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Les fraudes au Bitcoin peuvent-elles aggraver la bulle spéculative ?

Le Bitcoin serait le nouveau terrain de jeu des fraudeurs ayant prospéré dans l'industrie des options binaires, et qui appliqueraient les vieilles recettes à ce nouveau produit

Journaliste Société-Reportage

Evolution du Bitcoin du 1 décembre 2016 (680$) au 27 novembre 2017 (9718$) sur le site Abcbourse.com.
Evolution du Bitcoin du 1 décembre 2016 (680$) au 27 novembre 2017 (9718$) sur le site Abcbourse.com.

Le 28 novembre 2017 a été une journée historique pour les détenteurs de Bitcoin : la crypto-monnaie a dépassé le seuil des 10 000 dollars par action. Pour rappel, le Bitcoin valait, fin 2013, autour de 700 dollars. Il ne cesse depuis de déjouer les prédictions les plus optimistes.

Cette crypto-monnaie est devenue l’investissement à la mode, malgré sa très grande volatilité, dénoncée par l’Autorité des marchés financiers. Mi-décembre, son cours frôlait la barre des 20 000 dollars. Quelques jours plus tard, sont taux chutait de 30 %. Il plafonnait, à l’heure où nous écrivons ces lignes, autour des 16 000 dollars.

« Je suis effondré par l’augmentation folle du taux de change, » déplore le mathématicien Cyril Grunspan, spécialiste en crypto-monnaie, et membre actif dans la « communauté Bitcoin ». « Le réseau est arrivé à saturation, détaille-t-il. Les crypto-monnaies sont encore plus volatiles que les valeurs boursières ».

Mais surtout, les crypto-monnaies n’étant encadrées par aucune réglementation à l’heure actuelle, les créateurs de ces monnaies peuvent décider d’abandonner leur projet sans compensation pour les investisseurs.

« Il n’y a aucun remboursement en cas de faillite, » confirme Grunspan, par ailleurs responsable pédagogique du département d’ingénierie financière de l’Ecole supérieure d’ingénieurs Léonard-de-Vinci à Paris.

Au-delà de sa volatilité, une autre menace planerait sur les crypto-monnaies. Leur adoption par l’ex-industrie frauduleuse israélienne des options binaires comme nouveau produit d’appel.

La question se pose alors : une fraude au Bitcoin, aussi organisée et professionnelle que fut celle des options binaires pourrait-elle mettre en danger les crypto-monnaies déjà mises sous tension du fait de leur popularité exponentielle en augmentant massivement le nombre d’acheteurs ?

Il existe un précédent : en 2009, on soupçonne que l’injection de l’argent détourné de la fraude au marché du carbone aurait fait exploser le prix de l’immobilier de luxe israélien.

Depuis cet été, on observe que le nombre d’offres d’emploi dans le domaine des crypto-monnaies explose en Israël. Et selon des informations recueillies sous couvert dans un bureau de téléprospection de Tel Aviv dédié à la fois à la vente de diamants d’investissement et de Bitcoins, il est très probable que les crypto-monnaies soient le nouveau terrain de jeu de l’industrie frauduleuse aux options binaires, interdite depuis le mois d’octobre, et contrainte de rechercher un nouveau produit d’appel.

La Knesset a voté le 20 octobre dernier une loi qui interdit l’industrie des options binaires en Israël. Cette loi est le résultat direct de l’enquête du Times of Israel sur la fraude, initiée par un article publié en mars 2016, intitulé, « Les Loups de Tel Aviv : la vaste arnaque immorale des options binaires d’Israël exposée ». On estimait à 10 000 le nombre d’employés de l’industrie frauduleuse des options binaires, concentrés principalement autour de Tel Aviv et sa banlieue.

Si cette nouvelle fraude massive est confirmée, la vente de crypto-monnaies de bonne intention se trouverait alors polluée par des vendeurs pro-actifs, au savoir-faire aiguisé par de longues années passées dans l’industrie des casinos en ligne, du Forex, des options binaires, et du diamant d’investissement. Avec le risque de faire dangereusement gonfler la bulle.

L’arnaque au marché du carbone, un précédent ?

Entre octobre 2008 et juin 2009, la fraude colossale au marché du carbone aurait causé des perturbations dans le marché immobilier israélien du luxe : sur cette même période, on constate une flambée des prix astronomique, et l’on soupçonne que l’investissement massif des sommes détournées du marché du carbone aurait joué ce rôle de levier.

On parlait alors de plusieurs centaines de millions d’euros injectés dans de nouveaux programmes immobiliers avec pour conséquence une envolée spectaculaire des prix.

Entre fin 2008 et début 2009 les prix de l’immobilier israéliens ont amorcé une hausse qui n’a pas encore cessé à ce jour. L’arrivée massive de capitaux issus de la fraude au marché du carbone peut être considérée comme un levier de cette flambée (Crédit: Israël Bureau of Statistics)

Pourtant Meny Rosenfeld, le président de l’association israélienne du Bitcoin, et artisan de technologies ayant permis l’évolution et la sécurisation de l’utilisation des crypto-monnaies, reste très confiant : « Les arnaques sont en effet nuisibles et il est dommage que la technologie de Bitcoin soit utilisée à cette fin. Mais comme le dit le proverbe, ‘aux idiots l’argent file entre les doigts’ et il n’y a pas grand-chose à faire à ce sujet. Chaque nouvelle innovation apporte de nouvelles opportunités pour les escroqueries, et le marché devra juste apprendre de l’expérience et s’adapter ».

Quant à la bulle, qui a vu le Bitcoin caresser la barre des 20 000 dollars, il ne s’en inquiète guère plus : « le Bitcoin a déjà connu trois bulles. Ce n’était jamais agréable à l’époque, mais le Bitcoin est revenu plus fort à chaque fois. Les bulles peuvent être perturbatrices, mais leurs effets sont temporaires et ne sont pas dangereux pour la viabilité à long-terme du Bitcoin ».

Et pourtant…

« Pourtant le Bitcoin est un très bon produit, » plaide Cyril Grunspan.

« Les Initial Coin Offering (ICO – nom donné aux lancements de nouvelles crypto-monnaies), permettent à des starts-ups de lever des fonds quand les banques ne les suivent pas, argumente-t-il. Mais elles sont également soupçonnées dans quelques cas de dissimuler des pyramides de Ponzi ».

Cyril Grunspan (Crédit : capture d’écran De vInci)

Il regrette l’apparition d’ICO un peu hors normes : « On a vu approcher des projets bizarres, pour financer on ne sait qui. Puisque rien n’est régulé, on peut acheter toutes sortes de produits ».

« Il ne faut pas oublier qu’une fois l’ICO lancée, ses créateurs peuvent décider du jour au lendemain d’abandonner le projet, » ajoute-t-il.

Il n’existe aucune protection, aucun cadre qui protège les investisseurs.

A ce titre, une ICO n’aurait même pas besoin d’être frauduleuse pour être une arnaque. Il suffirait à des personnes mal-intentionnées de proposer une pseudo-innovation technologique puis d’abandonner les investisseurs en rase campagne.

Pour investir dans une ICO, Grunspan explique la liste des vérifications nécessaires : « il faut que le projet soit bon, ou du moins qu’on ait envie d’y croire et qu’il donne confiance, même s’il est extrêmement novateur. Il faut que les développeurs soient connus, qu’ils aient fait leurs preuves. Généralement un projet se dote également d’un advisor reconnu, qui donne une caution scientifique au projet ». Mais même la présence d’un advisor reconnu ne constitue pas une garantie suffisante.

En cas de doute, l’AMF a mis à disposition un numéro Epargne Info Service: 01 53 45 62 00. Vous pouvez également consulter le site très complet <a href= »https://bitcoin.fr/ressources/ » target= »_blank » rel= »noopener »>bitcoin.fr</a>, qui renvoie vers une foule d’articles expliquant le commerce des bitcoins, et le fonctionnement assez complexe de la technologie sous-jacente à cette crypto-monnaie.

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