Le discours du Vel d’Hiv : un moment fort de la présidence Chirac
Le 16 juillet 1995, pour la première fois, un président reconnaît la responsabilité de la France dans les déportations de Juifs durant la guerre
Le 16 juillet 1995, Jacques Chirac s’exprime au Square des martyrs du Vel d’Hiv, à Paris : pour la première fois, un président reconnaît la responsabilité de la France dans les déportations de Juifs.
Il se démarque clairement de son prédécesseur François Mitterrand qui s’y était toujours refusé. « Je ne ferai pas d’excuses au nom de la France. La République n’a rien à voir avec ça. J’estime que la France n’est pas responsable », avait affirmé l’ancien président socialiste en 1994.
« La France, patrie des lumières et des droits de l’Homme, terre d’accueil et d’asile, la France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable », déclare ce jour de juillet le chef de l’État, qui préside les cérémonies du 53e anniversaire de la rafle du Vel d’Hiv, commencée le 16 juillet 1942 à Paris. « Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’État français », ajoutait-il.
Les 16 et 17 juillet 1942, quelque 13 000 Juifs avaient été arrêtés à leur domicile par des policiers et gendarmes français avant d’être rassemblés au Vélodrome d’Hiver pour être ensuite envoyés en camp de concentration, d’où beaucoup ne devaient pas revenir.
« Nous conservons à leur égard une dette imprescriptible », a dit Jacques Chirac devant d’anciens déportés juifs et leurs familles, les représentants de la communauté juive et les autorités religieuses.
« Reconnaître les fautes du passé et les fautes commises par l’État. Ne rien occulter des heures sombres de notre Histoire, c’est tout simplement défendre une idée de l’Homme, de sa liberté et de sa dignité. C’est lutter contre les forces obscures, sans cesse à l’œuvre », soulignait M. Chirac qui appelait à « l’esprit de vigilance » alors que « souffle l’esprit de haine, avivé ici par les intégrismes, alimenté là par la peur et l’exclusion ».
Les propos de Jacques Chirac ont été très favorablement accueillis par les participants à la cérémonie qui en ont salué le « courage ». Selon Serge Klarsfeld, président des Fils et filles des déportés juifs de France, ce discours, « salué dans le monde entier comme une courageuse et salutaire reconnaissance », a marqué « une profonde rupture ».
Se plaçant résolument dans les pas de Jacques Chirac, le président François Hollande a reconnu à son tour en 2012 que le crime commis à l’encontre des Juifs lors de la rafle du Vel d’Hiv l’avait été « par la France ».
En juillet 2017, son successeur Emmanuel Macron a tenu à « perpétuer le fil tendu en 1995 par Jacques Chirac« , lors de la commémoration de la rafle à laquelle était convié pour la première fois un Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. « C’est bien la France qui organisa la rafle », a-t-il alors exprimé.
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En 2005, Jacques Chirac s’était rendu au camp d’extermination d’Auschwitz, en Pologne, accompagné de Simone Veil, rescapée des camps, et de Serge Klarsfeld, président de l’Association des fils et filles de déportés juifs de France, à l’occasion du 60e anniversaire de l’ouverture du camp.
Il y avait inauguré une exposition permanente française installée dans l’un des pavillons.
Cette cérémonie avait réuni des anciens déportés et 44 chefs d’Etat, dans ce lieu devenu le symbole de la Shoah.
Chirac avait rendu un hommage solennel à « la mémoire de chacune de ces vies dignes du plus profond des respects ».
« Le souvenir de leur humanité qui nous hante. Le témoignage de leur existence martyrisée qui nous oblige », avait-il déclaré dans un discours évoquant sa « volonté de témoigner, volonté de transmettre. Volonté d’honorer. Et volonté d’agir. »