L’exposition « Macho Man » intègre les violences conjugales au Festival d’Israël
Le projet espagnol propose une expérience audiovisuelle troublante adaptée, avec des décisions rabbiniques et le récit du viol présumé d'une Britannique par des Israéliens à Chypre
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Le Festival d’Israël de cette année ne comprend pas beaucoup de spectacles internationaux, mais il y a une exception : le troublant « Macho Man », une installation documentaire de l’artiste espagnol Alex Rigola sur la violence envers les femmes.
Dans cette installation, les participants sont conduits par groupes de six, munis d’écouteurs, à travers un labyrinthe de 11 stations installées dans un gymnase du YMCA à Jérusalem.
Dans cette adaptation israélienne de l’original espagnol, les spectateurs sont accueillis par des histoires, de la documentation, des images et quelques interactions personnelles au fur et à mesure qu’ils avancent d’une station à l’autre, pour comprendre progressivement comment la société, l’éducation et les normes juridiques permettent au mal de la violence domestique d’exister.
Ce qui a le plus choqué Rigola, c’est la facilité avec laquelle la dramaturge israélienne Maya Buenos a pu adapter les cas espagnols de violence domestique et sexuelle.
« J’ai été consterné de constater que Maya a pu trouver exactement les mêmes types d’exemples ici en Israël », a-t-il déclaré. « Le plus triste, c’est que c’est exactement la même chose, partout dans le monde. On se dit parfois que c’est peut-être mieux ailleurs. »
Buenos, une artiste de théâtre désignée par le directeur du Festival d’Israël, Eyal Sher, pour adapter l’œuvre de Rigola, a voyagé dans tout Israël pour ses recherches, recueillant des informations « qui n’existent pas de manière simple », a confié Buenos.
Elle a longuement parlé à de nombreuses victimes israéliennes de violences domestiques et sexuelles. Elle est la seule personne impliquée dans le projet à connaître leur identité, car on entend uniquement leur voix lorsqu’elles partagent leurs histoires dans plusieurs stations.
« Il n’y a pas beaucoup de faits et de chiffres », a déclaré Buenos, qui a participé à d’autres travaux sur la violence sexuelle.
Il était essentiel de s’assurer que la cadence et l’ambiance de la narration étaient similaires à celles de l’œuvre de Rigola, a-t-elle ajouté.
Et pourtant, certains aspects de cette version israélienne sont différents de la version espagnole.
L’une des stations comprend des pages imprimées avec des jugements en faveur d’hommes ayant abusé de femmes. Ces décisions avaient été rendues par les tribunaux rabbiniques d’Israël, ce qui semblait étrange à Rigola. Mais en Israël, les mariages juifs rabbiniques ne peuvent être sanctionnés que par le tribunal rabbinique, note Buenos.
Une autre station donne le récit complet et glaçant d’une jeune femme britannique qui a déclaré avoir été violée collectivement par 12 jeunes hommes israéliens alors qu’elle était en vacances à Chypre en 2019. Les hommes ont été inculpés mais relâchés par la suite et la jeune femme a été accusée d’avoir avancé une fausse allégation.
La version du Festival d’Israël de « Macho Man », en collaboration avec la WIZO et avec le soutien de l’ambassade d’Espagne, est destinée aux spectateurs à partir de 15 ans.
L’exposition « Macho Man » a été visitée par des milliers de personnes en Espagne en 2018, a déclaré Rigola.
« J’avais besoin de faire cela parce qu’il y a tellement de cas de violence domestique en Espagne », a-t-il dit. « Je lisais des articles à ce sujet tous les jours, puis j’oubliais, je continuais ma vie. »
Le rythme et le sens du mystère de l’installation ont été imaginés par les dramaturges de la troupe de théâtre espagnole de Rigola, Heartbreak Hotel, délibérément conçus pour susciter une réponse émotionnelle de la part du public.
« Nous voulons produire quelque chose dans votre esprit, vous toucher, pour qu’en quittant l’installation, vous vous disiez : « Je dois faire quelque chose à ce sujet » », a-t-il déclaré.
Pour Rigola, cela s’est traduit par des changements, petits mais vitaux, comme ne pas écouter les blagues misogynes ou arrêter les conversations qui incluent toute sorte de diffamation sexiste.
« L’homme qui tue est peut-être fou, mais l’atmosphère que nous créons est quelque chose que nous pouvons tous aborder », a-t-il déclaré. « C’est une pandémie mondiale que nous devons changer. L’éducation, l’éducation et l’éducation, c’est le seul moyen que nous ayons. »