Les membres de la synagogue de Haïfa ravagée par une roquette du Hezbollah jurent de la rebâtir
"2 heures avant l'attaque, nous étions 20 à l'intérieur" ; "ces tirs blessent et saccagent, mais les habitants vivent normalement parce que, sinon, ça signifierait que le Hezbollah a gagné"
HAIFA – Le « miracle » dans la synagogue de Haïfa touchée par les roquettes du groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah samedi soir n’a pas été que les rouleaux de la Torah à l’intérieur de l’arche sainte aient été épargnés.
« Le grand miracle, c’est que nous n’étions pas tous en train de prier à l’intérieur quand les roquettes sont tombées », a souligné Gershon Saft, un habitué de longue date, au Times of Israel dimanche après-midi, alors qu’il se tenait à côté des ruines de la salle d’étude qui fait partie de la synagogue Avot Uvanim (Pères et fils) dans le quartier du Carmel à Haïfa, au sommet du mont Carmel.
« Deux heures avant l’attaque, nous étions vingt à l’intérieur », a déclaré Saft, précisant que chacun était rentré chez soi après la prière de la Havdalah, qui marque la fin du Shabbat.
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Deux heures plus tard, dix roquettes ont été lancées depuis le Liban. L’armée israélienne a indiqué que certaines d’entre elles avaient été interceptées. Le bâtiment historique en pierre de la salle d’étude, vieux de 150 ans, a été détruit et la synagogue principale a été légèrement touchée. La salle des fêtes de la synagogue, qui abritait temporairement une école maternelle privée, a été endommagée, de même que des dizaines d’appartements adjacents. Des voitures ont été pulvérisées et plusieurs personnes ont été légèrement blessées. Mais personne n’a été tué.
« C’est un grand miracle », a répété Saft.
Le Hezbollah a pris Haïfa pour cible et tiré des centaines de roquettes ces dernières semaines, alors qu’Israël a intensifié ses frappes au Liban dans le but d’éloigner le groupe terroriste de la frontière et de permettre aux dizaines de milliers de résidents évacués du nord d’Israël de rentrer chez eux en toute sécurité.
Le Hezbollah a commencé à lancer des missiles sur Israël il y a plus d’un an, en soutien à son allié le Hamas, à la suite du pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien le 7 octobre 2023 dans le sud d’Israël, qui a fait plus de 1 200 morts et au cours duquel 251 personnes ont été prises en otage et emmenées de force à Gaza.
Signes de destruction
Aux alentours de la synagogue, il y avait les signes de la destruction causée par l’attaque à la roquette de samedi soir lorsque le Times of Israel s’y est rendu en début de semaine : des voitures calcinées dans la rue, des vitres brisées et une vitrine affichant les heures de prière de la synagogue gisaient au milieu des décombres.
Tandis que des techniciens s’attelaient à rétablir l’électricité dans la zone, d’autres inspectaient les dégâts et accrochaient quelques drapeaux israéliens sur le flanc de l’édifice.
Les ouvriers ont tenté d’entrer dans la salle d’étude pour retirer les rouleaux de la Torah, mais se sont arrêtés en raison du risque d’effondrement. Joint par téléphone lundi, Shlomo Gerst, le chef du comité directeur de la synagogue, a déclaré que les rouleaux avaient finalement été extraits, sans dommages.
« Nous sommes soulagés d’avoir pu les sauver », a-t-il ajouté.
« Dieu merci, personne n’a été blessé, mais les dégâts sont considérables. »
Des centaines de livres qui se trouvaient dans la salle d’étude, dont une édition du Talmud vieille de 200 ans, ont été détruits.
Pour l’instant, les membres de la synagogue prient ailleurs. Saft a indiqué qu’ils pourraient retourner dans le bâtiment principal de la synagogue, qui a subi beaucoup moins de dégâts, dès que l’abri antiatomique sera à nouveau accessible. Saft a également indiqué que la salle d’étude serait restaurée dès que possible.
« Elle sera encore plus belle », a-t-il promis.
Immédiatement après l’attaque, des policiers de Haïfa, des pompiers, des équipes du service de secours du Magen David Adom (MDA) et du Commandement du Front intérieur se sont rendus sur le site, selon Eliran Tal, porte-parole de la municipalité de Haïfa.
« Notre premier objectif était de vérifier les conditions de vie des résidents et de nous assurer qu’il n’y avait pas d’autres bombes ou de dangers potentiels », a expliqué Tal.
« Le bâtiment ayant un sous-sol, il a absorbé le choc de la roquette. La bombe s’est enfoncée dans le sol et les dégâts ont été moins importants. »
Dès dimanche matin, l’équipe d’intervention d’urgence de Haïfa et les travailleurs sociaux avaient installé une tente dans la rue pour aider les habitants. Dans l’après-midi, Yaffa Peleg, 76 ans, hébétée et en état de choc, était assise sous la tente avec un œil au beurre noir, un nez ensanglanté et des bandages à la main et au pied.
Elle raconte qu’elle et son époux se trouvaient dans leur appartement situé au troisième étage d’un immeuble en face de la synagogue lorsque les sirènes d’alerte ont retenti, signalant l’arrivée de roquettes. Les habitants de Haïfa ont 60 secondes pour rejoindre un abri.
Dès qu’ils ont entendu les sirènes, elle et son mari se sont dirigés vers l’abri situé au bas de l’immeuble. Mais ils n’y sont pas parvenus à temps.
« Il y a eu un boum très fort, et soudain, tout est devenu noir. J’ai été emportée par la déflagration et je suis tombée dans les escaliers. Mon mari ne m’a pas trouvée dans l’obscurité. Une fois qu’il l’a fait, il a appelé une ambulance. »
Yaffa a passé la nuit à l’hôpital Bnei Zion et a été libérée dans la matinée.
« Je ne peux pas décrire ce que j’ai ressenti », a déclaré Yaffa, assise à côté de quelques-uns de ses effets personnels récupérés dans son appartement. Le couple, ainsi que des dizaines d’autres résidents des immeubles voisins, séjourneront à l’hôtel Dan Panorama de Haïfa jusqu’à ce que d’autres dispositions soient prises.
« Ma mère est une héroïne », a déclaré Shany Peleg, debout à côté d’elle.
Sauver l’histoire de Haïfa
La synagogue et la salle d’étude sont situées dans la rue Keller, nommée d’après Fritz Keller, le vice-conseil allemand à Haïfa, qui a fait construire une maison d’été à deux portes du bâtiment de la synagogue à la fin des années 1800. Keller faisait partie des Templiers allemands, de fervents chrétiens qui s’étaient installés à Haïfa en 1868 pour construire ce qu’ils appelaient la Terre sainte.
Ils y ont également fondé la banlieue de Carmelheim, aujourd’hui connue sous le nom de quartier du Carmel, au sommet du mont Carmel. Le quartier est plein d’arbres et de parcs, ainsi que de bâtiments historiques en pierre.
La maison d’été de Keller est devenue l’Institut Gottlieb Schumacher de l’Université de Haïfa pour l’étude de la présence chrétienne en terre d’Israël.
Le toit du bâtiment a été endommagé lors de l’attaque. L’institut a publié une annonce d’urgence sur les réseaux sociaux pour demander de l’aide afin de déplacer les matériaux historiques du bâtiment avant les pluies annoncées.
Une trentaine de bénévoles ont travaillé toute la journée de dimanche, se déplaçant dans les salles de l’institut, sans électricité, à l’aide de lampes de poche et de téléphones portables pour emballer tout ce qu’ils pouvaient. Les volontaires ont porté des cartons de documents et de livres dans les escaliers jusqu’à la rue, où un camion les attendait pour les emmener dans un entrepôt. Sur le trottoir, à côté des livres et des affiches, se trouvait une vieille valise en cuir abîmée avec des autocollants de voyage, dont un correspondant à la gare Victoria.
« L’institut dispose d’informations remontant à la période des Templiers à Haïfa », a déclaré David Algrisi, le responsable logistique de l’institut. Il a expliqué qu’ils travaillaient contre la montre pour sauver le matériel, allant même jusqu’à faire appel à son fils, qui avait pris l’avion de New York à 5 heures du matin pour arriver en Israël.
« Nous sauvons l’histoire de la ville », a-t-il ajouté.
La réalité des tirs de roquettes
« C’est une plaie ouverte dans la communauté », a déclaré Sara Barnea, une habitante de Haïfa qui vit à une dizaine de minutes de là. Elle se tenait avec une foule de spectateurs à l’une des extrémités bouclées de la rue Keller et a expliqué qu’elle marchait souvent dans cette rue parce qu’elle se trouve juste derrière l’auditorium de Haïfa et qu’elle est parallèle au boulevard principal du Carmel.
Barnea a dit s’être habituée aux tirs de roquettes du Hezbollah qui semblent se produire « presque tous les deux jours ». Quand elle marche dans la rue et que des sirènes d’alerte retentissent, elle se dit : « S’il n’y a pas de protection, j’essaie simplement d’accepter mon sort. »
Barnea a observé que les habitants de Haïfa ne semblaient pas perturbés alors qu’ils marchaient dans les rues, prenaient des bus et empruntaient le métro Carmelite pour monter et descendre la ville montagneuse.
Dans la rue Jaffa, au centre-ville, près du port de Haïfa Bay, Michal Menachem, une chanteuse, et Alex Kolonaty, propriétaire du studio Double B, étaient assis dans un café.
« Il y a des moments où nous avons peur, mais nous devons continuer à vivre », a déclaré Menachem, qui a indiqué qu’elle se produirait au Alf Bar, de l’autre côté de la rue, le week-end suivant.
« Si j’ai peur, les terroristes gagnent », a ajouté Kolonaty.
« Le terrorisme est tout ce qu’ils ont. »
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