La France ne vend pas d’armes à Israël, réaffirme le ministre des Armées
Le navire à destination d'Israël a quitté Marseille sans ses conteneurs de composants militaires, qui devaient partir en Israël devaient ensuite être réexportées en totalité

La France a une position « claire » qui est de ne pas vendre d’armes à Israël, a déclaré vendredi soir le ministre des Armées Sébastien Lecornu, après le refus de dockers du port de Marseille (sud-est) de charger sur un navire à destination de Haïfa un conteneur rempli de composants militaires.
« La position de la France est on ne peut plus claire. Il n’y a pas d’armes vendues à Israël. Et pour cause, Israël est un des principaux concurrents des industries françaises », a affirmé M. Lecornu sur la chaîne de télévision LCI.
Seuls des « composants » destinés au « Dôme de fer », l’un des systèmes de défense israélien qui protège le pays des attaques de missiles, roquettes et drones, ou des « éléments pour la réexportation » sont vendus à Israël, a-t-il ajouté.
Dans ce dernier cas, « certaines choses partent en Israël, font l’objet d’une intervention industrielle et sont souvent réexportées. Parfois même, d’ailleurs, en France. Et tout cela fait l’objet d’un contrôle », a assuré le ministre.
Le porte-conteneurs Contship Era, à bord duquel les dockers CGT du port de Marseille-Fos ont refusé mercredi et jeudi de charger trois conteneurs remplis de composants militaires destinés à Israël, a quitté Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) vendredi matin, a confirmé à l’AFP un opérateur portuaire.
« Je vous confirme que le navire est bien parti et que les conteneurs ne sont pas à bord », a indiqué à l’AFP Nicolas Morleo, directeur des opérations de Seayard, l’exploitant du terminal de Fos-sur-Mer qui était chargé des opérations commerciales sur le navire. Selon lui, les conteneurs vont être renvoyés à leurs expéditeurs.
Le port de Marseille-Fos a confirmé à l’AFP que le Contship Era avait appareillé à 3 h 25 vendredi. D’après le site internet spécialisé Marinetraffic, il se trouvait vers 16 h dans les eaux territoriales italiennes de la mer de Ligurie, au large de la ville d’Imperia. Le navire fait route vers le port de Gênes, sa prochaine escale, où il devrait accoster vers 21 h, selon Marinetraffic.
Mercredi, les dockers de Marseille-Fos ont refusé de charger à bord du navire, dont la destination finale est Haïfa en Israël, un conteneur avec des pièces pour fusils mitrailleurs fabriquées par l’entreprise marseillaise Eurolinks, afin de ne pas « participer au génocide en cours orchestré par le gouvernement israélien ». Le lendemain, ils ont également bloqué à quai deux autres conteneurs remplis de tubes de canons fabriqués par la société Aubert et Duval, devant être transportés par le même navire.
Le ministère des Armées avait précisé jeudi que la licence passée avec Eurolinks prévoyait que les pièces soient réexportées en totalité par Israël vers la France et d’autres pays partenaires. Les éléments devaient ainsi aller en Israël seulement pour être assemblés. Pour les tubes de canons de la société Aubert et Duval, il s’agit, selon une source proche du dossier, « d’une licence de réexportation vers des pays européens ».
« La France ne fournit pas d’armes à Israël », a répété vendredi le ministère des Armées français. Mais Israël reste un « partenaire », a ajouté le ministère : « On ne va pas se priver ni de sa technologie ni de ses compétences. »

« Nous ne livrons pas de matériel militaire utilisé à Gaza », a assuré Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, sur RTL, avant de citer « deux exceptions ».
« Ce sont les composantes qui permettent à Israël de se défendre, notamment avec le Dôme de fer ».
« Et puis par ailleurs, [il y a] du matériel qui peut être assemblé en Israël, mais qui a vocation à être réexporté. C’est dans ce cadre-là que se situent ces exportations », a-t-il dit.
Toutefois, si le matériel militaire d’Eurolinks était utilisé à Gaza « l’entreprise qui l’exporte se placerait en contravention vis-à-vis du droit », a-t-il dit.
Lors de cet entretien, il a aussi assuré que, dans cette guerre, la France « s’est mobilisée dès le premier jour », affirmant « qu’un mois après le début de la guerre déclenchée par le massacre antisémite du 7 octobre, c’est la France qui a accueilli la première conférence internationale qui a permis de lever un milliard d’euros d’aide humanitaire pour Gaza ».
« C’est aussi la France », a-t-il ajouté, « qui est le premier pays occidental à avoir déployé, à proximité de Gaza, un porte-hélicoptère pour pouvoir soigner les médecins gazaouis. C’est encore la France qui soutient activement, qui est l’un des rares pays à le faire, l’Autorité palestinienne et c’est la France qui prépare cette conférence sur les deux États qui se tiendra dans quelques jours à New York. Si tous les pays du monde avaient adopté la même politique que la France, alors nous n’en serions pas là ».

D’autres fédérations CGT, notamment des douanes, ont apporté leur soutien à l’action des dockers de Fos-sur-Mer. « Des douaniers ne veulent pas être complices de ce génocide », écrivent-ils dans un communiqué vendredi, ajoutant : « La douane peut mettre en place une interdiction d’exportation d’armes et de pièces d’armement, alors faisons-le ! »
Des dockers génois qui, en solidarité également, devaient bloquer l’activité du port italien ce vendredi après-midi, ont reporté leur action à samedi matin, le temps de vérifier que « les accords conclus avec les dockers de Marseille étaient respectés », notent-ils sur leur page Facebook.
Selon les règles en vigueur sur les ports marseillais, les dockers ne peuvent être contraints à charger tel ou tel type de matériel sur les bateaux. Par le passé, dans les années 1960, ils avaient déjà refusé de charger plusieurs bâtiments destinés au contingent français déployé en Algérie. Les médias d’investigation Disclose et MarsActu, qui ont révélé les livraisons, deux cargaisons similaires ont déjà été envoyées vers Israël depuis le début de l’année.