Israël en guerre - Jour 569

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Le « Souterrain de Gaza », la menace qu’Israël a choisi d’ignorer

Les attaques par les tunnels du Hamas sont un réel danger, Israël devra reconquérir Gaza pour éviter leur reconstruction

Avi Issacharoff est notre spécialiste du Moyen Orient. Il remplit le même rôle pour Walla, premier portail d'infos en Israël. Il est régulièrement invité à la radio et à la télévision. Jusqu'en 2012, Avi était journaliste et commentateur des affaires arabes pour Haaretz. Il enseigne l'histoire palestinienne moderne à l'université de Tel Aviv et est le coauteur de la série Fauda. Né à Jérusalem , Avi est diplômé de l'université Ben Gourion et de l'université de Tel Aviv en étude du Moyen Orient. Parlant couramment l'arabe, il était le correspondant de la radio publique et a couvert le conflit israélo-palestinien, la guerre en Irak et l'actualité des pays arabes entre 2003 et 2006. Il a réalisé et monté des courts-métrages documentaires sur le Moyen Orient. En 2002, il remporte le prix du "meilleur journaliste" de la radio israélienne pour sa couverture de la deuxième Intifada. En 2004, il coécrit avec Amos Harel "La septième guerre. Comment nous avons gagné et perdu la guerre avec les Palestiniens". En 2005, le livre remporte un prix de l'Institut d'études stratégiques pour la meilleure recherche sur les questions de sécurité en Israël. En 2008, Issacharoff et Harel ont publié leur deuxième livre, "34 Jours - L'histoire de la Deuxième Guerre du Liban", qui a remporté le même prix

Un tunnel creusé par des Palestiniens sous la frontière entre la bande de Gaza et Israël. Découvert par l'armée israélienne le 13 octobre 2013 (Crédit : David Buimovitch/Flash90)
Un tunnel creusé par des Palestiniens sous la frontière entre la bande de Gaza et Israël. Découvert par l'armée israélienne le 13 octobre 2013 (Crédit : David Buimovitch/Flash90)

La construction des tunnels à l’intérieur de Gaza et sous les frontières israéliennes n’est plus un projet mené au nez et la barbe d’Israël et du peuple palestinien.

Tous les enfants à Gaza, comme tous les sous-officiers de l’intelligence militaire, savaient que, sous la ville de Gaza, et au-delà, un réseau de tunnels était creusé pendant ces cinq dernières années. Il y a eu un investissement d’un million de dollars. En d’autres termes, on peut appeler ce réseau : le Souterrain de Gaza.

Pourtant le public israélien a été surpris par l’envergure des tunnels quand le danger s’est fait ressentir ces deux dernières semaines.

La presse israélienne avait fait écho de ce phénomène, mais il semblerait que les dirigeants politiques – et dans une certaine mesure, les dirigeants sécuritaires – ont préféré minimiser la menace. Aujourd’hui, au 18ème jour de l’opération Bordure protectrice, le public a conscience du danger stratégique.

La stratégie souterraine du Hamas n’a pas éclos en une nuit. Afin de construire 40 « tunnels d’attaque » qui serpentent le sous-sol de la bande de Gaza jusqu’à la frontière (et le nombre pourrait être légèrement plus élevé), le Hamas avait besoin d’une aide importante, soit d’une grande organisation ou d’une entité étatique.

Et on ne parle pas uniquement de l’aide financière, mais aussi de conseils professionnels. Le Hamas aurait pu utiliser les experts qui les avaient aidé pour les tunnels creusés à Rafah, sous la frontière entre Gaza et l’Egypte. Mais ces tunnels étaient plus simples à creuser et ne demandaient aucun investissement ou un effort extraordinaire.

Les tunnels en Israël étaient (et sont encore, car l’armée israélienne ne les a pas tous détruits) une autre histoire. La plupart sont bétonnés et assez grands pour permettre à des essaims de terroristes de passer par là pour attaquer ses cibles en Israël. Une aide importante au niveau gouvernemental a dû être nécessaire pour aider à les construire et, ce n’est pas une mince affaire, guider le forage.

Quel gouvernement ou entité quasi-étatique cela pourrait-il être ? La liste des suspects est assez courte. Le Hezbollah et l’Iran sont les seuls acteurs de la région qui souhaiteraient blesser Israël et qui ont également la capacité pour construire des tunnels sophistiqués et solides qui ne s’effondreraient pas.

Pourtant, les tunnels qui servent à l’attaque ne sont qu’une partie du Souterrain de Gaza. Le Hamas a également préparé des tunnels pour permettre à ses agents de se déplacer d’un endroit à un autre sans se faire détecter.

Il y a aussi tout un système de bunkers où il y a ses centres de commandement et de contrôle, qui sont indemnes. Les dirigeants du Hamas de l’aile politique et militaire se sont réfugiés dans d’autres bunkers, et eux aussi, sont sains et saufs.

A la veille de l’opération, l’armée israélienne avait calculé que le Hamas avait environ 15 tunnels d’attaque – une sous-estimation importante. Est-ce un échec majeur des renseignements ? Je ne le vois pas de cette façon. Il n’existe aucun moyen fiable pour que les renseignements puissent prendre connaissance de chaque tunnel qui existe.

L’échec vient plutôt du niveau politique qui a préféré ignorer la menace croissante sous la frontière au sud d’Israël pendant cinq ans. Les responsables avaient connaissance des tunnels, et savaient aussi pour les 9 000 – 10 000 roquettes du Hamas.

Il était plus facile pour eux de fermer les yeux sur ce sujet par commodité et par amour du calme. Il était plus facile pour eux de se chamailler avec le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas sur sa demande épouvantable d’adhérer à des organisations de l’UNESCO. (Ce qui pose clairement une menace existentielle pour l’Etat d’Israël, si vous me pardonnez mon sarcasme).

Il était plus facile pour eux de développer les implantations en Cisjordanie, que de faire face à une guérilla armée et dangereuse qui est restée calme tant que cela était commode pour elle.

Maintenant, bien sûr, les tunnels sont décrits comme la principale source de menace, alors qu’ils l’ont toujours été, et qui nécessitent une incursion terrestre des soldats israéliens dans la bande de Gaza. Maintenant, en effet, à la demande de certains bureaux gouvernementaux, on est passé à l’autre extrême. On demande à l’armée israélienne de rester à l’intérieur de Gaza aussi longtemps qu’il le faut pour « finir le travail ».

Si, toutefois, Israël annonce dans quelques jours qu’il a détruit les tunnels d’attaque et si l’armée israélienne se retire ses forces de Gaza, que se passera-t-il ?

Il est évident que le Hamas va reconstruire ces tunnels à un rythme accéléré. Au prochain conflit, disons dans deux ans, les forces militaires n’auront pas affaire à 40 tunnels, mais au double ou au triple. Ils seront tellement grands qu’un policier du Hamas devra se tenir aux principales intersections souterraines [pour réguler la circulation]… ou peut-être qu’ils vont installer des feux de circulation pour tous les terroristes.

Deux choses peuvent empêcher que le conflit se répète avec un Hamas plus fort à l’avenir : premièrement, une opération « à la racine » qui incluraient, en effet, la reprise en charge de la bande de Gaza et l’éradication de la direction du Hamas. Une telle opération coûterait la vie de centaines de soldats israéliens, et aucun homme politique ne voudra être tenu responsable de ces pertes.

La deuxième solution serait de graver la notion de dissuasion dans la conscience du Hamas. Comme Israël l’a fait pendant la Seconde Guerre du Liban en 2006 dans le quartier de Dahiyeh à Beyrouth. Ce quartier était un bastion du Hezbollah qui s’est transformé en piqure de rappel pour les dirigeants [du Hezbollah] sur les dangers de s’en prendre à Israël.

A ce stade, nous n’en sommes pas là. Israël n’a pas l’intention d’envoyer ses troupes pour déraciner complètement le Hamas. Il est peu probable aussi que le Hamas ait été suffisamment dissuadé de planifier de futures attaques militaires contre Israël.

Les Palestiniens, cependant, sont fatigués des combats, et leur conscience a été brûlée à profusion. La question est de savoir si les dirigeants de l’aile militaire du Hamas, qui tirent ses missiles sur Israël depuis le cœur des quartiers peuplés de Gaza, se préoccupent de tout ça. Son comportement à Chajaya, où la guerre a été dévastatrice pour les habitants locaux de Gaza, suggère que ce n’est pas le cas.

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