

L’utilisation des phrases comme « camps de la mort polonais » pour se référer aux sites d’extermination que l’Allemagne nazie avait installés dans la Pologne occupée pendant la guerre ferait encourir trois ans de prison ou une amende aux individus ou aux organisations, selon le projet de loi.

Ce dernier, adopté vendredi, a voulu partiellement répondre à des cas, ces dernières années, où les médias étrangers ont utilisé l’expression « camps de la mort polonais » pour qualifier Auschwitz et d’autres camps dirigés par les nazis.

L’ambassade polonaise en Israël a riposté à Lapid, tweetant que « ses revendications insupportables montrent combien il est désespérément nécessaire que l’Holocauste soit enseigné, même ici en Israël ». L’objectif de la loi polonaise, a-t-elle fait savoir, « n’est pas de blanchir le passé mais de protéger la vérité contre de telles calomnies ».

Un message auquel Lapid a répondu avec indignation, demandant des excuses : « Je suis le fils d’un survivant de l’Holocauste. Ma grand-mère a été assassinée en Pologne par des Allemands et des Polonais. Je n’ai pas de leçon sur l’Holocauste à recevoir de vous. Nous vivons avec ses conséquences chaque jour inscrites dans notre mémoire collective. Votre ambassade doit faire des excuses immédiates ».

Certaines organisations majeures ont interdit le langage se référant aux camps de la mort polonais.

L’ancien président américain Barack Obama avait utilisé cette expression en 2012, causant une vive indignation en Pologne. Obama avait tenu ce propos alors qu’il remettait la médaille de la liberté à Jan Karski, un combattant de la résistance contre l’occupation nazie de la Pologne durant la Seconde Guerre mondiale – à titre posthume. Karski est décédé en l’an 2000.

Durant une cérémonie honorant les 13 lauréats de la médaille de la liberté dans la Salle Est, Obama avait expliqué que Karski « avait servi de courrier pour la résistance polonaise au cours des journées les plus obscures de la Seconde Guerre mondiale. Avant un voyage au-delà des lignes ennemies, les combattants de la résistance lui avaient dit que les Juifs étaient assassinés sur une échelle massive et l’avaient fait clandestinement entrer dans le ghetto de Varsovie et dans un camp de la mort polonais pour lui faire constater par lui-même ce qui était en cours. Jan avait donné cette information au président Franklin D. Roosevelt, délivrant l’un des tous premiers récits sur la Shoah et implorant le monde de passer à l’action ».

Après des plaintes, la Maison Blanche avait déclaré qu’Obama s’était mal exprimé.

L’entrée du camp d’extermination nazi d’Auschwitz-Birkenau avec le célèbre slogan « Arbeit macht frei » (Le travail libère). (Crédit : Joël Saget/AFP)

La législation prévoit des condamnations s’élevant jusqu’à trois ans de prison. Elle doit encore être approuvée par le sénat polonais et le président.

Les critiques disent que faire appliquer la loi à l’étranger serait impossible hors des frontières de la Pologne et qu’au sein du pays elle aura un effet glaçant sur les débats historiques et nuira à la liberté d’expression.

Tandis que la loi contient une disposition excluant les travaux universitaires et spécialisés, les opposants y voient encore un danger.

Ils s’inquiètent tout particulièrement de ce qu’elle puisse étouffer les recherches et le débat sur des sujets qui auraient la forme d’anathèmes pour les autorités nationalistes polonaises, notamment la question douloureuse des Polonais qui avaient fait du chantage aux Juifs ou les avaient dénoncés pendant la guerre.

Dorota Glowacka, conseillère juridique de la Fondation Helsinki des droits de l’Homme de Varsovie, a déclaré que la portée plus large du projet de loi augmentait le potentiel d’abus.

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