L’envoyé ukrainien en Israël veut une plus grande implication face à l’offensive russe
Yevhen Korniychuk demande à Jérusalem de s'engager en permettant le transfert d'équipements défensifs, notant l'importance, pour Kiev, des systèmes d'alerte israéliens promis
Revenant sur une année de guerre dans son pays natal, l’envoyé ukrainien en Israël explique que Kiev considère l’État d’Israël comme un allié, même s’il exprime ouvertement sa déception face au positionnement relativement neutre adopté par l’État juif face à l’invasion russe.
« Nous pensons encore qu’Israël est un pays ami », déclare Yevhen Korniychuk lors d’un entretien avec le Times of Israel, vendredi, un an très exactement après que les troupes russes ont lancé leur offensive dans les plus grandes villes ukrainiennes.
Tandis que les récents déplacements à Kiev du ministre des Affaires étrangères Eli Cohen et de deux députés de la Knesset ont été salués, l’Ukraine attend davantage, note Korniychuk.
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« Le président a clairement établi devant les deux délégations que la politique du gouvernement israélien doit changer et que nous devons enfin pouvoir obtenir des armes de défense de la part d’Israël », ajoute-t-il.
L’Ukraine a demandé à Israël de lui fournir ses systèmes de défense antimissiles permettant de bloquer les projectiles à court et à moyenne portée, le Dôme de fer et la Fronde de David.
L’État juif craint que répondre favorablement à ces demandes ne nuise aux liens tissés entre Jérusalem et Moscou – ce qui pourrait compliquer les raids aériens des pilotes israéliens dans le ciel syrien et rendre la vie difficile aux Juifs qui vivent en Russie.
Mais Israël a également besoin de ses missiles intercepteurs – en nombre limité – si une guerre devait éclater contre le Hamas à Gaza ou contre le Hezbollah au Liban.
« Israël doit être du bon côté de l’Histoire »
« Nous comprenons bien qu’Israël n’a pas beaucoup de stocks aujourd’hui mais il ne semble malheureusement pas que la guerre soit appelée à se terminer demain », dit Korniychuk. « C’est à long-terme et si nous convenons enfin d’un approvisionnement en équipement défensif, que ce soit dans trois mois, six mois ou neuf mois, ça ne pose pas de problème ».
« Mais Israël doit être du bon côté de l’Histoire », insiste-t-il.
Quand il était à Kiev au début du mois, Cohen avait annoncé qu’Israël aiderait à installer un système d’alerte aux missiles russes pour les civils dans les quatre mois à venir.
Pour Korniychuk, le calendrier proposé par le ministre des Affaires étrangères n’est pas assez satisfaisant.
« Écoutez, nous sommes au beau milieu d’une guerre cruelle », dit-il. « Cela fait six mois que nous évoquons ouvertement le sujet. Et nous n’en avons pas parlé discrètement, nous ne nous sommes pas cachés. On nous a promis que nous l’obtiendrions et nous n’y sommes pas encore aujourd’hui. »
Le système sera initialement déployé dans le cadre d’un essai-pilote qui pourra couvrir, au mieux, une ville comme Kiev.
Cohen avait également annoncé que Jérusalem offrirait la somme de 200 millions de dollars en garantie de prêt pour construire des structures civiles ou de santé. Korniychuk dit que Kiev « sera heureux d’utiliser ce prêt pour acquérir des systèmes défensifs israéliens ».
Korniychuk indique avoir été surpris par le positionnement adopté par l’État juif depuis le premier jour de l’offensive russe lorsqu’il est apparu clairement que le chef de la diplomatie israélienne Yair Lapid condamnait Moscou, le Premier ministre Naftali Bennett maintenant, pour sa part, un canal de communication ouvert avec le président russe Vladimir Poutine.
Lorsque le gouvernement d’unité Bennett-Lapid était au pouvoir, Israël avait cherché à conserver un positionnement nuancé, conservant des relations à la fois avec Moscou et Kiev. Les responsables ukrainiens n’avaient pas manqué de faire part de leur frustration, interpellant publiquement Israël à un certain nombre de reprises pour son refus d’adopter une posture plus ferme à l’égard de Moscou et pour son refus de livrer des systèmes de défense antiaérienne au pays assiégé.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui avait salué (pour une fois) la « prudence » de ses prédécesseurs, devrait conserver la même retenue. Mais la visite effectuée par son ministre des Affaires étrangères, un allié du Likud, indique qu’il désire au moins être perçu comme faisant un pas dans la direction de Kiev.
Korniychuk dit avoir été aussi choqué par des propos tenus par Bennett dans une interview récente où l’ancien Premier ministre a expliqué qu’il avait coordonné l’aide apportée à l’Ukraine avec le maître du Kremlin.
Israël avait temporairement ouvert un hôpital de campagne sur le territoire ukrainien, l’année dernière – et continue à envoyer des groupes électrogènes et autres formes d’assistance.
« Votre aide humanitaire a été importante pour nous dans une certaine mesure parce que sans cette aide, nous ne nous sentirions pas aussi forts aujourd’hui », explique Korniychuk. « Mais il est toutefois évident qu’on ne peut pas gagner une guerre avec seulement de l’aide humanitaire ».
Concernant l’avenir, Korniychuk souligne que son pays espère que le conflit ne durera pas encore une nouvelle année entière. Mais l’issue du conflit ne dépend pas seulement des Ukrainiens, note-t-il.
« Malheureusement, nous sommes parfaitement conscients que sans le soutien de nos alliés, nous ne tiendrons pas aussi longtemps », déclare-t-il.
Si l’Ukraine reçoit l’aide demandée auprès de ses alliés occidentaux, le pays pourrait bien remporter la victoire en quelques mois, ajoute-t-il.
« Je peux vous affirmer que la propagande russe est plus forte que l’armée russe », poursuit-il. « Nous l’emportons donc sur le front et nous sommes heureux de conserver notre force – nous sommes également unis comme nous ne l’avons jamais été dans le passé ».
Son pays ne cherche pas à négocier avec Moscou, explique-t-il. « Les Russes veulent notre mort à tous. Face à cette réalité, vous comprenez bien qu’il n’y a pas de place pour une éventuelle médiation ».
Et les Ukrainiens continueront à se battre jusqu’à la libération de tous leurs territoires, promet-t-il – la Crimée qui avait été annexée en 2014 incluse.
« Plus nous subissons les atrocités russes dans notre pays, moins la population désire abandonner des territoires en échange de la paix », conclut-il.
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